Françoise Minkowska

Françoise Minkowska
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Françoise Minkowska-Brokman, née le à Moscou et morte le à Paris, est une psychiatre et psychanalyste française, d'origine polonaise.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse et formation[modifier | modifier le code]

Franziska Brokman naît en 1882 à Moscou[1] de parents juifs polonais, Emil Brokman, un marchand de Kalisz, et Anna Blumenthal, qui divorcent en 1892[2]. Elle effectue sa scolarité secondaire au lycée pour jeunes filles de Varsovie, mais du fait du numerus clausus qui concerne les étudiants juifs, elle ne peut être admise dans une faculté de médecine de l'Empire russe[3], ce qui la conduit à s'expatrier en Suisse. Elle fait ses études de médecine à l'université de Berne et à celle de Zurich[2],[4]. Au Burghölzli, elle se spécialise en psychiatrie sous la direction d'Eugen Bleuler et elle fait la connaissance d'Hermann Rorschach, lui aussi élève de Bleuler. Elle obtient son doctorat en médecine en 1909, ce qui lui permet d'exercer la médecine à Kazan, jusqu'en 1912. C'est en Russie qu'elle fait la connaissance d'Eugène Minkowski, dont le parcours s'avère avoir été très semblable au sien.

En 1913, elle épouse Eugène Minkowski. Leurs enfants sont le pédiatre et néonatologiste Alexandre Minkowski (1915-2004) et Jeannine Pilliard-Minkowski, autrice d'un ouvrage consacrée à la vie et à l'œuvre de ses parents[5].

Carrière professionnelle[modifier | modifier le code]

Photographie en tons sépias d'un homme assis, souriant, coiffé d'une toque blanche, tenant dans sa main droite un marteau à réflexes
Édouard Pichon (1890-1940) est l'un des principaux soutiens parisiens de Françoise Minkowska dans l'entre-deux-guerres.

Après la guerre, le couple Minkowski s'installe à Paris, mais Françoise Minkowska, munie de diplômes étrangers ne peut reprendre ses activités cliniques faute du temps nécessaire pour effectuer le supplément d'études requis[6]. Poursuivant néanmoins de manière indépendante les travaux de recherches commencés au Burghölzli, et fermement soutenue par le psychanalyste Édouard Pichon[N 1], l'un des pionniers de la pédopsychiatrie, elle décrit une nouvelle « constitution » psychopathologique (selon la terminologie nosographique de l'époque), la constitution épileptoïde (ou glischroïdie), venant s'ajouter aux constitutions dites « schizoïde » et « cycloïde »[6].

Taches de couleurs réparties symétriquement selon un axe vertical médian
Un exemple de test de Rorschach utilisant des encres colorées.
Peinture du visage d'un homme portant une toque noire et un bandeau blanc autour du visage
Vincent van Gogh : Autoportrait à l'oreille bandée (1889). Les troubles comportementaux de l'artiste s'expliquaient selon F. Mikowska par une « constitution épileptoïde ».

À partir de 1926, elle se consacre avec passion à l'étude de la vie de Vincent van Gogh, soutenant que la maladie de l'artiste n'était pas la schizophrénie, mais l'épilepsie « glischroïde »[8].

Durant la Seconde Guerre mondiale, Françoise Minkowska et son mari survivent à l'Occupation en vivant dans la clandestinité[9], mais sans jamais chercher à dissimuler leur identité juive[N 2]. En 1943, arrêtés sur dénonciation, Françoise Minkowska et son mari échappent de justesse à la déportation grâce à l'intervention de leur ami le psychanalyste Michel Cénac (1891-1965)[11],[12].

Dernières années et mort[modifier | modifier le code]

Françoise Minkowska meurt à 68 ans, le [1], avant d'avoir pu publier son ouvrage sur le test de Rorschach qu'elle préparait[13]. Un recueil de ses articles, dont certains étaient inédits, est cependant publié à titre posthume en 1956. Son oraison funèbre est prononcée au nom de la revue L'Évolution psychiatrique par Jacques Lacan[13].

Postérité[modifier | modifier le code]

Françoise Minkowska laisse son nom à une association fondée en 1962 par son mari, l'association des Amis de Françoise Minkowska[14], ainsi qu'au Centre Françoise Minkowska, un institut psychiatrique pour réfugiés et migrants à Paris[15].

Publications[modifier | modifier le code]

  • « Recherches généalogiques et problèmes touchant aux caractères (et en particulier à celui de l'épileptoïde) », Annales médico-psychologiques,‎
  • Épilepsie et schizophrénie dupoint de vue del'hérédité,
  • « Le test de Rorschach chez les enfants juifs victimes des lois raciales », Revue de psychiatrie infantile, vol. 14, no 4,‎ , p. 133-147
  • Le Rorschach : À la recherche du monde des formes, Paris, L'Harmattan,
  • Van Gogh : sa vie, sa maladie et son œuvre (préf. Eugène Minkowski), Paris, L'Harmattan, (lire en ligne)

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Une quarantaine d'années plus tard, Alexandre Minkowski déclarera à ce propos : « Ma mère a été soutenue par un très grand psychiatre français, Édouard Pichon, le gendre de Pierre Janet, et qui a été le grand ami de la famille [...] ». Pichon, qui était aussi linguiste et maurassien lui avait dédicacé un exemplaire de son livre paru en 1936, le Développement psychique de l'enfant et de l'adolescent des quatre vers suivants[7] :

    Où vas-tu mon beau livre ?
    Minkowski, Minkowska
    Où vas-tu, mon beau livre ?
    L'amitié m'aura.

  2. Son fils Alexandre décrit en ces termes ce sentiment profond d'appartenance au judaïsme : « ... ma mère était profondément juive. Non seulement elle acceptait son judaïsme, mais elle s'en glorifiait ... elle était très croyante alors que mon père ne l'était guère. ...le port de l'étoile jaune pendant l'Occupation a été ressenti par mes parents comme l'insigne d'honneur du « Juif éternel ». D'autres ont préféré se faire nommer « aryens d'honneur » par les nazis »[10].

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b « Acte de décès (avec date et lieu de naissance) à Paris 14e, n° 4246, vue 7/31. »
  2. a et b (pt) Mário Yahn, « In Memoriam: Dr. Françoise Minkowska », Arquivos de Neuro-Psiquiatria, vol. 10, no 1,‎ , p. 93–94 (ISSN 0004-282X, PMID 14953860, DOI 10.1590/s0004-282x1952000100007, lire en ligne)
  3. Jean Garrabé, « Minkowska-Brokman, Françoise », In Alain de Mijolla (dir.) Dictionnaire international de la psychanalyse, tome 2 M-Z, Paris, 2005, p. 1064-1065.
  4. (en) Armando D'Agostino, « Eugène Minkowski (1885-1972): The Phenomenological Approach to Schizophrenia », Psychopathology, vol. 48, no 6,‎ , p. 421–422 (ISSN 1423-033X, PMID 26555462, DOI 10.1159/000440770, lire en ligne)
  5. Jeannine Pilliard-Minkowski, Eugène Minkowski, 1885-1972 et Françoise Minkowska, 1882-1950 : éclats de mémoire, Paris, Harmattan, , 105 p. (ISBN 978-2-296-10586-7, OCLC 503242223, lire en ligne)
  6. a et b Marianne Minkowski 2016.
  7. Minkowski 1975, p. 23.
  8. (en) Stéphanie Larchanche, Cultural Anxieties, Rutgers University Press, , 56–76 p. (ISBN 978-0-8135-9541-2, PMCID 225020721, DOI 10.36019/9780813595412-006), « 2 Transcultural Practice at Centre Minkowska »
  9. (de) Psychoanalytikerinnen. Biografisches Lexikon, « Françoise Minkowska geb. Brockmann (1882-1950) », sur psychoanalytikerinnen.de (consulté le )
  10. Minkowski 1975, p. 24.
  11. Jeannine Pilliard-Minkowska, « Postface - Eugène Minkowski : regards sur le passé », Le Temps vécu,‎ , p. 401-405 (lire en ligne Accès payant)
  12. Jean Garrabé, « Histoire de l’introduction de la phénoménologie en psychiatrie en France Partie 2 : Après la Seconde Guerre mondiale », Perspectives Psy, vol. 55, no 4,‎ , p. 295-301 (ISSN 0031-6032, DOI 10.1051/ppsy/2016554295, lire en ligne Accès payant)
  13. a et b Jean Garrabé, « Françoise Minkowska-Brokman », dans Alain de Mijolla (dir.), Dictionnaire international de la psychanalyse 2. M/Z., Paris, Calmann-Lévy, (ISBN 2-7021-2530-1), p. 1013-1014.
  14. Association Françoise et Eugène Minkowski, « Historique », sur minkowska.com
  15. « Centre Françoise Minkowska », Maison des réfugiés (consulté le )