Henri Dreyfus-Le Foyer

Henri Dreyfus-Le Foyer
Biographie
Naissance
Décès
Nom de naissance
Henri Nathan Dreyfus
Nationalité
Formation
École normale supérieure (à partir de )Voir et modifier les données sur Wikidata
Activité
Fratrie
Pierre Dreyfus-Le Foyer (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
A travaillé pour
Distinction

Henri Dreyfus-Le Foyer, né le dans le 7e arrondissement de Paris et mort le dans le 1er arrondissement de Paris, est un professeur de philosophie français.

Son nom s'est retrouvé au centre d'une polémique parce qu'on a reproché à Jean-Paul Sartre, qui a été son successeur au lycée Condorcet, d'avoir accepté d’être nommé sur son poste laissé vacant à la suite de son éviction en raison du statut des Juifs édicté le par le régime de Vichy.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse et famille[modifier | modifier le code]

Il naît en 1896 dans un milieu de la grande bourgeoisie juive parisienne[1], sous le nom d'Henri Nathan Dreyfus, fils d'Abraham Albert Dreyfus, négociant, et Marie Renée Loevel (sœur de l'écrivain Maurice Level et cousine germaine de Marcel Schwob), son épouse[2]. Ses parents divorcent en 1906[3] et l'année suivante, sa mère se remarie avec l'avocat et homme politique (député de Paris en 1909-1910) Lucien Le Foyer[4]. En vertu d'un jugement rendu par le Tribunal civil de la Seine le , Henri Dreyfus et son frère Pierre sont adoptés par leur beau-père, d'où l'adjonction du nom Le Foyer à leur patronyme de naissance.

Son frère Pierre Dreyfus-Le Foyer, chirurgien en pneumonectomie à l'hôpital Laennec, se réfugia en 1940 dans une clinique de Guéret (Creuse)[5].

Carrière[modifier | modifier le code]

Pendant la Seconde Guerre Mondiale, la propriété de la famille du député de Paris, Lucien Le Foyer, ne fut pas confisquée et volée par les Allemands comme celles d'Alphonse Kann et des Goujon-Reinach, mais sauvée par la municipalité, qui mit tous leurs biens à l'abri[6].

Henri Dreyfus-Le Foyer entre à l'École normale supérieure en 1919, il est reçu à Ulm dans la promotion spéciale des démobilisés de 1919, puis il est reçu premier à l’agrégation de philosophie en 1922[7] et reçu à l’internat en psychiatrie en 1930. Il est professeur de philosophie aux lycées Condorcet et Henri-IV à Paris. Au cours d'études de médecine, il rédige une thèse intitulée Le Vertige.

En 1940, lorsque la France est envahie et occupée par l'armée allemande, il est professeur de philosophie en khâgne au lycée Condorcet à Paris, où il est en poste depuis 1935[1]. Il est mobilisé de mars à juillet 1940 et promu médecin auxiliaire. Contraint de quitter son poste à Paris à la rentrée 1940, il obtient d'abord de Vichy le une affectation « en repliement » au lycée Ampère à Lyon, en zone libre[8]. Le 15 octobre 1940, Ferdinand Alquié est nommé comme suppléant pour le remplacer à Paris au lycée Condorcet, en plus de son propre service maintenu comme professeur titulaire au lycée Rollin (aujourd'hui lycée Jacques-Decour). Peu après, Henri Dreyfus-Le Foyer reçoit du lycée Ampère la « circulaire concernant le statut des Israélites », puis, le 29 janvier 1941, un arrêté : « Monsieur Dreyfus-Le Foyer Henri, professeur de philosophie au lycée Condorcet, en repliement au lycée Ampère à Lyon, est admis à faire valoir ses droits à la retraite à dater du . […] Par suite de nécessités de service, il sera pourvu définitivement au remplacement de Monsieur Dreyfus-Le Foyer à partir de la même date ». Il est donc révoqué de son poste et destitué de la fonction publique en vertu du « statut des juifs » du 3 octobre 1940.

En septembre 1941, c'est Jean-Paul Sartre, alors professeur au lycée Pasteur de Neuilly, qui est nommé sur le poste du lycée Condorcet, en classe préparatoire. Cet « effet d'aubaine » au détriment d'un Juif, qu'il ne pouvait ignorer, est l'objet d'une longue polémique depuis la fin du XXe siècle[1].

Henri Dreyfus-Le Foyer, quant à lui, s'installe à Lyon, puis dans le département des Hautes-Alpes, notamment à La Chapelle-en-Valgaudemar, où il passe le reste de la guerre en mettant au service des habitants du village et des maquisards ses aptitudes de médecin.

Après la Seconde Guerre mondiale, il enseigne comme professeur de philosophie dans la khâgne du lycée Henri-IV à Paris (à partir de 1945), aux côtés de Henri Birault (khâgne), ainsi que de Maurice Savin et Étienne Borne (hypokhâgne).

En 1966, son Traité de philosophie générale reçoit le prix Broquette-Gonin de littérature, attribué par l'Académie française.

Il meurt en 1969 à Paris[9].

Œuvres[modifier | modifier le code]

  • « Les conceptions médicales de Descartes », Revue de métaphysique et de morale, Armand Colin, Paris, 1937, pp. 237-286
  • Maurice Dorolle et Henri Dreyfus-Le Foyer, Traité de dissertation philosophique, classe de philosophie et première supérieure, Paris, 1947. Réédition 1950, Delagrave.
  • Traité de philosophie générale, Paris, Armand Colin, 1965, collection U.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Ingrid Galster, « Retour sur Sartre pendant l'Occupation », Commentaire 2000/4, n° 92, pp. 875-888.
  • Ingrid Galster, « Sartre et la "question juive", Réflexion au-delà d'une controverse », Commentaire 2000/1, n° 89, pp. 141-147, article repris dans Sartre, Vichy et les intellectuels, L'Harmattan, 2001.
  • Ingrid Galster, « Résistance intellectuelle et soutien passif de Vichy ? Réflexions sur un paradoxe dans l'itinéraire de Jean-Paul Sartre », in Albrecht Betz et Stefan Martens (dir.), Les Intellectuels et l'Occupation, 1940-1944, Collaborer, partir, résister, Autrement, 2004.
  • Ingrid Galster, Sartre et les juifs, La Découverte, 2005.
  • Ingrid Galster, « Sartre pendant l'Occupation. Réponse à une diffamation », Commentaire 2006/2, no 114, pp. 463–467.
  • Michel Winock, « Jean-Paul Sartre en 1941 : une controverse », in Ingrid Galster (dir.), Sartre et les juifs, La Découverte, 2005, pp. 121-128.
  • Michel Winock, La France et les juifs, Seuil, 2004.
  • Pierre Albertini, « Les juifs du lycée Condorcet dans la tourmente (1940-1944) », Vingtième Siècle. Revue d'histoire 2006/4, n°92, Presses de Sciences-Po, pp. 81-100, texte issu d'une communication prononcée le 13 mai 2004 à l'occasion des cérémonies du bicentenaire du lycée Condorcet.
  • Pierre Albertini, conférence du 14 mars 2023, « Les juifs du lycée Condorcet dans la tourmente (1940-1944) ».

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b et c Pierre Albertini, « Les juifs du lycée Condorcet dans la tourmente », Vingtième Siècle : Revue d'histoire, n°92, 2006/4, pp. 81-100.
  2. Acte de naissance no 323, , Paris 7e, Archives de Paris en ligne (avec mentions marginales de mariage, d’adoption et de décès)
  3. Acte de mariage Dreyfus-Loevel no 730, , Bordeaux, section 1, Archives municipales de Bordeaux (avec mention marginale de divorce).
  4. Acte de naissance no 4474, , Paris 10e, Archives de Paris en ligne (avec mentions marginales de reconnaissance et de mariage).
  5. Françoise Verny, Serons-nous vivants le 2 janvier 1950 ?.
  6. François Boulet, Leçon d'histoire de France Saint-Germain-en-Laye: Des antiquités nationales, Paris, Les Presses franciliennes, 2006, p. 349.
  7. « Les agrégés de l'enseignement secondaire. Répertoire 1809-1960 », sur cnrs.fr (consulté le ).
  8. Par arrêté du 30 octobre 1940 fait à Vichy, Henri Dreyfus-Le Foyer est nommé, à titre provisoire, professeur agrégé de philosophie au lycée Ampère à Lyon. Il reste titulaire de la chaire à Condorcet jusqu'au 20 décembre 1940.
  9. Acte de décès no 157, , Paris 1er, Archives de Paris en ligne.

Liens externes[modifier | modifier le code]