Evry Schatzman

Evry Léon Schatzman ( à Neuilly-sur-Seine, France - à Paris 19e[1],[2],[3],[4]) est un astrophysicien français spécialisé dans le domaine de la structure des étoiles. Il est aussi connu pour avoir été, après-guerre, un pionnier de l'enseignement de l'astrophysique théorique en France[2].

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse et études[modifier | modifier le code]

Photo de famille prise en été vers 1930 avec de gauche à droite Danny, Benjamin, Evry et Cécile Schatzman.
Evry Schatzman (troisième à partir de la gauche) avec sa sœur Danny, son père Benjamin et sa mère Cécile, vers 1930.

Evry Schatzman naît le à Neuilly-sur-Seine[5]. Son père, Benjamin Schatzman (1877-1942), est un dentiste né à Tulcea en Roumanie et ayant émigré en 1882, avec sa famille à Zikhron Yaakov en Palestine, durant la première Aliyah, avant de venir s'installer en France à l'âge adulte[6]. Sa mère, Cécile Kahn (1882-1969) est la fille de Léon Kahn (ancien secrétaire du consistoire israélite de Paris[6]).

Il intègre l'École normale supérieure en 1939. Son jeune âge au moment du déclenchement de la Seconde Guerre mondiale lui épargne d'être mobilisé, mais ces années de guerre perturbent grandement la suite de son cursus, et l'obligent à entrer dans une semi-clandestinité du fait de ses origines juives[7]. En raison des lois anti-juives du régime de Vichy il est notamment obligé pour terminer ses études de se rendre à Lyon où il rencontre sa femme Ruth Fisher[2] (1920-2020), fille du responsable du KKL Joseph Fisher. D'autre part son père est victime d'une rafle en décembre 1941. D'abord interné en France, il meurt, en septembre 1942, probablement lors de son transfert vers les camps d'extermination[6].

Muni de faux papiers — son pseudonyme est alors Antoine Emile Louis Sellier[7] — Evry Schatzman se réfugie avec sa femme à l'Observatoire de Haute-Provence en 1943, année où il se marie. Il trouve son premier sujet de recherche, les naines blanches, dans la maigre bibliothèque de l'observatoire (et notamment un ouvrage de Walter Baade)[2].

Après un retour à Paris fin 1944, il passe l'agrégation de physique et se voit offrir un poste au CNRS en 1945[5], juste avant de soutenir sa thèse en mars 1946 devant un jury présidé par le Prix Nobel de physique Louis de Broglie.

À partir de 1945 et jusqu'en 1954, il est chargé de recherche, puis maître de recherche au CNRS. En 1954, il est nommé professeur à la faculté des sciences de Paris, puis à partir de 1970, à l’université Paris 7-Denis-Diderot. En 1976, il devient directeur de recherche au CNRS, à l’Observatoire de Nice, puis à l’Observatoire de Meudon à partir de 1988[5].

Carrière[modifier | modifier le code]

Après son recrutement par le CNRS, il est d'abord affecté à l'Institut d'astrophysique de Paris. Il y publie son premier article notable[8], où il émet l'hypothèse (aujourd'hui abandonnée) que les supernovae sont dues à des arrangements de la structure interne des naines blanches et non à l'effondrement gravitationnel d'une naine blanche en étoile à neutrons comme l'avait proposé Fritz Zwicky avant guerre[9]. Il publie également la même année un long article sur la structure interne des naines blanches[10].

En 1947, il est invité par Bengt Strömgren à séjourner à l'université de Copenhague, et se met à étudier sur les conseils de son hôte l'atmosphère des naines blanches. Il est ensuite invité à l'Université de Princeton où il s'intéresse aux atmosphères stellaires, et propose en 1949 un mécanisme de chauffage de la couronne solaire via des ondes de choc[11].

Titulaire de la première chaire d'astrophysique française, créée à la Sorbonne, il enseigna aussi régulièrement à l'Université libre de Bruxelles (1949-1967), et exerça son métier de chercheur successivement à l'Institut d'astrophysique de Paris, à l'Observatoire de Paris-Meudon (à partir 1969) où il crée le Laboratoire d'astrophysique de Meudon, à l’université de Californie (Berkeley) (1984-1988) et en fin de carrière à l'Observatoire de Nice avant de retourner à Meudon, en tant que chercheur émérite[2].

Vers la fin de sa carrière, il participe à l'expérience GALLEX de mesure du flux de neutrinos solaires, dont l'amplitude fut confirmée comme étant significativement plus faible que prévu[12], l'explication de ce phénomène étant en réalité due aux oscillations de neutrinos, mises en évidence peu après par le détecteur Super-Kamiokande.

Diminué depuis 2002 par une maladie qui le prive d'une grande partie de sa capacité à communiquer, il meurt à Paris le [2].

Sa fille Michelle Schatzman est une mathématicienne française. Son fils, Jérôme Schatzman, travaille à l'ESSEC. Il rend, en juillet 2020, un rapport sur le financement de l'innovation sociale au Haut-Commissariat à l’Économie Sociale et Solidaire et à l'innovation sociale[13].

Militantisme[modifier | modifier le code]

Marqué par les années de guerre, il milite au Parti communiste français de 1946 à 1959[5] qu'il quitte en réprouvant les crimes staliniens. Il devient plus tard secrétaire général du Syndicat national de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique, et fut également longuement président de l'Union rationaliste[2] (de 1970 à 2001).

Distinctions[modifier | modifier le code]

Prix scientifiques[modifier | modifier le code]

Distinctions civiles[modifier | modifier le code]

Autres[modifier | modifier le code]

Publications[modifier | modifier le code]

  • Avec Ruth Schatzman édite: Benjamin Schatzman. Journal d'un interné: Compiègne, Drancy, Pithiviers -. Éditions Le Manuscrit, 2005. (ISBN 2-7481-6032-0 et 2-7481-6034-7)
  • Avec Françoise Praderie, Les Étoiles, InterEdition - Éditions du CNRS, 1990
  • Les Enfants d'Uranie : à la recherche des civilisations extraterrestres, éd. Le Seuil, 1986 (ISBN 2-020-09094-5)
  • La Science menacée, éd. Odile Jacob, 1989, (ISBN 2-738-10044-9)
  • Le Message du photon voyageur, éd. Belfond, 1987
  • Astrophysique générale, J.-C. Pecker et E. Schatzman, Masson & Cie, 1959
  • « Notre Univers », Diagrammes, no 13,‎
  • en coll. avec J. C. Pecker et Paul Couderc, L'astronomie au jour le jour, Paris, Gauthier-Villars,
  • Origine et évolution des mondes, éd. Albin Michel, coll. « Sciences d'aujourd'hui », 1957
  • (en) White Dwarfs, North Holland Publishing Company, Amsterdam, 1957

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Relevé des fichiers de l'Insee
  2. a b c d e f et g Jean-Claude Pecker (professeur honoraire au Collège de France), Evry Schatzman, astrophysicien, Le Monde n°20300 daté du , page 23
  3. Evry Shatzman rejoint les étoiles, communiqué de presse du centre national de la recherche scientifique (CNRS), .
  4. Décès d'Evry Schatzman, communiqué de presse de l'Union rationaliste, .
  5. a b c et d « Mort du père de l'astrophysique française », sur lefigaro.fr, .
  6. a b et c Benjamin Schatzman et Ruth Schatzman, Journal d'un interné, Éditions Le Manuscrit, (ISBN 978-2-7481-6033-8 et 2-7481-6033-9, lire en ligne), p. 11-14
  7. a et b (en) Evry Schatzman, The Desire To Understand the World, Annual Review of Astronomy and Astrophysics, 34, 1-34 (1996) Voir en ligne (accès restreint).
  8. Evry Schatzman, Théorie des Supernovae, Annales d'astrophysique, 9, 199-221 (1946) Voir en ligne.
  9. La théorie des supernovae était, à cette époque, impossible à contraindre du fait des limitations des données observationnelles disponibles. Par exemple, l'évaluation de la luminosité maximale des supernovae à leur maximum était erronée de six ou sept ordres de magnitude.
  10. Evry Schatzman, Théorie du débit d'énergie des naines blanches, Annales d'Astrophysique, 8, 143-209 (1946) Voir en ligne.
  11. (en) Evry Schatzman, The heating of the solar corona and chromosphere, Annales d'Astrophysique, 12, 203-218 (1949) Voir en ligne.
  12. (en) Collaboration GALLEX, « GALLEX solar neutrino observations: results for GALLEX IV », Physics Letters B, 447, 127-133 (1999), Voir en ligne (accès restreint).
  13. « Le rapport Schatzman : comment financer l'innovation sociale ? », sur Le French Impact, (consulté le ).
  14. « Evry Scatzman » sur le site de l'Académie des sciences
  15. Comptes rendus des séances de l'Académie des sciences. Vie académique - 1982-01
  16. CNRS, « Médailles d'or du CNRS », sur cnrs.fr (consulté le ).

Liens externes[modifier | modifier le code]