Château de Pregny

Château de Pregny
Image illustrative de l’article Château de Pregny
Le château vu depuis le Léman.
Nom local Château Rothschild
Pavillon de Pregny (ancien nom)
Période ou style néo-Louis XVI
Type Château de Maître
Architecte George Henry Stokes
Joseph Paxton
Début construction 1858
Fin construction
Propriétaire initial Adolph Carl von Rothschild
Destination initiale Habitation
Propriétaire actuel État de Genève
Ariane de Rothschild (usufruit)
Destination actuelle Habitation
Protection
Coordonnées 46° 14′ 07″ nord, 6° 08′ 30″ est
Pays Drapeau de la Suisse Suisse
Canton Drapeau du canton de Genève Genève
localité Pregny (Pregny - village)
Commune Pregny-Chambésy
Géolocalisation sur la carte : Suisse
(Voir situation sur carte : Suisse)
Château de Pregny
Géolocalisation sur la carte : canton de Genève
(Voir situation sur carte : canton de Genève)
Château de Pregny

Le château de Pregny (aussi appelé château Rothschild) est situé dans la commune de Pregny-Chambésy, dans le canton de Genève, en Suisse.

Localisation[modifier | modifier le code]

Le château vu du ciel.

Le château se situe plus exactement dans la localité de Pregny, dans le sous-secteur de Pregny-Village, au lieu-dit Pregny. Il est possible d'accéder au domaine par trois entrées : une en face de la place de Pregny, une autre en face de l'église Sainte-Pétronille de Pregny-Chambésy et une dernière par le chemin des Cornillons.

Le domaine a une surface totale de 17,76 ha.

Histoire[modifier | modifier le code]

« Pavillon de Pregny »[modifier | modifier le code]

Le 26 juillet 1821, Auguste Saladin de Lubières achète un domaine à Pregny et y fait construire sa maison en 1825 appelée « Pavillon de Pregny »[1]. Sa maison, conçue par Luigi Bagutti entre 1822 et 1825 dans un style grec, surplombe la colline avec une vue sur le Léman.

En 1855, le domaine est racheté par le baron Adolph Carl von Rothschild (branche allemande de la famille) qui démolit le « Pavillon de Pregny » en 1858 et modifie le profil du coteau par de gigantesques terrassements.

Château de Pregny[modifier | modifier le code]

Le château, édifié entre 1858 et 1860, sur des plans de George Henry Stokes et certainement de Joseph Paxton, possède une emprise au sol de 1 126 m2. Le château possède une composition monumentale tripartite néo-Louis XVI, marquée d’avant-corps sur les deux façades s’accompagnant de balcons à balustrade et d’un très riche décor sculpté de feuillages et de vases. La façade, donnant directement une vue sur le Léman, possède un avant-corps central en saillie circulaire baroque et un ample jeu d’escaliers de part et d’autre de l’esplanade. Le château n'avait pas de toit mais était recouvert d'une terrasse à l'italienne. La demeure est principalement destinée à abriter la collection de peintures et d'objets d'art amassée par Adolph, notamment des objets en cristal de roche (il acquiert la collection du grand-duc de Bade) et en pierres semi-précieuses. L'aménagement intérieur est réalisé par Eugène Viollet-le-Duc. Le château compte, notamment comme décoration, des meubles du XVIIIe siècle et des toiles de Francisco de Goya, Rembrandt ou encore Jean-Honoré Fragonard[2].

En 1860, Adolph fait construire une volière paxtonienne. De l'autre côté de la route, la baronne Julie de Rothschild, femme et cousine d'Adolph, fait construire des serres[3].

En 1870, Adolph lègue le château de Pregny ainsi que son domaine à Julie de Rothschild, ne conservant personnellement que la partie du domaine touchant le lac et la villa « Port Rouge ». Le domaine est donc coupé en deux parties[3].

En 1872, l'architecte Francis Gindroz ajoute des combles mansardés à œils-de-bœuf, connotation Napoléon-III, destinée à créer des chambres pour le personnel[4].

En 1879, Julie fait construire des écuries de style néo-Renaissance française aux armes des Rothschild par John Camoletti sur un plan à deux retours d’aile. En 1880, Julie fait construire, également par John Camoletti, un manège étant un dispositif circulaire raffiné, avec une structure métallique et une coupole plate sur un socle de pierre de Meillerie[3].

À l'origine, le domaine ne comprenait que la partie supérieure du coteau. En 1880, la baronne rachète le vignoble se trouvant en contrebas du domaine pour en faire un jardin pittoresque alpin imaginé par Jules Allemand. Un colossal travail de terrassement, visant à briser l’homogénéité de la topographie, est alors mené. Entre 1887 et 1892, plus de 1500 arbres sont amenés de toutes les pépinières et forêts du canton. Elle profite également de réaménager le parc en faisant construire des chalets, grottes, pavillons, remploi de sculptures, étang, ruisseau et cascade artificielle ainsi qu’un véritable jardin zoologique[5]. Une fois l'aménagement du parc terminé, elle décide d'ouvrir le parc au public deux fois par semaine[3].

C'est parce qu'elle voulait rencontrer la baronne que l'impératrice d'Autriche Sissi, qui résidait incognito à l'hôtel Beau-Rivage à Genève, voulut prendre le bateau qui traversait le lac. Sur le quai, elle fut poignardée par Luigi Lucheni, un anarchiste, et mourut sur le bateau Le Genève.

En 1907, à la mort de Julie, le château est rétrocédé à Maurice de Rothschild (neveu de Julie, issue de la branche française de la famille). Au début, le domaine ne l'intéresse pas. Le château sert alors à entreposer les collections d’œuvres d'art et autres objets de valeur de la famille. Cependant, en 1940, à la suite d'un décret du , Maurice de Rothschild est déchu de sa nationalité française par le régime de Vichy. La famille est alors contrainte de s'exiler au château de Pregny (abandonnant alors le château de Boulogne-Billancourt saccagé pendant l'occupation allemande)[3].

Le château photographié le 16 mai 1925 par Walter Mittelholzer.

En 1957, lors du décès de Maurice de Rothschild, celui-ci lègue son domaine à l'État de Genève tout en conservant un droit d’usufruit pour la famille Rothschild[6]. Le château sera ensuite occupé par son fils Edmond de Rothschild et son épouse Nadine de Rothschild. De 2017 à 2021, le château est habité par Benjamin de Rothschild et Ariane de Rothschild, puis seulement par cette dernière.

Propriétaires[modifier | modifier le code]

Maurice de Rothschild lègue par testament, le 4 septembre 1957, le domaine et le château à la République et Canton de Genève, tout en maintenant un usufruit au bénéfice de son fils Edmond de Rothschild. Par la suite, Edmond demande et obtient l'extension de l'usufruit en faveur de son épouse, Nadine de Rothschild, et de son fils Benjamin de Rothschild. Lequel, avant son décès, le fait étendre à son épouse Ariane de Rothschild[7].

Propriétaires[modifier | modifier le code]

Bénéficiaires de l'usufruit de 1957[modifier | modifier le code]

Domaine[modifier | modifier le code]

Écuries[modifier | modifier le code]

Entrée des écuries.

L'un des bâtiments les plus imposants est les écuries situées le long de la Route de Pregny, séparée de celle-ci par un mur. Conçues en 1879 par John Camoletti, les écuries sont de style néo-Renaissance française et contiennent les armes de la famille Rothschild, Le bâtiment comporte un plan à deux retours d’aile, des matériaux polychromes, de la pierre de Meillerie, des briques, de la roche blanche et de l'ardoise. Le tout est surmonté d'un clocheton[4].

Utilisé comme écurie à chevaux, le bâtiment a ensuite abrité les voitures de collection de Benjamin de Rothschild, avant que celui-ci ne construise un garage souterrain de 3 598 m2 dans un terrain voisin[8].

Volière[modifier | modifier le code]

La volière vue depuis la Route de Pregny.

La volière paxtonienne, datant de 1860, se situe à l'ouest du domaine et longue la Route de Pregny, en face des serres. La volière est considérée comme un chef-d’œuvre de l’architecture de verre et de métal[4].

Manège[modifier | modifier le code]

Le manège, construit en 1880 également par John Camoletti, est de forme circulaire avec une structure métallique et une coupole plate sur un socle de pierre de Meillerie. Il est aujourd'hui utilisé comme salle de conférences et de réceptions[4].

Loges[modifier | modifier le code]

La loge nord et le portail principal.
La loge sud et les écuries.

Les loges des gardiens sont au nombre de deux. Celle située à l'entrée sud est de style néo-Louis-XVI et date de 1860. Elle est placée entre les écuries et le portail d'entrée à ferronnerie. La loge nord, située à l'entrée ouest, ne possède pas le même style et date des années 1880[4].

Serres[modifier | modifier le code]

Les serres vues du ciel.

Séparées du domaine par la Route de Pregny, les serres du château s'étalent sur 10 523 m2. La plus ancienne serre, datant des années 1860, forme un long couloir adouci par les arcs des supports, avec un sol chauffé et dallé de panneaux de fonte ajourés de rosaces orientales. Aujourd'hui, ces serres appartiennent à la Ville de Genève et sont utilisées par le jardin botanique.

Autres[modifier | modifier le code]

Le domaine comprend également quelques maisons de logements et d'entretien, une piscine avec pavillon, des petites serres, un potager et un étang.

Au nord du domaine se trouvent les tombes familiales, dont celle de Maurice de Rothschild[N 1].

Protection[modifier | modifier le code]

Le château et les dépendances sont classés comme « bien culturel d'importance nationale » par l'Office fédéral de la protection de la population[9].

Les serres sont également classées comme étant un bien culturel d'importance nationale et bien culturel d'importance régionale[10].

Depuis le 16 octobre 1987, le château et tous les bâtiments présents dans le parc sont inscrits sur la liste des objets inscrits à l'inventaire par le Département des Travaux Publics du canton de Genève[11],[12].

Anecdotes[modifier | modifier le code]

La rose Pavillon de Pregny de Jean-Baptiste Guillot (père).
  • En 1863, sous la demande d'Adolph Carl von Rothschild, le pépiniériste et créateur de roses français Jean-Baptiste Guillot (père) crée un hybride de Rosier Bourbon baptisé Pavillon de Pregny en hommage à l’ancienne maison de maître qui se trouvait à l'emplacement de l'actuel château.
  • En 1869, Adolph Carl von Rothschild avait introduit des vignes anglaises dans ses serres à raisin. Cependant, ces vignes anglaises étaient infectées par le phylloxéra [13]. Entre 1871 et 1874, l'insecte se propagea dans les communes de Pregny, Grand-Saconnex, Petit-Saconnex et Genthod. On s'empressa alors d'exproprier temporairement les vignes de ces quatre communes et de les détruire, ce qui n'empêcha pas la propagation de l'insecte sur l'ensemble de la rive droite du canton. En 1893, les viticulteurs genevois, voyant leur vignes disparaitre de plus en plus rapidement, adressèrent plusieurs pétitions au département fédéral de l'agriculture demandant d'arrêter la lutte et l'autorisation de planter de nouvelles vignes américaines plus résistantes à la maladie du phylloxéra. Le Conseil fédéral adopte la pétition et sépare le canton en deux zones : dans l'une, la lutte devait continuer; dans l'autre, la plantation de vignes américaines était autorisée. Le 21 janvier 1898, le Conseil fédéral décide d'arrêter la lutte contre le phylloxéra et d'autoriser la plantation de vignes américaines dans tout le canton. L'examen par souche dura encore quelques années dans les communes de Meyrin, Vernier, Grand-Saconnex, Petit-Saconnex et Pregny. Au total, pour Pregny, 100 hectares ont été infectés par l'insecte et 2 hectares ont été perdus. La technique de remplacement des vignes européennes par des vignes américaine pour arrêter la propagation du phylloxéra a eu un tel succès que l'Europe entière s'en inspira [14],[15].
  • Le , l'impératrice Élisabeth d'Autriche (familièrement appelée Sissi par les membres de sa famille), se rend à déjeuner à Pregny chez la baronne Julie de Rothschild. L'impératrice refuse l'offre de la baronne qui lui propose son bateau pour retourner à Territet le lendemain. Voyageant incognito sous un pseudonyme, la souveraine souhaite prendre le vapeur de la compagnie de navigation. Ce refus lui est fatal, elle est assassinée le lendemain au moment d'embarquer[16].

Villa « Port Rouge » et maison de maître « Port Rothschild »[modifier | modifier le code]

La villa « Port Rouge » (petit bâtiment de droite) accolée à la maison de maître « Port Rothschild » (bâtiment de gauche).

Lorsque Adolph Carl von Rothschild acquiert le domaine en 1855, celui-ci s'étendait jusqu'au bord du lac. En attendant la construction de son nouveau château, Rothschild fit construire, en 1858, une petit villa nommée « Port Rouge » située entre la route de Suisse et le Léman. Entre 1860 et 1880, il y fait aménager un port. Après avoir légué le château de Pregny à sa femme Julie, Adolphe restera vivre à « Port Rouge ». À sa mort, le terrain est coupé en trois par Maurice Duval. Le milieu est acquis par Mary Bonnet, qui y construit un chalet nommé « Les Dauphins » ; les deux extrémités sont acquises par Arnold Amstutz (1864-1832), dont il gardera la villa « Port Rouge » et se construisit la villa « Terrasse-Midi » en 1914. En 1929, le terrain du milieu contenant le chalet « Les Dauphins » est acquis par la famille Amstutz, qui détruisit le chalet et créa une extension sud à la villa « Port Rouge » qu'ils renomment « Port Rothschild » en 1968. Le bâtiment, construit par l'architecte Marc Gignoux, est un pastiche de style Louis XIII[17],[18].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Bien que la parcelle où se trouve le domaine appartienne à l'État, la parcelle (de 91 m2) où se trouve la tombe appartient à la famille Rothschild.

Références[modifier | modifier le code]

  1. Ville de Genève, « Combien d'hectares comptait le domaine de Pregny, acquis par Auguste Saladin de Lubières et sur lequel se trouve l'actuel Château de Pregny ? » Accès libre, sur www.geneve.ch, (consulté le )
  2. « Chez les Rothschild, une succession faite de mystères et d'embûches », sur Le Figaro, (consulté le ).
  3. a b c d e f g h i j et k Guillaume Fatio et Raymond Perrot, Pregny-Chambésy, commune genevoise, Pregny-Chambésy, commune de Pregny-Chambésy, 1947 / 1978, 360 p., p. 245-252
  4. a b c d et e « Château Rothschild », sur data.geo.admin.ch, (consulté le )
  5. Confédération Suisse : Département fédéral de l'Intérieur (DFI) : Office fédéral de la culture (OFC), « ISOS 1866 : Pregny », Inventaire fédéral des sites construits d’importance nationale à protéger en Suisse,‎ (lire en ligne Accès libre [PDF]).
  6. « Journal de Genève - 13.09.1957 - Pages 2/3 », sur www.letempsarchives.ch (consulté le )
  7. « Après le décès de Benjamin – Même légué à l’État, le château Rothschild reste privé », sur Tribune de Genève (consulté le )
  8. République et canton de Genève, « Extrait de la mensuration officielle et du registre foncier » Accès libre, sur ge.ch, (consulté le )
  9. Office fédéral de la protection de la population, « Inventaire des biens culturels d'importance nationale : Château Rothschild et Dépendances » Accès libre, sur api3.geo.admin.ch (consulté le ).
  10. Office fédéral de la protection de la population, « Inventaire des biens culturels d'importance nationale : Serres de Rothschild » Accès libre, sur api3.geo.admin.ch (consulté le ).
  11. « Liste des objets inscrits à l'inventaire », sur ge.ch, (consulté le )
  12. « Arrêté du 16 octobre 1987 approuvant l'inscription à l'inventaire du domaine », sur www.ge.ch, (consulté le )
  13. « Le Cultivateur aveyronnais », journal,‎ , p. 551 (lire en ligne)
  14. J. Bloch, « Journal des viticulteurs : organe des intérêts agricoles et économiques du Midi », journal,‎ (lire en ligne)
  15. « Journal officiel de la République française : lois et décrets », journal,‎ (lire en ligne)
  16. Yelmarc Roulet, « Pèlerinages en Suisse (4) : Le dernier cri de la mouette marine », Tribune De Genève (TDG),‎ (lire en ligne)
  17. Guillaume Fatio et Raymond Perrot, Pregny-Chambésy, commune genevoise, Pregny-Chambésy, Commune de Pregny-Chambésy, 1978 (1re éd. 1947), 360 p., p. 295-296
  18. Gilles Gardet, Carte historique de la commune de Pregny-Chambésy, juin 2016, (voir en ligne).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Articles connexes[modifier | modifier le code]