Zéro Janvier

Zéro Janvier
Personnage de fiction apparaissant dans
Starmania.

Naissance Monopolis (probablement)
Décès Monopolis
Sexe Masculin
Activité
  • Militaire
  • Businessman
  • Politicien
Affiliation Parti Pris Pour le Progrès (chef)
Entourage
Ennemi de
  • Grand Gourou Marabout (opposant politique)
  • Les Étoiles Noires (groupe terroriste opposé)
  • Johnny Rockfort (chef des Étoiles Noires)
  • Cristal (membre des Étoiles Noires)

Créé par Michel Berger, Luc Plamondon
Interprété par
Première apparition 1978 : Starmania, ou la passion de Johnny Rockfort selon les évangiles télévisés (album)
Dernière apparition 2022 - : Starmania (spectacle mis en scène par Thomas Jolly et Samy Zerrouki)

Zéro Janvier est un personnage de Starmania, l'opéra-rock de Michel Berger et Luc Plamondon.

Présentation[modifier | modifier le code]

Biographie fictive[modifier | modifier le code]

Issu d'un milieu modeste voire défavorisé, affirmant être « parti de rien »[1], Zéro Janvier s'illustre tout d'abord dans une carrière militaire. Au front, il conserve comme talisman une photo de Stella Spotlight, l'une des actrices les plus emblématiques de sa génération. Il s'avère être l'un des admirateurs les plus enthousiastes de la comédienne qu'il érige en « Déesse de l'amour, Déesse de la guerre »[2].

Au fil des ans, Zéro Janvier continue brillamment son élévation sociale. Il devient milliardaire en construisant des gratte-ciels, parmi lesquelles sa fameuse Tour dorée qui surplombe la ville de Monopolis. Tout semble lui sourire : les aventures amoureuses, les suites dans tous les Hilton, le sens des affaires, un environnement privilégié, la fierté d'une ascension indiscutable[3].

Désormais au sommet du pouvoir économique, il annonce sa candidature à l'élection présidentielle. Il défend un modèle de société sécuritaire, raciste, économiquement libérale et résolument éloignée de toute conception écologiste : il vante un « nouveau monde atomique [...] sous la loi martiale ». Il ambitionne également de se lancer dans la conquête de l'espace et de coloniser les planètes environnantes[4]. Reprenant à son compte les vers de L'invitation au voyage de Baudelaire[5], il promeut « un monde où tout ne serait plus qu'ordre et beauté, luxe, calme et propreté »[6]. Son principal adversaire, le Gourou Marabout, prône quant à lui un retour à la nature et une plus grande liberté des mœurs.

Habile et redoutable, Janvier manipule en outre l'image du gang terroriste les Étoiles Noires : il fait de la bande la cible à abattre, jouant sur la peur qu'elle inspire au grand public pour augmenter sa popularité et souligner la nécessité de ses mesures.

Malgré son programme controversé, Janvier devient le célibataire le plus convoité de l'Occident[7] et attire encore davantage l'attention des médias. Sur la chaîne d'informations en continu Télé Capitale, il est reçu dans Starmania par l'animatrice vedette Cristal. Face à la jeune femme, il se laisse aller à quelques confidences, notamment son désarroi de ne pas avoir pu concrétiser une carrière artistique[3] :

« J'suis pas heureux mais j'en ai l'air
J'ai perdu le sens de l'humour
Depuis qu'j'ai le sens des affaires
J'ai réussi et j'en suis fier
Au fond je n'ai qu'un seul regret
J'fais pas ce que j'aurais voulu faire »

Dans un premier temps, Zéro Janvier semble remporter la course électorale. Mais, alors qu'il est en plein débat avec le Gourou Marabout, la chaîne Télé Capitale est piratée par Cristal[8]. L'ancienne animatrice s'est éprise du chef des Étoiles Noires, Johnny Rockfort, et affiche désormais ouvertement sa prise de position. Cristal devient une icone populaire, accentuant son prestige et celui des Étoiles Noires[9], tout en fragilisant la campagne de Janvier.

Dès lors, Janvier a besoin d'une personnalité forte pour redorer son image. Apprenant que Stella Spotlight abandonne sa carrière d'artiste, il lui fait porter une gerbe d'orchidées accompagnée d'un télégramme où il lui présente ses hommages et lui demande de devenir l'égérie de son parti politique. La domestique de Stella, ulcérée, souligne la folie et l'opportunisme du milliardaire. Mais la comédienne, flattée et voyant là l'opportunité de renouer avec sa gloire d'antan, accepte sa destinée[2]. Zéro et Stella deviennent un couple, à la vie comme à la scène.

Dans un premier temps, ce coup marketing s'avère un succès : Stella s'affiche en tenue de gala aux côtés du politicien et chante le slogan : « Si vous voulez un homme nouveau Zéro, c'est l'homme qu'il vous faut ! »[10].

En coulisses, l'union est moins sereine. En réalité, Stella est psychologiquement détruite et participe aux thérapies orgiaques organisées par le Gourou Marabout[11]. Janvier fait surveiller ses moindres faits et gestes : ayant appris que son égérie fréquente les cercles intimes de son concurrent, il la confronte sur le sujet et la menace de rompre. Mais Stella lui tient tête. Pour l'amadouer, le milliardaire la demande alors en mariage[12]. Après une dispute sur leur ego respectif[13], Janvier et Spotlight, habités par des intérêts communs, se mettent d'accord sur une alliance maritale et carriériste.

Leur union est annoncée sur Télé Capitale. Les noces sont célébrées en petit comité dans la Cathédrale Notre-Dame des Armées. A la suite du mariage, une réception géante est organisée à Naziland, la discothèque située au sommet de la Tour dorée du milliardaire[7].

Janvier finit par remporter les élections mais Stella est épuisée par son existence. Dégoûtée du pouvoir et du star system, elle le quitte[14].

Les Étoiles Noires s'apprêtent à poser une bombe pour anéantir la Tour dorée mais le tout nouveau président est averti par Sadia, son agent double. Ses hommes de mains interviennent alors pour empêcher les terroristes de nuire.

La fin de Zéro Janvier varie selon les versions :

  • Durant les productions antérieures aux années 2000, il est vivant et célèbre sa victoire.
  • En 2000, Cristal est étranglée par Janvier en personne, ce dernier ayant succombé à la folie.
  • Dans la tournée 2022-2024, après la mort de Cristal, Johnny active la bombe, vouant à la mort toutes les personnes présentes à Naziland parmi lesquelles Janvier, Ziggy et Sadia.

Caractère[modifier | modifier le code]

Selon les créateurs de la tournée 2022-2024, Zéro Janvier est « façonné par la soif avide et aveugle du pouvoir [...]. Le businessman le plus riche et le plus connu souhaite façonner un monde à son image en prônant des mesures extrémistes »[15].

Zéro Janvier est l'archétype du dictateur ambitieux, manipulateur et impitoyable. Rusé, il a une connaissance parfaite des médias de masse et sait s'entourer pour réussir. Il est extrêmement soucieux de son image, soigne son apparence dans les moindres détails. Rien n'est laissé au hasard dans sa politique : ni ses idées, ni son image. C'est également un exemple de self-made man accompli et convaincu, qui affirme que « chacun doit forger son destin »[1].

Janvier échoue toutefois dans sa vie intime. Il ne concrétisera jamais sa volonté d'être artiste et échouera dans ses relations sentimentales. Son couple avec Stella se révèle mal assorti et néfaste, exempt d'amour (« On aime que soi-même / Comment veux-tu qu'on s'aime ? »). Leur union n'est pas heureuse, uniquement motivée par les ambitions de chacun[13] :

« Moi j'suis avec toi parce que tu m'fais du bien
Toi tu t'sers de moi pour arriver à tes fins
Faut pas mélanger l'amour et le métier
On fait tout ce qu'on peut pour pouvoir se rendre heureux
Mais on n'est jamais content
Tous les deux en même temps »

Par ailleurs, lors de sa création, le personnage ne devait présenter aucun moment de sincérité ou de mélancolie : sa chanson phare, Le Blues du businessman, avait été écrite par Plamondon comme une manipulation cynique, un morceau satirique. Mais, portée par la musique lyrique de Berger, elle est prise au premier degré et se transforme en véritable confession[16].

Afin de mieux coïncider avec l'image contemporaine des politiciens, le programme de Janvier se fait plus suave, plus policé, au fil des versions : le racisme de son discours est moins explicite, notamment avec la disparition des paroles « la survivance de la race blanche » troquée par « notre survivance » dès 1988[16].

Similitudes entre Zéro Janvier et des figures politiques existantes[modifier | modifier le code]

Le journaliste Yves Bigot note les similitudes entre Janvier et d'autres politiciens : « Si Starmania semblait jusqu'alors n'être qu'une fantasmagorie stylisée sur fond de romance et de violence urbaine, on constate aujourd'hui l'accomplissement de sa prophétie essentielle : un (mauvais) acteur, Ronald Reagan, est devenu l'homme le plus puissant de la planète. Et un chanteur yé-yé raté [...], Bernard Tapie, a donné sa réalité au personnage de l'homme d'affaires charismatique, frappant tous azimuts jusqu'à entrer en politique, cultivant la starmania en reprenant devant les caméras de Champs-Élysées Le Blues du businessman »[17].

A la fin des années 80, Richard Groulx s'inspire d'un politicien français controversé pour incarner Janvier : « dans ma loge, j'avais une photo de Jean-Marie Le Pen : c'était ma façon de rentrer dans le rôle »[16].

Dans une interview accordée à TV Grandes chaînes, France Gall déclare : « Quand le président Sarkozy a épousé Carla Bruni, j'ai tout de suite pensé à l'histoire d'amour entre Zéro Janvier et Stella Spotlight, la sex-symbol »[18].

De nombreux journalistes ont dressé un parallèle entre Zéro Janvier et Donald Trump, ici avec sa femme Melania (2015).

Dès 2016, l'élection de Donald Trump à la tête des États-Unis remet toute la dimension politique de Starmania en lumière. Pour Sud-Ouest, les similitudes sont flagrantes : « Compagnon d'un ex-sex-symbole, il brigue la présidence de l'Occident à coups de discours populistes et démagos. Et il finit par se faire élire. [...] Comment ne pas voir en Donald Trump l'incarnation de Zéro Janvier, quarante ans plus tard ? [...] Plutôt que de trouver les vraies raisons du désenchantement de sa jeunesse, le peuple se cherche un chef à poigne. Depuis sa Trump Tower à lui, Zéro Janvier (interprété par Claude Dubois) apparaît comme l'homme providentiel. [...] Comme Donald Trump avec sa femme Melania, Zéro Janvier sait que les apparences comptent énormément dans une élection »[19].

En 2022, le retour du spectacle amène des réflexions similaires. Les Echos revient sur la trame en ces termes : « l'histoire, un rien alambiquée, réunit un chef de bande, Rockfort, un milliardaire aux ambitions politiques, Trump avant l'heure, du nom de Zéro Janvier, une actrice sur le déclin, Stella Spotlight ou un gourou. Le monde décrit n'est pas si loin de Metropolis, la musique en plus »[20]. De son côté, Télérama affirme que le Janvier campé par David Latulippe évoque « pêle-mêle Donald Trump et Elon Musk »[21].

Interprètes[modifier | modifier le code]

Liste des différents interprètes[modifier | modifier le code]

Zéro Janvier a été interprété par Claude Dubois (1978), Étienne Chicot (1979), Michel McLean (1980-1981), Richard Groulx (1986-1990 ; 1997-1999), Michel Pascal (1989-1990 ; 1993-1997 ; 2000-2001), Erwin Bruhn (1991), Martin Fontaine (1999-2000), Marc Hervieux (2008) et David Latulippe (2022-2024).

Parmi ses doublures notables, on retrouve Norman Groulx (1993-1994) et Bruno Pelletier (1994-1995).

Vision des interprètes et des créateurs sur le rôle[modifier | modifier le code]

Claude Dubois, qui a prêté sa voix à Janvier sur l'album concept, affirme adorer tout particulièrement Le Blues du businessman : « Cette chanson m'a beaucoup plu et j'ai pris énormément de plaisir à l'enregistrer. C'est devenu un classique de la chanson francophone »[16]. Dubois ayant refusé de reprendre son rôle sur scène, Etienne Chicot sera finalement le premier à incarner Janvier.

Dans les années 80, Richard Groulx est choisi pour jouer l'antagoniste. Selon le journaliste culturel François Alquier, Groulx campe « le plus grand Janvier de l'histoire de Starmania »[16]. "Je me détachais facilement de mon personnage. Une fois le maquillage enlevé, j'étais de nouveau Richard. Je ne me sentais plus du tout Zéro Janvier. Pour ne rien vous cacher, dans ma loge, j'avais une photo de Jean-Marie Le Pen: c'était ma façon de rentrer dans le rôle. Vous pensez bien que, lorsque je quittais la scène, je ne souhaitais pas rester une espèce de Le Pen!"[22]

Selon David Latulippe, dernier interprète en date de Janvier, le rôle a nécessité une longue préparation en amont avec son metteur en scène : « Avec Thomas Jolly, [...] nous avons travaillé sur les attitudes, sur les expressions. Nous sommes allés chercher des regards, des angles. Zéro Janvier est quelqu'un de rigide. Il contraste avec les personnages plus extravagants qui gravitent autour de lui. En public, il veut être parfait, à la dernière mode. Il est très stylé. C'est un ancien militaire. Il est strict jusque dans sa coupe de cheveux. C'est un vrai méchant en fait. Mais, ce qui est fun, c'est quand il arrive au Blues du businessman. C'est là seulement qu'il se lâche un peu, que l'armure se fend et qu'il montre ses fêlures »[15].

Chansons dans l'opéra rock[modifier | modifier le code]

Acte I[modifier | modifier le code]

  • Communiqué de l'évangéliste (avec la speakerine, l'évangéliste et Marie-Jeanne)
  • Conférence de presse de Zéro Janvier (avec la troupe)
  • Le Blues du businessman (avec Cristal, Marie-Jeanne et la troupe)
  • Le Meeting de Zéro Janvier

Acte II[modifier | modifier le code]

  • Le Télégramme de Zéro à Stella (avec Stella Spotlight et l'assistante de cette dernière)
  • Jingle de Stella (Si vous voulez un homme nouveau) (avec Stella Spotlight et la troupe)
  • Le Débat télévisé (avec l'évangéliste, le grand gourou, Cristal, Marie-Jeanne, troupe)
  • La Demande de Zéro à Stella (avec Stella Spotlight)
  • Ego Trip (avec Stella Spotlight)
  • Ce soir on danse à Naziland (avec Sadia)
  • Victoire électorale (avec Stella Spotlight)
  • Final (avec la troupe)

Références et notes[modifier | modifier le code]

  1. a et b Chanson de Starmania : Interview de Zéro Janvier.
  2. a et b Chanson de Starmania : Le télégramme de Zéro à Stella.
  3. a et b Chanson de Starmania : Le Blues du businessman.
  4. Chanson de Starmania : Le meeting de Zéro Janvier.
  5. « Là, tout n'est qu'ordre et beauté, / Luxe, calme et volupté. »
  6. Chanson de Starmania : Interview de Zéro Janvier (2).
  7. a et b Chanson de Starmania : Communiqué de l'Evangéliste 6.
  8. Chanson de Starmania : Le débat télévisé.
  9. Chanson de Starmania : Scène 11.
  10. Chanson de Starmania : Jingle de Stella.
  11. Chanson de Starmania : La procession du grand gourou / Paranoïa.
  12. Chanson de Starmania : La demande de Zéro à Stella.
  13. a et b Chanson de Starmania : Ego trip.
  14. Chanson de Starmania : Le rêve de Stella Spotlight.
  15. a et b « Zéro Janvier », sur Starmania (consulté le )
  16. a b c d et e Francois Alquier, L'aventure Starmania, Hors Collection, , 168 p. (ISBN 978-2258142855), p. 22 ; 48 ; 80 ; 90 ; 133
  17. Yves Bigot, Quelque chose en nous de Michel Berger, , 324 p. (ISBN 978-2359490886, lire en ligne)
  18. Marc Uytterhaeghe, « Trente ans de Starmania », sur lavenir.net, (consulté le )
  19. Pierre-Yves Crochet, « Election de Donald Trump : l’opéra rock Starmania avait tout prédit », Sud Ouest,‎ (lire en ligne)
  20. « Starmania, retour vers le futur », sur Les Echos, (consulté le )
  21. « “Starmania”, le retour : un spectacle éblouissant et vénéneux », sur www.telerama.fr, (consulté le )
  22. François Alquier, L'aventure Starmania, Hors collection, (ISBN 978-2-258-14285-5)

Liens externes[modifier | modifier le code]