Tchantchès

Tchantchès
Image illustrative de l’article Tchantchès
Les marionnettistes des principaux théâtres liégeois en 2007 et leur Tchantchès (chaque théâtre ayant son Tchantchès).

Date de création début du XIXe siècle
Période d'utilisation attestée toujours utilisée
Type d'élément marionnette
Type de marionnette à tringle
Matériaux bois de tilleul
Éléments remarquables
du costume
sabots[1], sarrau bleu, foulard rouge et blanc, casquette noire
Caractère têtu, drôle, tièsse di bwès
Type de spectacle Populaire
Lieux d'utilisation Liège (Drapeau de la Belgique Belgique)
Manipulateurs célèbres Conti, Thomas Talbot, Léopold Leloup, Gaston Engels, Joseph Crits, Isi Cavraine, Denis Bischeroux, Les montreurs de la famille Pinets, Henri Libert, Michel Libert, Denis Fauconnier, Raphaël Defays, Georges Vetters, Claude Deletrez, Jacques Ancion, Matthieu de Brogniez, Désiré Balthazar, Joseph Ficarrotta, Anthony Ficarrotta, Arnaud Lion, Jean-Claude Maggi, José Maquet
Théâtres célèbres théâtre Al vîle rouwale dé coq, Théâtre à Denis, Al botroule, Théatre pipo,Li Tèyåte dèl Clignète, Théâtre de marionnettes du Musée de la Vie wallonne, Théâtre Noilnaudra, Théâtre des Paladins, Théâtre de la cave, Tchantchès qui rèye, As deus Tchantchès, Théâtre à Matthî, Théâtre Royal ancien impérial, Théâtre des marionnettes de Mabotte,
Géants Tchantchès et Charlemagne lors des fêtes du en Outremeuse à Liège

Tchantchès, parfois écrit Tchantchèt, est un personnage issu du folklore liégeois représenté par une marionnette.

Origine folklorique de la marionnette liégeoise[modifier | modifier le code]

Au début du XIXe siècle, on attribua souvent de manière erronée l'origine de la marionnette liégeoise à un Sicilien (en réalité Toscan) nommé Conti qui établit en Outremeuse un théâtre de marionnettes de type sicilien[2] ou marionnettes à tringle unique en 1854. Cette fausse paternité vit le jour après la guerre 40 donnant vérité à un roman de Dieudonné Salme (wa) : « Li Houlot » car nul ne sait réellement d'où proviennent ces marionnettes. Ce qui est certain c'est que d'après d'autres écrits on retrouve des traces des marionnettes liégeoises avant l'arrivée de ce fameux Conti. Certains journalistes, ayant enquêté sur le sujet tels qu'Alexis Deitz ou Auguste Hock, parlent d'un premier théâtre sédentaire avec ce type de marionnettes en 1826 dans le quartier d'Outremeuse.

Dans ces théâtres, on jouait tous les écrits populaires du XIXe siècle. En particulier les romans de chevalerie de la « collection Bleue » des éditions Larousse, mettant le plus souvent en prose, les chansons de geste du Moyen Âge liées au preu Charlemagne. Dans les entre-scènes intervenait un personnage que l’on avait nommé Tchantchès. Le public liégeois, surtout dans les milieux ouvriers, réclama à cor et à cri tant et si bien que de l’entre-scène il entra dans les scènes et devint contemporain de Charlemagne. Et comme à l’époque certains romantiques voulaient absolument faire naître Charlemagne en région liégeoise, Tchantchès n’eut vraiment pas à se déplacer beaucoup pour rencontrer le grand personnage.

Origine du nom[modifier | modifier le code]

D'après Maurice Piron, "Tchantchès est une altération du prénom dialectal liégeois Francwès, François"[3]. D'autres opinions, sans aucune source sérieuse, feraient venir, linguistiquement, Tchantchès de « petit Jean » en flamand (Jantches) prononcé à la wallonne (D'jan tchès).

De nombreuses orthographes de son nom (Chanchet, Tchantchet, Jantches, Jeanches…) se retrouvent, notamment dans des registres de mines ou dans des journaux populaires d'époque ; et pour cause, le wallon s'écrivait comme il se prononçait, sans aucune orthographe, jusque dans les années 1950.

Ce n'est qu'avec Jean Haust qui fixe l'orthographe wallonne que Tchantchès s'écrira avec « ès » final, orthographe apposée sur le monument de Joseph Zommers érigé en 1937 en Outremeuse, au détriment du « èt » plus populaire.

C'est à cette même époque que les politiciens liégeois s'occupant de la culture dans la fin des années 1950 décideront très officiellement que la signification de Tchantchès viendrait d'une altération enfantine de « François » en bon wallon, bien que dans la littérature liégeoise François se traduise par Françwès. [réf. souhaitée]

Le personnage[modifier | modifier le code]

Le personnage ainsi appelé est une figure folklorique et emblématique de Liège ; en particulier du quartier d'Outremeuse[4]. C'est à l’origine une marionnette à tringle représentant le public venant au théâtre de marionnette. Dans les années 1920, à la suite de la disparition des théâtres « bourgeois » (destinés aux classes sociales les plus riches qui ferment leurs portes, car leurs clients ont de nouvelles activités), il ne reste plus que les théâtres ouvriers. Le costume de Tchantchès se fixe : le pantalon à carreau noir et blanc, le sarrau bleu, le foulard rouge à pois blancs, la casquette noire. C'est le costume typique des ouvriers de la fin du XIXe début XXe siècle dans le nord de l’Europe.

Anciens Tchantchès avant 1900 conservés au musée de la vie Wallonne. On peut voir que son costume n'était pas encore celui que l'on connait actuellement et qu'il s'habillait selon le public présent dans son théâtre.

Tchantchès arbore également le nez rouge d’amateur de peket, le genièvre.

Réellement les premières traces de l'apparition de ce personnage remontent vers 1860 dans le théâtre de Léopold Leloup dans la rue Roture. Dans ce théâtre venaient de nombreux étudiants en médecine… C'est afin de les contenter que ce petit personnage intermède de second rang occupera finalement le devant de la scène.

Léopold Leloup dans son théâtre de marionnette vers 1880.

Question caractère, il incarne l’esprit frondeur des Liégeois qui, à l’époque de sa création (milieu du XIXe siècle), venaient de bouter les Hollandais dehors peu après qu’ils eurent fait de même avec les princes-évêques : il n’est pas impressionné par les titres et les couronnes, il est courageux et déterminé, assoiffé de liberté mais aussi sensible à la gloriole. À cet archétype du bonhomme liégeois il fallait associer une bonne femme liégeoise, ce fut fait avec Nanesse, la femme de Tchantchès. À la maison c’est elle qui porte la culotte, son révolutionnaire de mari n’a qu’à bien se tenir car sa poêle à frire ne sert pas qu’à faire des bouquettes. Ne serait-ce pas une manière de souligner avec ironie le décret d’Albert de Cuyck qui marquerait le début des libertés individuelles à Liège : « bonhomme en sa maison est le roi ».

Tchantchès en bande dessinée[modifier | modifier le code]

Le personnage de Tchantchès a fait l'objet de deux adaptations en bande dessinée.

La première fois en juillet 1940 par Al Peclers, sous la forme d'un strip quotidien dans les pages du journal La légia. Tchantchès y vivra 3 histoires (Les aventures de Tchantchès, Tchantchès au Far-West et Tchantchès et les conspirateurs) qui seront peu après éditées en album, par les éditions Gordinne.

Pour la seconde adaptation datant de 1988, les éditions Khani ont publié un premier album Tchantchès, contenant plusieurs courtes histoires, dessinées par François Walthéry. Un second album : Tchantchès gamin des rues, a été publié en 1995 par les éditions Noir Dessin Production.

Albums[modifier | modifier le code]

Représentations[modifier | modifier le code]

Autocollant antifasciste utilisant l'image de Tchantchès et Nanesse, photographié à Liège, en juin 2023.

Honneurs[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Le sabot est sculpté dans le tilleul et ensuite peint. Il forme un tout avec la jambe
  2. (en) Virginia Tassinari, Francesca Piredda et Elisa Bertolotti, « Storytelling in design for social innovation and politics: a reading through the lenses of Hannah Arendt », The Design Journal, vol. 20, no sup1,‎ , S3486–S3495 (ISSN 1460-6925 et 1756-3062, DOI 10.1080/14606925.2017.1352852, lire en ligne, consulté le )
  3. Maurice PIRON, Histoire d'un type populaire, Tchantchès et son évolution dans la marionnette liégeoise., Bruxelles, Editions Libro-Sciences, , 117 p. (ISBN D/1988/1070/272[à vérifier : ISBN invalide]), p. 13-18
  4. « Tchantchès, personnage populaire liégeois », sur sonuma.be, (consulté le )
  5. Inauguré le , devant son concepteur François-Xavier Nève, son dessinateur François Walthéry, son maquettiste Claude Talmasse, sa sculptrice Jacqueline Hanauer (qui a réalisé en relief les Tchantchès et Nanesse de François Walthéry) et son fondeur José Lhoest (qui a forgé et coulé l'ensemble dans l'acier, le laiton et le bronze).
  6. (en) « (4440) Tchantchès », dans Dictionary of Minor Planet Names, Springer, (ISBN 978-3-540-29925-7, DOI 10.1007/978-3-540-29925-7_4388, lire en ligne), p. 382–382

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Maurice Piron, Histoire d'un type populaire. Tchantchès et son évolution dans la tradition liégeoise, Bruxelles, Palais des académies 1950
  • Rodolphe de Warsage et Jean Bosly, La légende de Tchantchès et la véritable histoire des marionnettes liégeoises, Liège, Noir Dessin Production, , 160 p. (ISBN 2873512059)
  • Claude Neven, La marionnette liégeoise, édition du CEFAL
  • José Maquet, La fabrication de la marionnette traditionnelle liégeoise, édité par L'ASBL des p'tits bonshommes
  • Maurice Piron, Tchantchès et son évolution dans la tradition liégeoise : histoire d'un type populaire, libro-science, 1988
  • Collectif d'auteurs, Contes et Légendes de Belgique, Éditions Jourdan, 2010 (ISBN 2-930359-08-0)
  • François Pinet, Les 100 ans de marionnettistes de la famille Pinet, Liège, Broché, 1969

Annexes[modifier | modifier le code]

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Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]