Shunt porto-systémique congénital

Les shunts porto-systémiques congénitaux (SPSC) sont des malformations vasculaires rares qui se forment entre la veine porte ou un de ses vaisseaux afférents et la veine cave. Cette malformation est un conduit anormal qui dérive une partie du sang provenant des intestins directement vers le cœur. Le sang intestinal - riche en nutriments et en toxines - ne passe pas par le foie et n'est donc plus filtré intégralement. Les toxines et les nutriments vont, en s'accumulant, engendrer des complications multiples et parfois sévères qui peuvent toucher le système cardiovasculaire, neurophysiologique, gastro-intestinal, urinaire et endocrinien[1].

Contrairement aux shunts porto-systémiques acquis, qui se développent secondairement à une hypertension portale, les SPSC sont le résultat d'une malformation vasculaire qui survient lors du développement embryonnaire. Leur prévalence est de l'ordre de 1:30 000 naissances.

Physiopathologie[modifier | modifier le code]

L'anatomie normale du corps humain ne dispense pas de passage direct entre le système de la veine portes (dit réseau splanchnique) et le système veineux cave (dit réseau systémique) [2]. Le sang arrive au foie de l'artère hépatique (provenant du l’aorte apportant au foie du sang riche en oxygène) et de la veine porte (qui amène au foie du sang riche en nutriments mais pauvre en oxygène) et passe par un réseau des capillaires avant d'être évacué par les veines sus-hépatiques, qui se jettent dans la veine cave inférieure, qui elle-même, retourne le sang au cœur[3]. Ce circuit sanguin permet au foie de s'assurer ses divers rôles physiologiques.

La survenue d'un SPSC, qui contourne ce circuit sanguin, en mettant en œuvre un passage direct entre le réseau splanchnique et les réseaux systémiques, entraîne une diminution, voire une disparition complète dans les cas les plus graves, de la proportion du sang d'origine digestive qui passe par le foie lors du premier passage hépatique[4]. La partie du sang filtré par le foie est donc réduit, moins de sang riche en toxines est filtré, et une accumulation des toxines dans le circuit sanguin systémique (dans l’ordre: cœur droit, vaisseaux pulmonaires, cœur gauche et artères systémiques dont cérébrales) survient.

Manifestation clinique[modifier | modifier le code]

Les conséquences observées peuvent se manifester sur différents systèmes :

  • Au niveau du foie: la cholestase, des tumeurs bénignes et malignes, l'hypertrophie du foie.
  • Au niveau pulmonaire: le syndrome hépatopulmonaire (entrainant des désaturations qui sont moindres en position allongée que debout), ou l'hypertension artérielle pulmonaire pouvant entrainer des syncopes voire des morts subites.
  • Au niveau rénal: des répercussions sur la filtration des reins.
  • Au niveau cardiaque et vasculaire : la cardiomégalie, l'hypertrophie du muscle cardiaque.

Chez l'adulte, la découverte d'un SPSC est souvent fortuite mais peut aussi être détecté en raison d'une ou plusieurs complications importantes[7],[8],[9],[10]telle que l'encéphalopathie hépatique et le syndrome hépatopulmonaire. Ces complications sont généralement causées par une dérivation porto-systémique à long terme et sont plus souvent observées chez les enfants[9].

Classification[modifier | modifier le code]

Le schéma illustre les différents types de shunts les plus fréquents [11].

Il existe deux types de shunts porto-systémiques congénitaux: les shunts extra-hépatiques et les shunts intra-hépatiques. Le shunt extra-hépatique, comme son nom l'indique, se suite à l’extérieur du foie, ce shunt permet une communication anormale entre la veine porte (ou une de ses veines afférentes) et la veine cave, et leur classification est déterminée par la présence ou pas du flux portal vers le foie. Le shunt intra-hépatique se suite à l'intérieur du foie, il constitue une communication d'une branche de la veine porte et la veine sus-hépatique ou la veine cave inférieure ou alors se représente par la persistance du ductus venosus[11]. Chaque type de shunt peut être classé en sous-groupe en fonction de la divers paramètres anatomiques tels que la localisation, la configuration, le nombre et la taille des shunts impliqués[12]. Il se peut aussi que différents types de SPSC se combinent.

Traitement[modifier | modifier le code]

À la suite de la découverte d'un SPSC chez un enfant, il est important de s'assurer que le shunt n'est pas la conséquence d'une hypertension portale, ou d'un hémangiome hépatique, qui nécessiteraient un traitement spécifique et différent d’un SPSC. Une fois que la nature congénitale et isolée du shunt a été établie, la recommandation est généralement la fermeture par radiologie interventionnelle ou chirurgicale[5].

Projets de recherche en cours[modifier | modifier le code]

The International Registry of Porto-Systemic Shunts (IRCPSS) est un registre élaboré par une équipe internationale, constituée de spécialistes des maladies vasculaires du foie[13] et d'experts dans d’autres spécialités dans le but de mieux comprendre les causes sous-jacentes, ainsi que les signes et symptômes des SPSCs et leur traitement. Son siège est à Genève aux Hôpitaux Universitaires de Genève. L'objectif principal de ce registre est de mieux identifier les patients qui risqueraient de développer des complications et de leur offrir une prise en charge médical standardisée et personnalisée.

Références[modifier | modifier le code]

  1. « IRCPSS », sur ircpss.com (consulté le )
  2. (en) Mark D. Stringer, « The clinical anatomy of congenital portosystemic venous shunts », Clinical Anatomy, vol. 21, no 2,‎ , p. 147–157 (ISSN 1098-2353, DOI 10.1002/ca.20574, lire en ligne, consulté le )
  3. « Anatomie du foie - Cancer du foie », sur www.e-cancer.fr (consulté le )
  4. « Interview d’Amaria Remil, Cheffe de projet du Centre de Référence AVB-CG, et du Pr Stéphanie Franchi-Abella, Responsable du secteur de radiologie interventionnelle pédiatrique (Université Paris-Saclay) », sur Filfoie: tout savoir sur les maladies rares du foie, recherche, enseignement, (consulté le )
  5. a et b (en) O. Bernard, S. Franchi-Abella, S. Branchereau et D. Pariente, « Congenital Portosystemic Shunts in Children: Recognition, Evaluation, and Management », Seminars in Liver Disease, vol. 32, no 04,‎ , p. 273–287 (ISSN 0272-8087 et 1098-8971, DOI 10.1055/s-0032-1329896, lire en ligne, consulté le )
  6. (en) Mark D. Stringer, « The clinical anatomy of congenital portosystemic venous shunts », Clinical Anatomy, vol. 21, no 2,‎ , p. 147–157 (ISSN 1098-2353, DOI 10.1002/ca.20574, lire en ligne, consulté le )
  7. a et b Atessa Bahadori, Beatrice Kuhlmann, Dominique Debray et Stephanie Franchi-Abella, « Presentation of Congenital Portosystemic Shunts in Children », Children (Basel, Switzerland), vol. 9, no 2,‎ , p. 243 (ISSN 2227-9067, PMID 35204963, PMCID 8870378, DOI 10.3390/children9020243, lire en ligne, consulté le )
  8. Valérie A. McLin, Stephanie Franchi Abella, Dominique Debray et Florent Guérin, « Congenital Portosystemic Shunts: Current Diagnosis and Management », Journal of Pediatric Gastroenterology and Nutrition, vol. 68, no 5,‎ , p. 615–622 (ISSN 1536-4801, PMID 30628988, DOI 10.1097/MPG.0000000000002263, lire en ligne, consulté le )
  9. a et b (en) M. Papamichail, M. Pizanias et N. Heaton, « Congenital portosystemic venous shunt », European Journal of Pediatrics, vol. 177, no 3,‎ , p. 285–294 (ISSN 1432-1076, DOI 10.1007/s00431-017-3058-x, lire en ligne, consulté le )
  10. (en) Anna Baiges, Fanny Turon, Macarena Simón‐Talero et Stephanie Tasayco, « Congenital Extrahepatic Portosystemic Shunts (Abernethy Malformation): An International Observational Study », Hepatology, vol. 71, no 2,‎ , p. 658–669 (ISSN 0270-9139 et 1527-3350, DOI 10.1002/hep.30817, lire en ligne, consulté le )
  11. a et b Florent Guérin, Stéphanie Franchi Abella, Valérie McLin et Oanez Ackermann, « Congenital portosystemic shunts: Vascular liver diseases: Position papers from the francophone network for vascular liver diseases, the French Association for the Study of the Liver (AFEF), and ERN-rare liver », Clinics and Research in Hepatology and Gastroenterology, vol. 44, no 4,‎ , p. 452–459 (ISSN 2210-741X, PMID 32279979, DOI 10.1016/j.clinre.2020.03.004, lire en ligne, consulté le )
  12. Aurélie Plessier et Christophe Bureau, « “Vascular liver diseases: Position paper(s) from the francophone network for vascular liver diseases, the French Association for the Study of the Liver (AFEF), and the European Reference Network on Hepatological Diseases (ERN RARE-LIVER)” », Clinics and Research in Hepatology and Gastroenterology, vol. 44, no 4,‎ , p. 407–409 (ISSN 2210-7401, DOI 10.1016/j.clinre.2020.03.009, lire en ligne, consulté le )
  13. (en) Virginie Lambert, Delphine Ladarre, Feriel Fortas et Philippe Durand, « Cardiovascular disorders in patients with congenital portosystemic shunts: 23 years of experience in a tertiary referral centre », Archives of Cardiovascular Diseases, vol. 114, no 3,‎ , p. 221–231 (ISSN 1875-2136, DOI 10.1016/j.acvd.2020.10.003, lire en ligne, consulté le )