Plomb de Chamalières

Plomb de Chamalières
Image illustrative de l’article Plomb de Chamalières
Type Tablette de défixion
Dimensions 4 x 6 cm
Matériau Plomb
Période Ier siècle
Culture
Date de découverte 1971
Lieu de découverte Source des Roches, Chamalières
Conservation Musée Bargoin

Le plomb de Chamalières, ou inscription de Chamalières, est une tablette de plomb de six centimètres sur quatre, découverte en 1971 à Chamalières (Puy-de-Dôme), lors des fouilles de la source des Roches. Le texte est écrit en langue gauloise avec des lettres cursives latines. C'est un des plus longs textes en gaulois, d'une importance capitale pour la compréhension de cette langue. Il s'agit d'un texte de caractère magique, appartenant à la catégorie des tablettes de défixion ; il invoque le dieu celtique Maponos. Il est exposé, avec le matériel de la source des Roches, au sous-sol du musée Bargoin, à Clermont-Ferrand.

La tablette[modifier | modifier le code]

Circonstance de la découverte[modifier | modifier le code]

Entre 1968 et 1971 a lieu la fouille de sauvetage du sanctuaire de la source des Roches à Chamalières dans la banlieue de Clermont-Ferrand. Ce haut lieu religieux de la cité des Arvernes est essentiellement connu pour avoir livré une quantité inégalée d'ex-votos de guérison en bois. La tablette de défixion a été découverte le au milieu d’un amas de ces ex-votos[1].

Resttitution par Robert Marichal

Description de la tablette[modifier | modifier le code]

Datée de la période julio-claudienne par son environnement archéologique, la tablette est un petit rectangle de plomb de 6 cm sur 4, elle est dotée d’une anse en queue d’aronde. Les deux faces sont soigneusement polies bien que le texte n’en occupe qu’une seule. Tout porte à croire que le support a été soigneusement préparé.

Le texte compte douze lignes, écrites en cursive latine. Les lettres sont néanmoins de petite taille, de 1 à 2 millimètres, ce qui permet à ce texte d’être l’un des plus longs que l’on connaisse en langue gauloise, bien que la surface utilisable soit limitée. Ce texte compte en effet 60 mots, écrits à l’aide de 336 caractères. On constate par ailleurs qu’un intervalle plus important sépare les deux premières lignes du reste du corps du texte[2].

Objets similaires[modifier | modifier le code]

Il existe d'autres objets du même ordre qui ont été retrouvés en fouille. Parmi ceux-là, les plus connus sont :

  • La tablette d'Eyguières, écrite en caractères grecs, probablement en raison de sa proximité avec Massilia, mais à la lecture délicate, du fait de l'enchevêtrement des lettres. Elle a été découverte sur le territoire des Salyens ;
  • Les lamelles de plomb d'Amélie-les-Bains, découvertes en 1845 au nombre de 6, et aujourd'hui perdues[3] ;
  • Le plomb de Lezoux, qu'il ne faut pas confondre avec le plat de Lezoux, a été retrouvé, comme le plomb de Chamalières, en territoire arverne. Ce n'est pas une tablette de défixion, il s'apparente davantage à une amulette.

On peut joindre à cette liste d'autres artefacts comme les tablettes de Rom, de Mondragon, des Martres-de-Veyre et de Monastère-sous-Rodez.

Plus récemment, six tablettes de défixion en plomb ont été découvertes lors d'une fouille préventive au Mans. Au moins l'une d'entre elles porte des inscriptions, de lecture difficile.

Le texte[modifier | modifier le code]

Transcription[modifier | modifier le code]

andedIon uediIumi diIiuion risun
artiu mapon arueriIatin
lopites snIeððic sos brixtia anderon
clucionfloronnigrinon adgarionaemilI
on paterin claudIon legitumon caelion
pelign claudío pelign marcion uictorin asiatI
con aððedillI etic secouitoncnaman
toncsiIontío meIon toncsesit bue
tid ollon reguccambion exsops
pissIiumItsoccantI rtssuis onson
bissIet lugedessummiIis luge
dessumíis lugedessumIIs luxe

Lecture de la transcription[modifier | modifier le code]

(Par P.-Y. Lambert)

Andedion uediíumi diíiuion risun.
Artiu mapon(on) aruerriíatin.
Lopites sní eððdic sos brixtía anderon.
C. Lucion Floron Nigrinon, adgarion Æmilíon Paterin, Claudíon Legitumon, Cælion Pelign, Claudío Pelign, Marcion Uictorin Asiatícon Aððedillí,
etic secoui toncnaman.
Toncsiíontío meíon toncsesit buetid ollon reguccambion exsops.
Pissíiumítsoccaantí rissuis onson.
Bissíet luge dessummiíis luge.
Bessumíis luge dessumíís luxe.

Traduction[modifier | modifier le code]

Traduction par P.-Y. Lambert

J'invoque Maponos Arueriiatis
Par la force des dieux d'en-bas
Que tu les ...., et que tu les tortures (toi), par la magie des (dieux) infernaux
(eux c'est-à-dire Caius Lucius Florus Nigrinus, accusateur
Aemilius Paterinus, Claudius Legitumus, Caelius Pelignus, Claudius Pelignus, Marcius Victorinus Asiaticus fils d'Adsedillos et tous ceux qui jureraient ce faux serment.
Quant à celui qui l'a juré, que ce soit pour lui
la totale déformation des os droits.
Aveugle je vois(?). Avec cela, il sera à nous devant vous (??)
Que tu .... à ma droite x3 (??)

Analyse[modifier | modifier le code]

La fin du texte reste mal comprise, et la traduction n'en est pas assurée. Néanmoins, les apports linguistiques fournis par la tablette sont importants. La syntaxe du gaulois est désormais bien mieux connue.

En dehors du débat linguistique, le consensus s'est fait sur le fait que cette défixion a été faite dans un contexte judiciaire, le commanditaire du mauvais sort souhaitant torturer son accusateur et les "témoins de moralité" de celui-ci[4] dans le but évident de remporter le procès dans le cadre duquel ils étaient opposés.

Références[modifier | modifier le code]

  1. Anne-Marie Romeuf, « La découverte de la tablette de plomb inscrite de Chamalières, présentation de la fouille », in Gaulois celtique et continental : études rassemblées par P.-Y. Lambert & G.-J. Pinault, 2007, p. 85.
  2. Michel Lejeune, « Deux inscriptions magiques gauloises : plomb de Chamalières ; plomb du Larzac », Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, vol. 128, no 4, 1984.
  3. Les lamelles de plomb gravées d’Amélie-les-ains-Palalda: un cas d’école pour l’étude des langues rares de l’Antiquité
  4. Pierre-Yves Lambert, "La langue gauloise", édition Errance, 2003

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Michel Lejeune et Robert Marichal, « Textes gaulois et gallo-romains en cursive latine. 2 : Chamalières », Études celtiques, XV-1, 1977, p. 156-168 et pl. XIV (en ligne).
  • Léon Fleuriot, « Le vocabulaire de l'inscription gauloise de Chamalières », Études celtiques, XV-1, 1977, p. 173-190 (en ligne).
  • Pierre-Yves Lambert, « La tablette gauloise de Chamalières », Études celtiques, XVI, 1979, p. 141-169 (en ligne).
  • Léon Fleuriot, « La tablette de Chamalières. Nouveaux commentaires », Études celtiques, XVII, 1980 (en ligne).
  • Pierre-Yves Lambert, Recueil des inscriptions gauloises, vol. II.2 : Textes gallo-latins sur instrumentum, Paris, CNRS Éditions, coll. « Supplément à Gallia » (no XLV), (ISBN 2-271-05844-9), p. 269-280
  • Pierre-Yves Lambert, La langue gauloise, Paris, Errance, 2003.
  • Xavier Delamarre, Dictionnaire de la langue gauloise, Paris, Errance, 2003.
  • Venceslas Kruta, Les Celtes. Histoire et dictionnaire, Paris, Laffont, 2000.

Liens externes[modifier | modifier le code]