Plesiohadros

Plesiohadros djadokhtaensis

Plesiohadros (qui signifie « près des hadrosauridés ») est un genre éteint de dinosaures ornithopodes de la super-famille des Hadrosauroidea ayant vécu en Mongolie durant le Campanien supérieur (Crétacé supérieur), il y a environ 75 millions d’années. Il est connu à partir d'un squelette partiel comprenant le crâne collecté dans la localité d'Alagteeg, de la formation d'Alagteeg (en)[N 1] qui affleure dans le sud de la Mongolie (aïmag d’Ömnögovi). L'espèce type et seule espèce connue, Plesiohadros djadokhtaensis, a été décrite et nommée en 2014 par Khishigjav Tsogtbaatar, David B. Weishampel, David C. Evans, et Mahito Watabe. L’holotype MPC-D100/745 consiste en un crâne presque complet, un os hyoïde droit, l’atlas avec une côte, et une main gauche ayant conservée les doigts II à V. Un second spécimen, MPC-D100/751, est composé des extrémités distales d’un tibia et d’une fibula gauche, l’astragale gauche, 3 métatarses et 3 doigts d’un pied gauche. L’analyse phylogénétique conduite par ses découvreurs a identifiée Plesiohadros comme un hadrosauroïdé basal très proche des hadrosauridés. La taille de son crâne suggère des dimensions comparables à celles d’hadrosauridés typiques, comme Hypacrosaurus et Brachylophosaurus, qui pouvaient dépasser 10 m de longueur pour un poids d’au moins deux tonnes. Plesiohadros est le premier hadrosauroïdé identifié dans le Campanien de Mongolie. Dans cette région, les hadrosauroïdés basaux seront remplacés par des hadrosauridés (tels Saurolophus et Barsboldia) durant le Maastrichtien inférieur[1].

Étymologie[modifier | modifier le code]

Le nom de genre vient du Grec plesios, « près de » ou « proche de », et hadros pour « hadrosauridé », et fait référence à la position systématique de l’animal en tant que taxon frère des Hadrosauridae. L’épithète spécifique djadokhtaensis fait référence à la Formation de Djadokhta à laquelle furent dans un premier temps rattaché les couches géologiques ayant livrées le spécimen[1].

Description[modifier | modifier le code]

Crâne[modifier | modifier le code]

Le crâne de Plesiohadros fut découvert dans un état relativement érodé et fracturé. Il est toutefois presque complet et a conservé les éléments suivants : la partie rostrale du prémaxillaire gauche, la moitié antérieure du maxillaire gauche, le jugal droit presque complet, le quadratojugal droit, le préfrontal droit, les deux frontaux (le droit étant plus complet que le gauche), le postorbitaire droit, le squamosal droit, le carré droit, une partie du ptérygoïde droit, une grande partie de la boîte crânienne (incluant le pariétal), le prédentaire, le dentaire gauche, et le surangulaire droit. Tous ces éléments permettent de reconstituer un crâne mesurant environ 82 cm de long, et, dans sa partie postérieure, 45 cm de hauteur et 18 cm de largeur. Ces dimensions correspondent à un hadrosauroïdé de grande taille mesurant une dizaine de mètres de longueur. Le crâne de Plesiohadros est caractérisé par une autapomorphie : un préfrontal qui s’évase dorsolatéralement pour former un rebord rugueux et éversé en forme d’aile au-dessus de l’orbite. Cette structure soutenait peut être une petite projection kératinisée en forme de corne. Plesiohadros se distingue également par une combinaison unique de caractères : l’ornementation de la surface linguale des dents du dentaire comprend seulement une ou deux crêtes accessoires situées mésialement et distalement par rapport à la carène principale ; un diastème extrêmement long est présent entre la première dent du dentaire et le prédentaire, égal à environ un tiers de la rangée de dents ; la partie postérieure de la batterie dentaire ne s’étend pas au-delà de l’apex du processus coronoïde ; la marge orale du prémaxillaire est réfléchie dorsomédialement, formant un rebord proéminent et une fosse prénasale distincte ; en vue dorsale, le bord antérieur du prémaxillaire est largement arqué, puis se rétrécit fortement derrière la marge orale ; l’échancrure sur le carré où s’articule le quadratojugal est réduite à un léger renfoncement ; et un angle aigu est présent entre la barre postorbitaire et la barre jugale sur la fenêtre infratemporale[1].

Denture[modifier | modifier le code]

Les dents de Plesiohadros sont généralement mal conservées. Le nombre exact de files dentaires est incertain mais il semble y en avoir plus de 32 sur la mâchoire inférieure. Les dents du maxillaire sont droite et symétrique et possèdent une carène principale bien développée sur la surface linguale. De très légères carènes secondaires sont présentes mésialement et distalement par rapport à la carène principale sur certaines dents, mais pas sur toutes. Les dents du dentaire sont relativement larges et légèrement asymétriques en vue linguale. Les dents de la partie médiane du dentaire sont environ deux fois plus hautes que larges. L’apex de chaque dent est légèrement décalé mésialement. L’ornementation sur la surface de l’émail de la couronne se compose d’une carène principale et d’une ou deux carènes accessoires mésiales et distales par rapport à la carène principale. La carène secondaire mésiale apparaît sur la plupart des couronnes et est plus proéminente que la carène secondaire distale lorsqu’elle cette dernière est présente. De petits denticules sont présents le long des marges mésiales et distales légèrement surélevées de la couronne dentaire[1].

Squelette postcrânien[modifier | modifier le code]

L’os hyoïde droit, l’atlas avec une de ses côtes, ainsi qu’une main gauche, ont été trouvés en association directe avec le crâne et sont interprétés comme faisant partie du même individu. Le doigt I, y compris son métacarpien, n’est pas connu. Les métacarpiens II-V sont minces et longs. Les métacarpiens II, III et IV s’alignent proximalement, une particularité faisant partie de la combinaison unique de caractères de Plesiohadros. Le métacarpien V est conique et semble porter deux phalanges. L’avant-dernière phalange du doigt III est cunéiforme, et le doigt IV se termine par un unguéal en forme de sabot. La cheville et le pied articulés ont été trouvés dans un autre affleurement de la même localité que l’holotype. Ils appartiennent à un hadrosauroidé de grande taille et sont attribués à Plesiohadros sur la base de la proximité stratigraphique et géographique avec l’holotype. Le pied est tridactyle comme chez les autres Hadrosauroidea. Le métatarsien II est le métatarsien le plus gracile. Son extrémité proximale s’enroule autour de celle du métatarsien III. Cette extrémité distale du métatarsien II est légèrement tordue latéralement et porte une facette pour s’articuler avec la première phalange du doigt I. Le métatarsien III est le plus long, sa plus grande largeur se situe à ses deux extrémités. L’extrémité distale de ce dernier forme presque un double condyle pour l’articulation avec la première phalange du doigt III. Le métatarsien IV est mince, avec un long contact axial avec le métatarsien III, et forme un contact unicondylien avec la première phalange du doigt IV. Comme dans le métatarsien II, le grand axe du métatarsien IV est légèrement divergent distalement de celui du doigt III. La formule phalangienne du pied de Plesiohadros est 0-3-4-4-0. La première phalange de chaque doigt est la plus grande, suivie de phalanges cunéiformes relativement minces qui se terminent par un ungual en forme de sabot[1].

Classification[modifier | modifier le code]

L’analyse phylogénétique réalisée par Tsogtbaatar et des collègues indique que Plesiohadros est un représentant dérivé des hadrosauroidés basaux. Il est récupéré comme le taxon frère d’un clade qui comprend Lophorhothon et Hadrosauridae, et est plus étroitement lié aux Hadrosauridae qu’à Bactrosaurus, Telmatosaurus ou Tethyshadros[1].

Le cladogramme suivant montre la position de Plesiohadros selon l'analyse de 2014[1].

Hadrosauroidea 

 Iguanodon





 Altirhinus



 Jinzhousaurus






 Fukuisaurus



 Eolambia





 Equijubus




 Probactrosaurus




 Protohadros





 Telmatosaurus




 Bactrosaurus



 Levnesovia



 Tanius






 Tethyshadros




 Plesiohadros




 Lophorhothon



 Hadrosauridae













Une autre analyse proposée en 2021 par Albert Prieto-Márquez (d) et son équipe identifie également Plesiohadros comme l’un des hadrosauroïdés non hadrosauridés les plus dérivés. Dans cette analyse, Plesiohadros est le taxon frère d’un clade comprenant Eotrachodon et Hadrosauridae. Lophorhothon occupe ici une position plus basale et n’est pas particulièrement proche de Plesiohadros[2].

Ci-dessous le cladogramme proposé par Prieto-Márquez et al.

Hadrosauromorpha


Jeyawati




Eolambia



Protohadros






Tanius




Bactrosaurus




Gilmoreosaurus





Lophorhothon




Penelopognathus



Telmatosaurus






Claosaurus





Fylax



Tethyshadros





Plesiohadros




Eotrachodon



Hadrosauridae











Paléoécologie[modifier | modifier le code]

La Formation d’Alagteeg est caractérisée par des lits alternés de grès et de mudstone à lits horizontaux, indiquant des environnements de rivières sablonneuses, de plaines inondables et de lacs éphémères sous un climat subhumide[3]. Les os crâniens et post-crâniens de Plesiohadros ont été découverts dans des lits de mudstone. Le pied du spécimen référé était préservé en position verticale, perpendiculaire au plan de stratification, ce qui suggère que l’animal s’est probablement enlisé dans un piège boueux[1]. Cette formation a également livrée des restes abondants de l’ankylosaure Pinacosaurus (d’abord attribué à l’espèce P. grangeri[4], il pourrait s’agir d’une espèce distincte[5]), quelques vertèbres du sauropode Abdarainurus[5], de rares fossiles de Protoceratopsidae[6], et des restes de tortues Trionychidae[5].

Paléobiogéographie[modifier | modifier le code]

L'âge Campanien supérieur de Plesiohadros fait de lui le plus jeune hadrosauroïdé non hadrosauridé de Mongolie. Dans cette région du monde, il semble que les hadrosauroïdés basaux aient été remplacés par de vrais hadrosauridés (Saurolophus et Barsboldia) durant le Maastrichtien inférieur à la suite d’un événement de dispersion depuis l’ouest de l’Amérique du Nord vers l’Asie via la Béringie. À l’heure actuelle, il n’y a pas de sites à dinosaures en Chine ou en Mongolie où coexistent des hadrosauridés et des hadrosauroïdés non hadrosauridés. De même, dans le Maastrichtien d’Amérique du nord on ne connaît pas d’hadrosauroïdés basaux dans les assemblages dominés par les hadrosauridés, ce qui suggère que les premiers ont été complètement remplacés par les seconds en Laurasie au cours du Maastrichtien, sauf là où ils ont persisté en tant que reliques insulaires dans l’archipel Européen, par exemple Telmatosaurus sur l’île d’Hateg, Tethyshadros sur l’île Adriatique, et Fylax sur l’île Ibéro-Armoricaine[1]. Fylax cohabitait avec des hadrosauridés lambéosaurinés ce qui fait de l’île Ibéro-Armoricaine la seule région du monde où est documentée la coexistence des hadrosauroïdés basaux avec des hadrosauridés durant le Maastrichtien. En Mongolie, la disparition des hadrosauroïdés non hadrosauridés coïncide avec un changement du climat et du milieu, lesquels passe d’un environnement fluvial sous un climat subhumide durant la Formation d’Alagteeg (d’où provient Plesiohadros) à des environnements désertiques puis steppiques sous un climat semi aride durant la Formation de Djadokhta (où les hadrosauroïdés sont absents)[3]. Par la suite, les hadrosauridés arrivent en Mongolie durant le dépôt de la Formation de Nemegt, laquelle représente une époque où des climats relativement plus humides prévalaient dans l’actuel désert de Gobi[3],[1].

Bien que très proche phylogénétiquement des Hadrosauridae, Plesiohadros n’est toutefois pas leur ancêtre direct étant donné que plusieurs hadrosauridés d’Amérique du Nord (par exemple Gryposaurus latidens, Acristavus et Ornatops) et d’Asie (par exemple, Aralosaurus et Jaxartosaurus) sont plus anciens que l’âge Campanien supérieur de Plesiohadros. Cependant, l’occurrence et la position phylogénétique de Plesiohadros et d’autres hadrosauroïdés basaux soutiennent l’hypothèse que l’Eurasie a joué un rôle clé dans les origines des hadrosauridés[1].

Liens externes[modifier | modifier le code]

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Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Dans leur description datant de 2014, Tsogtbaatar et des collègues attribuent le gisement d’Alag Teeg à la Formation de Djadokhta. Cependant, Hasegawa et des collègues avaient, dès 2009, séparés les strates inférieures d’Alag Teeg (qui ont livré Plesiohadros), caractérisées par des dépôts alluviaux déposés sous un climat subhumide, des strates supérieures où domine les sédiments éoliens déposés sous un climat semi-aride (qui sont typiques de la Formation de Djadokhta connus dans d’autres sites). Hasegawa et al. ont créé pour ces strates inférieures une unité géologique distincte, la Formation d’Alagteeg. L’article décrivant Plesiohadros ne fait aucune référence aux travaux d’Hasegawa et al. publiés cinq ans auparavant. La Formation d’Alagteeg est toutefois reconnue dans des travaux ultérieurs sur les dinosaures de cette formation (cf. références : Burns et al. 2015, Averianov & Lopatin, 2020, Czepiński, 2020).

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f g h i j et k (en) Khishigjav Tsogtbaatar, Dave Weishampel et Mahito Watabe, « (PDF) A new Hadrosauroid (plesiohadros djadokhtaensis) from the late cretaceous djadokhtan fauna of southern Mongolia », sur ResearchGate (consulté le )
  2. (en) A. Prieto-Márquez et M.Á. Carrera Farias, « A new late-surviving early diverging Ibero-Armorican duck-billed dinosaur and the role of the Late Cretaceous European Archipelago in hadrosauroid biogeography », Acta Paleontologica Polonica, vol. 66(2),‎ , p. 425-435 (DOI 10.4202/app.00821.2020)
  3. a b et c (en) H. Hasegawa, R. Tada, N. Ichinnorov et C. Minjin, « Lihostratigraphy and depositional environments of the Upper Cretaceous Djadokhta Formation, Ulan Nuur basin, southern Mongolia, and its paleoclimatic implication », Journal of Asian Earth Sciences, vol. 35(1),‎ , p. 13-26 (DOI 10.1016/j.jseaes.2008.11.010)
  4. (en) M.E. Burns, T.A. Tumanova et P.J. Currie, « Postcrania of juvenile Pinacosaurus grangeri (Ornithischia: Ankylosauria) from the Upper Cretaceous Alagteeg Formation, Alag Teeg, Mongolia: implications for ontogenetic allometry in ankylosaurs », Journal of Paleontology, vol. 89(1),‎ , p. 168-182 (DOI 10.1017/jpa.2014.14)
  5. a b et c (en) A.O. Averianov et A.V. Lopatin, « An unusual new sauropod dinosaur from the Late Cretaceous of Mongolia », Journal of Systematic Palaeontology,‎ (DOI 10.1080/14772019.2020.1716402)
  6. (en) Ł. Czepiński, « New protoceratopsid specimens improve the age correlation of the Upper Cretaceous Gobi Desert », Acta Palaeontologica Polonica, vol. 65(3),‎ , p. 481-497 (DOI 10.4202/app.00701.2019)