Pierre-Paul Royer-Collard

Pierre-Paul Royer-Collard
Illustration.
Portrait par Louis-Léopold Boilly, 1819
Fonctions
Président de la Chambre des députés des départements

(2 ans, 2 mois et 21 jours)
Prédécesseur Auguste Ravez
Successeur Casimir Perier (président de la Chambre des députés)
Doyen de la Faculté des lettres de Paris

(4 ans)
Successeur Jean-Denis Barbié du Bocage
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance Sompuis (Champagne)
Date de décès (à 82 ans)
Lieu de décès Châteauvieux (Loir-et-Cher)
Nationalité Drapeau de la France Française
Parti politique Girondins (1791–1793)
Club de Clichy (1794–1797)
Légitimiste (1797–1815)
Doctrinaires (1815–1831)
Parti de la Résistance
Conjoint Augustine de Forges de Chateaubrun
Profession Professeur de philosophie
Religion catholicisme

Pierre-Paul Royer, dit Royer-Collard, né à Sompuis dans la Marne le , mort à Châteauvieux le , est un homme politique, académicien et philosophe français. Royaliste et libéral, il a été le chef des doctrinaires sous la Restauration.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse[modifier | modifier le code]

Acte de baptême de Pierre-Paul Royer (22 juin 1763).

Il est le fils d'Antoine Royer et d'Angélique-Perpétue Collard, un couple de laboureurs médiocrement aisés. Il a un jeune frère, Antoine-Athanase Royer-Collard, savant aliéniste, qui deviendra professeur de médecine à la Faculté de Paris et aura, entre autres patients, Eugène Hugo, frère de Victor Hugo. Il est élevé par sa mère qui vient du Meix-Tiercelin, issue d'une famille proche du jansénisme. À l'âge de douze ans, il rejoint son oncle Paul Collard, directeur du collège de Chaumont, qu'il suivra quand ce dernier deviendra supérieur du collège de Saint-Omer. Il fait de brillantes études de droit et les poursuit à Paris où, parrainé par Royer de Vaugency, il devient avocat au Parlement de Paris en 1787 sous le nom de Royer de Sompuis.

La Révolution[modifier | modifier le code]

Il participe avec enthousiasme aux événements révolutionnaires dès le début de l'été 1789 : « Vous n’avez pas vu ce que j’ai vu, dira-t-il à Rémusat ; on ne reverra pas ce que j’ai vu : le  ! c’est-à-dire un peuple unanime. Unanime, entendez-vous bien ? unanime ! »[1]. Le , il est élu Représentant de la Commune par le district de Saint-Louis-en-l'Île[2], où il jouissait déjà de la considération des habitants, ses voisins, « par la pratique libérale de ses devoirs professionnels et le concours gratuit qu’il prêtait à tous les malheureux »[3], en tant qu'avocat. Ils lui resteront fidèles à chaque élection municipale, jusqu'au 10 août 1792, où la Commune insurrectionnelle prendra le pouvoir. Jusque-là, il se montrera très actif au sein de la municipalité. En effet, après l'élection de la deuxième Assemblée des Représentants de la Commune, en , il intègre le Conseil de Ville le [4], et devient Administrateur du Département des impositions le lendemain[5]. Le , il est adjoint au Département du domaine, pour la création et l'organisation de l'administration des biens nationaux ecclésiastiques du district de Paris. Un Comité d'administration est formé, et Royer-Collard est désigné pour diriger le bureau de féodalité[6]. Enfin, il sera élu secrétaire-greffier adjoint, puis secrétaire de la Commune, et c'est en occupant cette dernière fonction qu'il est évacué de la Commune légale, le matin du . Il soutiendra les girondins, mais après le 12 prairial (), il est contraint de fuir le Paris de la Terreur et retourne à Sompuis.

À l'occasion des élections législatives du printemps de 1797, sous le Directoire, il est élu député de la Marne et devient membre du Conseil des Cinq-Cents. Cependant, après le coup d'État du 18 fructidor an V () il est exclu de l'assemblée. Étant dès lors convaincu que seule une monarchie constitutionnelle serait une solution, il entre au conseil secret du comte de Provence, futur Louis XVIII[7].

Sous l'Empire[modifier | modifier le code]

Après le coup d'État du 18 Brumaire () par Napoléon, le régime ayant gagné en stabilité, l'espoir d'un retour à la royauté disparaît progressivement et Royer-Collard quitte le conseil secret, en 1804. Louis de Fontanes lui permet de devenir professeur d’histoire de la philosophie moderne à la Sorbonne. Il est nommé le et dispense un enseignement de 1811 à [8]. Durant cette période, il participe à pas moins de vingt-deux soutenances de thèses de doctorat ès lettres, en qualité de membre du jury[9]. Il introduit la philosophie écossaise en France, en enseignant la pensée de Thomas Reid. Cet enseignement eut une influence très grande sur la philosophie française de la première moitié du XIXe siècle, puisqu’il inspira en particulier un philosophe comme Victor Cousin[10].

La Restauration[modifier | modifier le code]

En 1815, Royer-Collard prend la direction de la Commission d'Instruction publique. En 1816, il obtient l'instruction communale gratuite. Dès qu'il acquiert la certitude que la restauration est durable, dès la fin de 1816, ses discours lui donnent une autorité telle qu'il devient le leader des modérés et des doctrinaires, qui veulent une monarchie constitutionnelle, contrairement aux ultras qui réclament un retour à l'Ancien Régime. À la suite du changement de gouvernement, après l'assassinat du duc de Berry, en 1820, qui voit le remplacement d'Élie Decazes au pouvoir par un gouvernement ultra, les libéraux perdent l'occasion de maintenir une monarchie libérale. En 1820, il est exclu du Conseil d'État. C'est l'année où le peintre Théodore Géricault fait son portrait, conservé aujourd'hui au Château de Versailles[11].

En 1822, il prend position contre la nouvelle loi sur la presse. En 1827, à l'apogée de sa gloire, il est élu à l'Académie française par sept collèges électoraux aux élections législatives : il reste fidèle au département de la Marne, son département d'origine, grâce auquel il acquit sa première députation trente ans plus tôt. Après la formation du gouvernement « réparateur » Martignac, en 1828, à la suite des dernières élections, il est nommé président de la Chambre des députés le . À ce titre, c'est lui qui, le , présente l'adresse des 221 à Charles X, prélude à la Révolution de . Sous Louis-Philippe, s'il siège encore à l'Assemblée nationale, il ne prononce plus que de rares discours et s'éloigne de la vie politique. En effet, la chambre des pairs n'étant plus héréditaire, et le roi n'ayant d'autre légitimité que populaire, il juge la démocratisation trop rapide et dangereuse. Malgré sa retraite, il exerça une grande influence, non seulement sur François Guizot, mais aussi sur Mathieu Molé.

Statue de Royer-Collard devant la collégiale Notre-Dame de Vitry-le-François.

Il assiste aux réunions de l'Académie française consacrées au dictionnaire pour son édition de 1835. Il est question du verbe baser, dans son sens figuré, en concurrence avec fonder. Ennemi de l'entrée du verbe baser, dans son acception figurée, on lui doit la réplique fameuse par laquelle il menace de quitter la Coupole : « S'il entre, je sors »[12].

Fin de vie[modifier | modifier le code]

Royer-Collard passe les dernières années de sa vie à fréquenter assidûment ses amis et voisins l'ancien ministre des relations extérieures de Napoléon Talleyrand et la duchesse de Dino, Dorothée de Courlande.

Il est inhumé à Châteauvieux.

Royer-Collard et l'Église[modifier | modifier le code]

Catholique pratiquant, Royer-Collard défend les libertés du clergé catholique en France contre l'ultramontanisme, selon une tradition gallicane, les droits du libre examen, fidèle à une éducation marquée par le jansénisme, mais aussi l'autorité de l'État dans le domaine de l'instruction publique: il ne remet pas en cause la conception de l'Université mise en place par Napoléon. Sans que l'on puisse parler, de manière anachronique, d'une défense du principe de la séparation de l'Église et de l'État, Royer-Collard s'élève, dans ses discours, contre les empiètements de l'Église catholique du temps sur les prérogatives des pouvoirs publics, la religion catholique serait-elle officiellement la religion du souverain.

Mariage et descendance[modifier | modifier le code]

Selon le Dictionnaire des sciences philosophiques (1851) : « Royer-Collard a épousé Augustine de Forges de Chateaubrun, issue d'une ancienne famille noble du Berry. Il en a trois filles et un fils. Son fils vit peu de temps. L'aînée de ses filles meurt à trois ans et lui laisse un regret profond, dont il donne des signes toute sa vie. Pour élever ses deux autres filles et suppléer madame Royer-Collard, à qui une trop faible santé ne permet pas d'entreprendre une tâche aussi continue que celle d'une éducation, il fait venir une servante, Marie-Jeanne. Cette fille s'est fortifiée dans la dévotion difficile par la lecture d'ouvrages d'un choix sévère. Elle possède sept ou huit cents volumes de ce genre, qu'elle lit avec attention. Son langage et ses lettres gagnent à cette étude une couleur et une élévation singulière. C'est avec son aide que Royer-Collard s'efforce de donner à ses enfants une âme fortement trempée »[13]. Des deux filles parvenues à l’âge adulte, l’une, née en 1808 et prénommée Angélique Augustine, épousa le médecin Gabriel Andral ; l’autre, Louise-Marie Rosalie, née en 1810, resta célibataire jusqu’à son décès en 1842.

Hommages[modifier | modifier le code]

Caricature par Honoré Daumier

La rue Royer-Collard dans le 5e arrondissement de Paris prend son nom le ainsi que l'impasse Royer-Collard voisine en 1867. Il demeurait au no 16 rue d'Enfer, alors à proximité[14].

Publications[modifier | modifier le code]

  • Cours d'histoire de la philosophie moderne, Paris, impr. de Fain, 1813.
  • Fragments historiques (édités par André Schimberg), Paris, F. Alcan, 1913.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Charles de Rémusat, « De l’esprit de réaction. Royer-Collard et Tocqueville », Revue des Deux Mondes, T. 35,‎ , p. 786. (lire en ligne)
  2. Qui deviendra la section de la Fraternité, à partir du 22 juillet 1790, en application du décret de l'Assemblée Constituante, divisant la municipalité de Paris en 48 sections (cf. Table chronologique des arrêtés des communes ; des arrêtés et décrets de l'Assemblée Nationale de France, Paris, Imprimerie Nationale, 1790, p. 148).
  3. Gustave Mennesson, Eloge de Royer-Collard, Paris, Typographie A. Parent, , p. 7 (lire en ligne)
  4. Sigismond Lacroix, Actes de la Commune de Paris pendant la Révolution, Tome II, Paris, Cerf | Noblet | Quantin, 1894-1955 (lire en ligne), p. 218
  5. Sigismond Lacroix, op. cit., p. 238
  6. Sigismond Lacroix, op. cit., Tome VI (lire en ligne), pp. 608-609
  7. Roger Langeron, Un conseiller secret de Louis XVIII: Royer-Collard, Paris, 1956.
  8. Jean-Pierre Cotten, « La redécouverte de Reid par Royer-Collard », dans Philosophie française et philosophie écossaise, Paris, Vrin, 2007.
  9. https://eslettres.bis-sorbonne.fr/notice/Doctorant/14650, consulté le 8 janvier 2024.
  10. De l’influence de la philosophie écossaise sur la philosophie française, Émile Boutroux.
  11. Portrait par Géricault, Versailles
  12. Site de l'Académie française.
  13. Dictionnaire des sciences philosophiques, t.V, Paris, Hachette, 1851,p. 442.
  14. Félix Lazare, Louis Lazare et Michel Fleury, Dictionnaire administratif et historique des rues et des monuments de Paris, Maisonneuve et Larose, coll. « Mémoires de France », (ISBN 978-2-7068-1098-5).

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]