Mazoyères-chambertin

Côte de Nuits
Désignation(s) Côte de Nuits
Appellation(s) principale(s) mazoyères-chambertin
Type d'appellation(s) AOC
Reconnue depuis 1937
Pays Drapeau de la France France
Région parente vignoble de Bourgogne
Sous-région(s) vignoble de la côte de Nuits
Localisation Côte-d'Or
Climat tempéré océanique à tendance continentale
Ensoleillement
(moyenne annuelle)
1 831 heures par an[1]
Sol calcaire, cailloux et graviers
Superficie plantée 1,72 hectare en 2008[N 1]
Cépages dominants pinot noir N[N 2]
Vins produits 100 % rouges
Production 68 hectolitres, soit 9 044 bouteilles en moyenne[N 3]
Pieds à l'hectare minimum 9 000 pieds à l'hectare[2]
Rendement moyen à l'hectare maximum 37 à 53 hectolitres par hectare[2]

Le mazoyères-chambertin[N 4] est un vin rouge français d'appellation d'origine contrôlée produit sur le climat des Mazoyères à Gevrey-Chambertin, en Côte-d'Or. Il s'agit d'un grand cru de Bourgogne.

Histoire[modifier | modifier le code]

Antiquité[modifier | modifier le code]

L’édit de l'empereur romain Domitien, en 92, interdisait la plantation de nouvelles vignes hors d’Italie ; il fit arracher partiellement les vignes en Bourgogne afin d’éviter la concurrence. Le vignoble résultant suffisait aux besoins locaux[3]. Mais Probus annula cet édit en 280[4]. En 312, un disciple d'Eumène[5] rédigea la première description du vignoble de la Côte d'Or[6].

Moyen Âge[modifier | modifier le code]

Philippe II le Hardi.

Dès le début du VIe siècle, l’implantation du christianisme avait favorisé l’extension de la vigne par la création d’importants domaines rattachés aux abbayes. Ainsi l'abbaye de Cîteaux (créée en 1098) avec des plantations en Côte-d'Or[7]. En l'an 1395, Philippe le Hardi décida d’améliorer la qualité des vins et interdit la culture du gamay au profit du pinot noir sur ses terres[7]. Enfin en 1416, Charles VI fixa par un édit les limites de production du vin de Bourgogne[8]. En 1422, d'après les archives, les vendanges eurent lieu en côte de Nuits au mois d'août[9]. À la mort de Charles le Téméraire, le vignoble de Bourgogne fut rattaché à la France, sous le règne de Louis XI.

Période moderne[modifier | modifier le code]

En 1700, l'intendant Ferrand rédigea un Mémoire pour l'instruction du duc de Bourgogne lui indiquant que dans la généralité de Bourgogne les vins les meilleurs provenaient des « vignobles [qui] approchent de Nuits et de Beaune »[10].

Période contemporaine[modifier | modifier le code]

XIXe siècle[modifier | modifier le code]

Dans les décennies 1830-1840, la pyrale survint et attaqua les feuilles de la vigne. Elle fut suivie d'une maladie cryptogamique, l'oïdium[11]. Le millésime 1865 a donné des vins aux teneurs naturelles en sucres très élevées et des vendanges assez précoces[9]. À la fin de ce siècle arrivèrent deux nouveaux fléaux de la vigne. Le premier fut le mildiou, autre maladie cryptogamique, le second le phylloxéra. Cet insecte térébrant venu d'Amérique mit très fortement à mal le vignoble[11]. Après de longues recherches, on finit par découvrir que seul le greffage permettrait à la vigne de pousser en présence du phylloxéra.

XXe siècle[modifier | modifier le code]

Le mildiou provoqua un désastre considérable en 1910. Henri Gouges avait rejoint au niveau national le combat mené par le sénateur Joseph Capus et le baron Pierre Le Roy de Boiseaumarié qui allait aboutir à la création des appellations d'origine contrôlée. Il devint le bras droit du baron à l'INAO[12]. Ainsi cette AOC fut créée le , en même temps que les huit autres appellations Grand Cru de Gevrey-chambertin.

En vertu d'un accommodement de 1945, la production faite en Mazoyères peut être vendue sous l'appellation charmes-chambertin, les deux climats se confondant partiellement. Certains vignerons mettent « Charmes-Chambertin Les Mazoyères » sur leurs étiquettes. Apparition de l'enjambeur dans les années 1960-70, qui remplace le cheval. Les techniques en viticulture et œnologie ont bien évolué depuis 50 ans (vendange en vert, table de triage, cuve en inox, pressoir électrique puis pneumatique etc.).

XXIe siècle[modifier | modifier le code]

Avec la canicule de 2003, les vendanges débutèrent pour certains domaines cette année-là à la mi-août, soit avec un mois d'avance, des vendanges très précoces qui ne s'étaient pas vues depuis 1422 et 1865 d'après les archives[9].

Étymologie[modifier | modifier le code]

Le terme de « mazoyères » signifie des cabanes ou des maisonnettes.

Situation géographique[modifier | modifier le code]

Les Mazoyères se trouvent à l'extrémité sud de la commune de Gevrey-Chambertin, à la limite avec celle de Morey-Saint-Denis.

C'est un climat en bas de la Côte, entre la D 122 (la route des Grands Crus) et la D 974 (l'ancienne RN 74), tout comme les Charmes, la Griotte et la Chapelle, alors que le haut de la Côte (de l'autre côté de la D 122) est occupé du sud vers le nord par les Latricières, le Chambertin, le Clos de Bèze, les Mazis et les Ruchottes.

Géologie et orographie[modifier | modifier le code]

Cette AOC, exposée au levant, est située à une altitude de 240 à 280 mètres sur un long coteau posé sur de la roche dure, présentant quelques décimètres de terre brune issue de limons et éboulis graveleux près du sommet et de calcaires à teneur argileuse variable sur le versant.

Du point de vue géologique, on trouve le Bathonien près du sommet puis les marnes et le calcaire à entroques du Bajocien sur le versant. De nombreux fossiles marins y affleurent[13].

Climatologie[modifier | modifier le code]

C'est un climat tempéré à légère tendance continentale, avec des hivers froids et des étés chauds.

Pour la ville de Dijon (316 mètres), qui est la station climatique la plus proche, à 20 kilomètres au nord de l'aire d'appellation, les valeurs climatiques jusqu'à 1990 sont :

Relevés Dijon ????-1990
Mois jan. fév. mars avril mai juin jui. août sep. oct. nov. déc. année
Température minimale moyenne (°C) −1 0,1 2,2 5 8,7 12 14,1 13,7 10,9 7,2 2,5 −0,2 6,3
Température moyenne (°C) 1,6 3,6 6,5 9,8 13,7 17,2 19,7 19,1 16,1 11,3 5,6 2,3 10,5
Température maximale moyenne (°C) 4,2 7 10,8 14,7 18,7 22,4 25,3 24,5 21,3 15,5 8,6 4,8 14,8
Précipitations (mm) 49,2 52,5 52,8 52,2 86,3 62,4 51 65,4 66,6 57,6 64,2 62 732,2
Source : Infoclimat : Dijon (????-1990)[1]


Vignoble[modifier | modifier le code]

Présentation[modifier | modifier le code]

Ce grand cru a une aire de 1,72 hectare pour une production d'environ 68 hectolitres[13].

Encépagement[modifier | modifier le code]

Le pinot noir N compose exclusivement les vins rouges de l'AOC. Il est constitué de petites grappes denses, en forme de cône de pin[14] composées de grains ovoïdes, de couleur bleu sombre[14]. C'est un cépage délicat, qui est sensible aux principales maladies et en particulier au mildiou, au rougeot parasitaire, à la pourriture grise (sur grappes et sur feuilles), et au cicadelles[15]. Ce cépage, qui nécessite des ébourgeonnages soignés, a tendance à produire un nombre important de grapillons[15]. Il profite pleinement du cycle végétatif pour mûrir en première époque. Le potentiel d'accumulation des sucres est élevé pour une acidité juste moyenne et parfois insuffisante à maturité. Les vins sont assez puissant, riches, colorés, de garde[16]. Ils sont moyennement tanniques en général.

Méthodes culturales[modifier | modifier le code]

Pied de vigne taillé en Guyot simple

Travail manuel[modifier | modifier le code]

Ce travail commence par la taille, en « guyot simple », avec une baguette de cinq à huit yeux et un courson de un à trois yeux[17]. Le tirage des sarments suit la taille. Les sarments sont enlevés et peuvent être brûlés ou mis au milieu du rang pour être broyés. On passe ensuite aux réparations. Puis vient le pliage des baguettes. Éventuellement, après le pliage des baguettes, une plantation de nouvelles greffes est réalisée. L'ébourgeonnage peut débuter dès que la vigne a commencé à pousser. Cette méthode permet, en partie, de réguler les rendements[17]. Le relevage est pratiqué lorsque la vigne commence à avoir bien poussé. En général, deux à trois relevages sont pratiqués. La vendange en vert est pratiquée de plus en plus dans cette appellation. Cette opération est faite dans le but de réguler les rendements et surtout d'augmenter la qualité des raisins restants[17]. Pour finir avec le travail manuel à la vigne, se réalise l'étape importante des vendanges.

Travail mécanique[modifier | modifier le code]

L'enjambeur est d'une aide précieuse. Les différents travaux se composent du broyage des sarments, réalisé lorsque les sarments sont tirés et mis au milieu du rang. De trou fait à la tarière, là où les pieds de vignes sont manquants, en vue de planter des greffes au printemps. De labourage ou griffage, réalisé dans le but d'aérer les sols et de supprimer des mauvaises herbes. De désherbage fait chimiquement pour tuer les mauvaises herbes. De plusieurs traitements des vignes, réalisés dans le but de les protéger contre certaines maladies cryptogamiques (mildiou, oïdium, pourriture grise, etc.) et certains insectes (eudémis et cochylis)[17]. De plusieurs rognages consistant à reciper ou couper les branches de vignes (rameaux) qui dépassent du système de palissage.

Rendements[modifier | modifier le code]

Les rendements sont de l'ordre de 37 hectolitres par hectare pour le rendement de base à 53 hectolitres par hectare pour le rendement butoir[18].

Vins[modifier | modifier le code]

Titre alcoométrique volumique[modifier | modifier le code]

AOC Rouge Rouge
Titre alcoométrique volumique minimal maximal
Grand cru[18] 11,5 % 14,5 %

Vinification et élevage[modifier | modifier le code]

Voici les méthodes générales de vinification et d'élevage de cette appellation. Il existe cependant des petites différences de méthode entre les différents viticulteurs et négociants.

Vinification en rouge[modifier | modifier le code]

La récolte des raisins se fait à maturité et de façon manuelle. La vendange manuelle est le plus souvent triée, soit à la vigne soit à la cave avec une table de tri, ce qui permet d'enlever les grappes pourries ou insuffisamment mûres[17]. La vendange manuelle est généralement éraflée puis mise en cuve. Une macération pré-fermentaire à froid est quelquefois pratiquée. La fermentation alcoolique peut démarrer, le plus souvent après un levurage. Commence alors le travail d'extraction des polyphénols (tanins, anthocyanes) et autres éléments qualitatifs du raisin (polysaccharides etc.)[17]. L'extraction se faisait par pigeage, opération qui consiste à enfoncer le chapeau de marc dans le jus en fermentation à l'aide d'un outil en bois ou aujourd'hui d'un robot pigeur hydraulique. Plus couramment, l'extraction est conduite par des remontages, opération qui consiste à pomper le jus depuis le bas de la cuve pour arroser le chapeau de marc et ainsi lessiver les composants qualitatifs du raisin. Les températures de fermentation alcoolique peuvent être plus ou moins élevées suivant les pratiques de chaque vinificateur avec une moyenne générale de 28 à 35 degrés au maximum de la fermentation[17]. La chaptalisation est réalisée si le degré naturel est insuffisant : cette pratique est réglementée[17]. À l'issue de la fermentation alcoolique suit l'opération de décuvage qui donne le vin de goutte et le vin de presse. La fermentation malolactique se déroule après mais est dépendante de la température. Le vin est soutiré et mis en fût ou cuve pour son élevage. L'élevage se poursuit pendant plusieurs mois (12 à 24 mois)[17] puis le vin est collé, filtré et mis en bouteilles.

Terroir et vins[modifier | modifier le code]

Cette terre argilo-calcaire avec des limons et éboulis graveleux donnent des vins avec une couleur entre rubis foncé et cerise noire. Arômes de cassis, de groseille, de framboise de réglisse et d'épices. Sont également détectés les arômes de violette, de rose et des notes de sous-bois. En bouche le vin est puissant, opulent, élégant et complexe[19].

Gastronomie, durée de garde et température de service[modifier | modifier le code]

Cette appellation accompagne un gibier grillé ou en sauce au vin, de l'agneau en sauce, du coq au vin, des fromages à croûte lavée... La durée de garde égale et dépasse les 10 ans[19]. La température de service se situe entre 12 et 14 degrés (vin jeune) et 15 à 16 degrés pour un vin plus évolué en âge[19].

Économie[modifier | modifier le code]

Commercialisation[modifier | modifier le code]

Les 9 044 bouteilles en moyenne[13] sont commercialisés en France et à l'exportation : En Allemagne, en Belgique, au Danemark, aux États-Unis, au Japon[20]...

Structure des exploitations[modifier | modifier le code]

Le type d'exploitation est un domaine viticole qui fait leur vignes, vinifie, élève, met en bouteilles et commercialise les vins.

Liste des producteurs[modifier | modifier le code]

  • Domaine Camus père et fils à Gevrey-Chambertin ;
  • Domaine Henri Richard à Gevrey-Chambertin ;

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Un hectare = 10 000 = 24 ouvrées.
  2. Le code international d'écriture des cépages mentionne de signaler la couleur du raisin : B = blanc, N = noir, Rs = rose, G = gris.
  3. Un hectolitre (hl) = 100 litres = 133 bouteilles
  4. Références sur la façon d'orthographier les appellations d'origine.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Archives climatologiques mensuelles - Dijon (????-1990)
  2. a et b Décret no 2009-1175 du 2 octobre 2009 relatif aux appellations d'origine contrôlées corton, corton-charlemagne, charlemagne, côte-de-beaune-villages, chambertin, chambertin-clos-de-bèze, chapelle-chambertin, charmes-chambertin, griotte-chambertin, latricières-chambertin, mazis-chambertin, mazoyères-chambertin, ruchottes-chambertin, romanée-saint-vivant, romanée-conti, la-romanée, la-tâche, richebourg, la-grande-rue, échezeaux, grands-échezeaux, puligny-montrachet, saint-romain, volnay et vosne-romanée, disponible sur le site legifrance.gouv.fr.
  3. Marcel Lachiver, op. cit., p. 37-38.
  4. Henri Cannard : AOC Mercurey, Le vignoble d'hier, p. 27.
  5. Marcel Lachiver, op. cit., p. 39.
  6. Les plaintes des vignerons du Pagus Arebrignus in Docteur Morelot, Statistique de la vigne dans le département de la Côte-d'Or, Dijon-Paris, 1831., consulté le 25 novembre 2008.
  7. a et b Le Figaro et La Revue du vin de France (2008) : Vins de France et du monde (Bourgogne : Chablis), L'histoire, p. 26.
  8. Site du BIVB : Historique, consulté le 24 novembre 2008.
  9. a b et c La Revue du vin de France no 482S : Le Millésime 2003 en Bourgogne, p. 109
  10. Marcel Lachiver, op. cit., p. 370.
  11. a et b Le Figaro et La Revue du vin de France (2008) : Vins de France et du monde (Bourgogne : Côte de Beaune), L'histoire, p. 26.
  12. Constant Bourquin, op. cit., p. 94.
  13. a b et c Site du BIVB, page sur les grands crus de Gevrey-Chambertin, consulté le 1er mars 2011
  14. a et b Christian Pessey, Vins de Bourgogne, La vigne et le vin « Pinot noir », p. 12
  15. a et b Catalogue des variétés et clones de vigne cultivés en France ENTAV, Éditeur
  16. Christian Pessey, Vins de Bourgogne, La vigne et le vin « Pinot noir », p. 13
  17. a b c d e f g h et i Conduite et gestion de l'exploitation agricole, cours de viticulture du lycée viticole de Beaune (1999-2001). Baccalauréat professionnel option viticulture-œnologie.
  18. a et b Site de Légifrance, Décret du 2 octobre 2009 sur l'appellation Mazoyères-chambertin, consulté le 1er mars 2011
  19. a b et c Site de 1000bourgognes, page sur le Mazoyères-chambertin, consulté le 1er mars 2011
  20. Site du BIVB, page sur le domaine Camus père et fils, consulté le 1er mars 2011.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]