Listeria

Listeria est un genre bactérien, qui compte 20 espèces[1],[2],[3], dont Listeria monocytogenes, seule pathogène pour les humains où elle provoque la listériose (l'une des zoonoses les plus graves). Les autres espèces comprennent, entre autres, Listeria innocua, Listeria ivanovii subsp. ivanovii, Listeria ivanovii subsp. londoniensis, Listeria grayi, Listeria seeligeri, Listeria welshimeri, Listeria costaricensis, Listeria goaensis et Listeria thailandensis.

Les Listeria, nommées d'après Joseph Lister, sont des bacilles de petite taille, mobiles à 20 °C (grâce à des flagelles), gram positif. Toutes les espèces sont catalases positives, non sporulées, et anaérobies facultatifs. Ce sont des bactéries ubiquistes qu’on trouve presque partout ; dans le sol, en épiphyte sur les végétaux, l’eau, etc. Très résistantes, elles peuvent survivre aux traitements de nettoyage-désinfection et ainsi persister dans les ateliers de production de l’industrie agroalimentaire.

Pathogénicité[modifier | modifier le code]

  • La seule espèce de Listeria qui soit pathogène pour l’homme est L. monocytogenes, qui cause la listériose. Elle peut traverser la barrière intestinale (démontré en 2001 par une équipe de l’Inserm) et la barrière placentaire, pouvant alors provoquer des infections – éventuellement mortelles – du fœtus, du nouveau-né, ou des accouchements prématurés[4].
  • L. monocytogenes et exceptionnellement L. ivanovii sont pathogènes pour les animaux. Pour L. monocytogenes, on observe un tableau clinique constitué d'encéphalites, d'avortements et de septicémies néonatales. L. ivanovii a été impliquée dans des avortements chez les bovins[5].
  • La Listeria avait été notamment à l'origine d'une série d'intoxications entre et qui avait touché 23 personnes, et aboutissant à 7 décès en France[6].

Listeria et grossesse[modifier | modifier le code]

Une femme enceinte infectée par une Listeria ne ressent généralement qu’une fièvre passagère, mais Listeria monocytogenes peut traverser le placenta pour atteindre le fœtus qui peut en mourir, de même que le bébé juste après l’accouchement. Plus généralement, la bactérie induit des naissances prématurées et des infections chez le bébé.

Certaines précautions sont donc généralement conseillées aux femmes enceintes en matière d’alimentation et d’hygiène. Il est conseillé de bien laver les fruits et légumes et d'éviter les produits laitiers non pasteurisés ainsi que la viande ou le poisson cru.

Usage médical de la bactérie contre le cancer[modifier | modifier le code]

Les Listeria sont des bactéries tumoricides (ou carcinolytiques) comme Clostridium, Salmonella Bifidobacterium, S. Typhimurium et Streptococcus[7]. Elles peuvent tuer directement les cellules tumorales en induisant l'apoptose ou l'autophagie : Clostridium, S. typhimurium et Listeria produisent des exotoxines (comme la phospholipase, l'hémolysine, la lipase) qui endommagent la structure membranaire et les fonctions cellulaires de la tumeur, en induisant l'apoptose ou l'autophagie ce qui programme la mort de la cellule[8].

Les infections à Salmonella, Clostridium et Listeria favorisent l'élimination des tumeurs en augmentant les cytokines et les chimiokines (protéines régulatrices de la signalisation cellulaire) qui régulent les sites infectés à l'aide de granulocytes et de lymphocytes cytotoxiques (GB qui tuent les cellules cancéreuses)[7].

Les cellules myéloïdes suppressives (MDSC) infectées par Listeria se transforment en un phénotype immunostimulant caractérisé par une production accrue d'IL-12, ce qui améliore encore les réponses des cellules CD8+ T et NK.

Listeria inhibe les tumeurs grâce à la production médiée par la NADPH oxydase (nicotinamide adénine dinucléotide phosphate oxydase) de ROS (espèces réactives de l'oxygène) qui est un processus de signalisation cellulaire qui active les cellules T CD8+ (cellules qui détruisent les tissus cancéreux) qui ciblent les tumeurs primaires[9].

Actuellement, il n'existe aucun traitement approuvé avec des bactéries génétiquement modifiées. Cependant, des recherches sont menées sur Listeria et Clostridium en tant que vecteurs pour transporter l'ARNi (qui supprime des gènes) pour le cancer colorectal[10].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Fiche sur Listeria sur le site de l'EFSA
  2. (en) Renato H. Orsi et Martin Wiedmann, « Characteristics and distribution of Listeria spp., including Listeria species newly described since 2009 », Applied Microbiology and Biotechnology, vol. 100, no 12,‎ , p. 5273–5287 (ISSN 0175-7598 et 1432-0614, PMID 27129530, PMCID PMC4875933, DOI 10.1007/s00253-016-7552-2, lire en ligne, consulté le )
  3. Alexandre Leclercq, Alexandra Moura, Guillaume Vales et Nathalie Tessaud-Rita, « Listeria thailandensis sp. nov », International Journal of Systematic and Evolutionary Microbiology,‎ (ISSN 1466-5034, PMID 30457511, DOI 10.1099/ijsem.0.003097, lire en ligne, consulté le )
  4. voir étude Insem (Unité 604).
  5. Robert S. Youngquist et Walter R. Threlfall, Current therapy in large animal theriogenology, Saunders - Elsevier, (ISBN 978-0-7216-9323-1)
  6. Jacqueline Meillon, « Comment on a (presque) vaincu la listériose », Le Parisien,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  7. a et b (en) Mai Thi-Quynh Duong, Yeshan Qin, Sung-Hwan You et Jung-Joon Min, « Bacteria-cancer interactions: bacteria-based cancer therapy », Experimental & Molecular Medicine, vol. 51, no 12,‎ , p. 1–15 (ISSN 2092-6413, PMID 31827064, PMCID 6906302, DOI 10.1038/s12276-019-0297-0, résumé).
  8. (en) Shibin Zhou, Claudia Gravekamp, David Bermudes et Ke Liu, « Tumor-targeting bacteria engineered to fight cancer », Nature Reviews. Cancer, vol. 18, no 12,‎ , p. 727–743 (ISSN 1474-175X, PMID 30405213, PMCID 6902869, DOI 10.1038/s41568-018-0070-z).
  9. (en) Sun Hee Kim, Francisco Castro, Yvonne Paterson et Claudia Gravekamp, « High Efficacy of a Listeria-Based Vaccine against Metastatic Breast Cancer Reveals a Dual Mode of Action », Cancer Research, vol. 69, no 14,‎ , p. 5860–5866 (ISSN 0008-5472, PMID 19584282, PMCID 3127451, DOI 10.1158/0008-5472.CAN-08-4855, résumé).
  10. (en) Tiffany Chien, Anjali Doshi et Tal Danino, « Advances in bacterial cancer therapies using synthetic biology », Current Opinion in Systems Biology, vol. 5,‎ , p. 1–8 (ISSN 2452-3100, PMID 29881788, PMCID 5986102, DOI 10.1016/j.coisb.2017.05.009, résumé).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]