Les Duellistes

Les Duellistes
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Titre original The Duellists
Réalisation Ridley Scott
Scénario Gerald Vaughan-Hughes
Musique Howard Blake
Acteurs principaux
Sociétés de production Paramount Pictures
Enigma Productions
Scott Free Enterprises
Pays de production Drapeau du Royaume-Uni Royaume-Uni
Genre Drame historique
Durée 95 minutes
Sortie 1977

Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution.

Les Duellistes ou Duellistes (The Duellists) est un film britannique réalisé par Ridley Scott et sorti en 1977. Adapté de la nouvelle Le Duel de Joseph Conrad, il est le premier long métrage du réalisateur britannique. Il met en scène Keith Carradine et Harvey Keitel dans les rôles principaux.

Le film est présenté au festival de Cannes 1977, où il obtient Prix de la première œuvre. L'accueil de la presse est globalement positif à la sortie du film.

Synopsis[modifier | modifier le code]

En 1800 à Strasbourg, le lieutenant Gabriel Féraud du 7e régiment de hussards blesse grièvement le neveu du maire durant un duel à l'épée. Le brigadier-général Treillard ordonne alors au lieutenant Armand d'Hubert du 3e Régiment de Hussards de le trouver pour le mettre aux arrêts. D'Hubert retrouve Féraud dans le salon d'une dame, et ce dernier prend l'ordre d'arrêt pour un affront et incite d'Hubert à un duel au sabre, qui s'achève à l'avantage de d'Hubert.

Devant l'attitude vengeresse et déraisonnable de Féraud, un ami de d'Hubert l'informe des moyens d'éviter un prochain duel ; s'ils ne se retrouvent pas physiquement au même lieu, s'ils sont d'un différent grade dans l'armée, et si la nation est en guerre, ce qui devient le cas. Six mois plus tard en 1801 suit une courte période de paix où Féraud et d'Hubert se recroisent à Augsbourg. Lors de leur nouveau duel à l'épée, d'Hubert est sérieusement blessé. Recouvrant ses forces, il s'entraîne aux armes pour se préparer pour le prochain combat où les deux officiers combattent au sabre jusqu'à l'épuisement mutuel. Peu après, d'Hubert est promu capitaine.

En 1806 à Lübeck, d'Hubert est reconnu dans une brasserie par Féraud, qui a également été promu capitaine et qui le provoque à un nouveau duel. Le duel a lieu à cheval, et d'Hubert réussit à blesser Féraud au sommet du front. Féraud est ensuite transféré en Espagne, ainsi les deux officiers ne se rencontrent plus jusqu'à ce que la Grande Armée soit réunie en 1812 durant la campagne de Russie. Les deux hommes se retrouvent seuls et combattent un petit groupe de cosaques, après quoi d'Hubert propose à Féraud que leur prochain duel se fasse au pistolet.

Deux années passent, et durant l'exil de Napoléon à l'île d'Elbe, d'Hubert, désormais général de brigade, guérit paisiblement d'une blessure à la jambe dans son domaine de Tours avec sa sœur. Cette dernière lui présente Adèle, et le couple se marie. Peu après, un agent bonapartiste retrouve d'Hubert afin qu'il rejoigne l'Empereur qui vient de s'échapper de son exil, mais d'Hubert refuse. En apprenant les nouvelles, Féraud, également général de brigade, accuse d'Hubert d'avoir toujours manqué de loyauté envers l'Empereur. Après les Cent-Jours, Napoléon est finalement défait et d'Hubert rejoint les armées de Louis XVIII. Il apprend que Féraud a été arrêté et sera exécuté pour son ralliement à Napoléon, et convainc le ministre de la police Joseph Fouché d'épargner Féraud, mais souhaite que son intervention en sa faveur reste secrète.

Peu après, Féraud retrouve d'Hubert et le provoque en duel aux pistolets. Mais pendant le duel, Féraud tire ses deux pistolets sans toucher d'Hubert, il est donc à sa merci. D'Hubert choisit d'épargner Féraud, mais l'informe que sa vie désormais lui appartient et qu'il devra se soumettre à sa volonté en agissant comme mort dans le cas d'une éventuelle prochaine rencontre.

Fiche technique[modifier | modifier le code]

Distribution[modifier | modifier le code]

Production[modifier | modifier le code]

Genèse et développement[modifier | modifier le code]

le château de Commarque

Après de nombreuses publicités pour la télévision, Ridley Scott fait ici ses débuts de réalisateur au cinéma[4]. Ayant du mal à être engagé sur un projet, il décide d'en développer un lui-même. En raison d'un budget limité, il se concentre sur l'adaptation d'une œuvre tombée dans le domaine public[5]. Il engage initialement le scénariste Gerald Vaughan-Hughes pour écrire un script sur Guy Fawkes et la conspiration des Poudres, mais ce projet ne trouve pas de financement[6]. Le scénariste adapte finalement une nouvelle de Joseph Conrad, intitulée Le Duel et publiée en 1908[7],[8]. La nouvelle s'inspire de la vie de Pierre Dupont de l'Étang et François Fournier-Sarlovèze[9].

Ridley Scott s'inspire par ailleurs du film Barry Lyndon (1975) de Stanley Kubrick, notamment pour la photographie, le rythme ou encore le narrateur ponctuel qui amorce certaines séquences[10].

À l'issue de repérages dans le sud-ouest de la France, Ridley Scott choisit Sarlat et ses alentours — notamment le château de Commarque — comme décor pour son film. Il choisit également le château du Repaire (entre Saint-Martial-de-Nabirat et Salviac). Le pays sarladais est une région humide qui correspond à l'esthétique que souhaite donner Ridley Scott à son film (une « stratosphère fine comme un drap de soie »[11]). C'est le maire de Sarlat qui lui révéla la coïncidence que la nouvelle de Conrad, dont s'inspire le scénario du film, est fondée sur une histoire locale : la Grande Armée a bien eu deux officiers qui étaient convenus de se battre en duel à chacune de leurs rencontres, dont l'un, François Fournier-Sarlovèze (qui deviendra général et comte d'Empire), était originaire de Sarlat (d'où l'extension de Sarlovèze à son nom). Le second était Pierre Dupont de l'Étang, aide de camp du général Moreau[réf. nécessaire].

Attribution des rôles[modifier | modifier le code]

Ridley Scott révèle que Paramount Pictures lui a donné une liste d'acteurs pour les deux rôles principaux en échange d'un financement. Le cinéaste y choisit Keith Carradine et Harvey Keitel. Ce dernier est disponible après son renvoi du tournage d'Apocalypse Now de Francis Ford Coppola, autre adaptation d'une œuvre de Joseph Conrad[5].

Engagée sur le film, l'actrice Diana Quick suggère le nom d'Albert Finney pour le rôle de Fouché. Selon le commentaire audio du DVD du film, l'acteur aurait été rémunéré avec une caisse de Champagne. Keith Carradine suggère quant à lui le nom de Cristina Raines, sa petite amie de l'époque[5].

On peut voir la première apparition de Pete Postlethwaite dans un long métrage, dans le rôle d'un homme rasant le général Treillard ; il ne prononce toutefois pas un mot.

Tournage[modifier | modifier le code]

Notamment pour des raisons budgétaires, Ridley Scott décide de tourner les scènes comme des tableaux indépendants et distincts, pour bien indiquer les différents chapitres de l'intrigue[12]. Par ailleurs, aucun décor n'est créé pour le film, tourné uniquement en décors naturels ou déjà existants[5].

L'historien militaire Richard Holmes a servi de consultant sur le tournage.

Pendant le tournage, Ridley Scott a eu l'idée d'utiliser certains plans fixes inspirés de tableaux comme autant de transitions entre les scènes. Il a relevé que certains critiques de l'époque avaient trouvé le film « trop beau », ce qui l'a conduit par la suite à ne plus prendre les critiques, bonnes ou mauvaises, trop au sérieux[11].

Le film est principalement tourné en Dordogne, du au , puis à Londres (The Strand, ...) pour quelques intérieurs pour se terminer en Écosse (près d'Aviemore au pied des monts Cairngorms) le [13]. En Dordogne, l'équipe s'est rendue dans les lieux suivants [14] :

Sortie et accueil[modifier | modifier le code]

Critique[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

Le film reçoit des critiques globalement positives.

Sur l'agrégateur américain Rotten Tomatoes, il récolte 92% d'opinions favorables pour 26 critiques et une note moyenne de 7,310. Le consensus suivant résume les critiques compilées par le site : « Des visuels riches et stylisés fonctionnent avec des performances efficaces dans la version de Ridley Scott de l'histoire napoléonienne de Joseph Conrad, résultant en un premier long métrage impressionnant du réalisateur[15] ». Sur Metacritic, il obtient une note moyenne de 70100 pour 13 critiques[16].

Avis de la presse[modifier | modifier le code]

Alain Pigeard du magazine Historia note : « On doit manifestement à un Anglais le meilleur film sur cette épopée. Non seulement l'image est magnifique, les combats saisissants de réalisme (la retraite de Russie), mais la description des officiers mérite aussi tous les éloges des spécialistes[17] ». Il ajoute : « les uniformes (à part quelques broderies de généraux) sont de grande qualité. Un chef d'œuvre ![17] ».

De son côté, Vincent Canby du New York Times écrit : « Le film, qui se déroule pendant les guerres napoléoniennes, utilise sa beauté de la même manière que d'autres films utilisent la musique de la bande originale, pour créer une ambiance, pour compléter des scènes et même pour les contredire. Parfois, c'est trop, mais le travail de caméra, qui est de Frank Tidy, fournit le style baroque par lequel le film opère sur nos sens, rendant le drame excentrique d'abord captivant et finalement époustouflant[18]. »

Pauline Kael de The New Yorker écrit quant à elle « The Duellists est un film épique, nous nous asseyons et l'observons, et c'est toujours divertissant et étrangement beau[19]. »

Gene Siskel du Chicago Tribune, qui donne au film une note de 2,5/4, écrit notamment « L'histoire aurait pu fonctionner s'il y avait eu un attrait sous-jacent pour le personnage grossier de Keitel. Mais il est un rustre inébranlable du début à la fin, et ses prouesses avec les armes ne le rachètent en rien[20]. ».

Dans Variety, on peut lire que Ridley Scott « a l'œil pour les belles compositions, les récréations d'époque et les tableaux saisissants. Mais c'est un peu superficiel et trop pris de poses… ça éclaire rarement les aspects humains les plus profonds de ces deux hommes agités[21]. »

Le film est inclus dans la seconde édition de l'ouvrage The New York Times Guide to the Best 1,000 Movies Ever Made, publié en 2004[22].

Box-office[modifier | modifier le code]

Distinctions[modifier | modifier le code]

Commentaires[modifier | modifier le code]

Le modèle du personnage de Gabriel Féraud[modifier | modifier le code]

Fournier « el demonio », inspirateur du duelliste Féraud

Fournier, que l'on surnommait « le plus mauvais sujet de l'armée », a inspiré le personnage de Gabriel Féraud, incarné par Harvey Keitel. Querelleur et duelliste, Fournier provoqua et tua lors d'un duel en 1794 un jeune Strasbourgeois du nom de Blumm. Le capitaine Dupont fut chargé par le général Moreau d'empêcher Fournier de se rendre au bal qu'il donnait le soir même. Ce fut l'origine du premier duel entre les deux hommes, à l'épée, que Dupont emporta. Les deux hommes s'affrontèrent à une vingtaine d'autres occasions pendant près de vingt ans, au moyen de toutes sortes d'armes. Fournier rédigea même une charte, qui scellait l'accord entre les duellistes de la manière suivante :

« Article 1er. Chaque fois que MM. Dupont et Fournier se trouveront à trente lieues de distance l'un de l'autre, ils franchiront chacun la moitié du chemin pour se rencontrer l'épée à la main ;

Article 2. Si l'un des deux contractants se trouve empêché par son service, celui qui sera libre devra parcourir la distance entière, afin de concilier les devoirs du service et les exigences du présent traité ;

Article 3. Aucune excuse autre que celles résultant des obligations militaires ne sera admise ;

Article 4. Le traité étant fait de bonne foi, il ne pourra être dérogé aux conditions arrêtées du consentement des parties. »

Ces faits[24],[25] inspirent largement la scène de la première rencontre des personnages principaux du film et une partie des rencontres ultérieures. Le reste de l'histoire entre Fournier et Dupont a été romancé par Conrad pour les besoins de la fiction, puis modifié par le scénariste de Ridley Scott.

Postérité[modifier | modifier le code]

  • Le film a inspiré le 5e morceau de l'album Powerslave d'Iron Maiden, également intitulé The Duellists[5].
  • Gordon Williams a écrit une novélisation du scénario du film, publiée par Fontana Books en 1977.
  • Gregory Widen avouera que le film l'a fortement inspiré pour écrire le scénario de Highlander (1986)[5].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. À l'origine, le film est sorti sous le titre "Duellistes", sans article.
  2. (en) « The Duellists », sur Deep Focus Review.com (consulté le )
  3. (fr) RSdoublage.com (onglet doublage)
  4. « Ridley Scott: British director and producer », sur www.britannica.com (consulté le )
  5. a b c d e et f « Trivia » ((en) anecdotes), sur l'Internet Movie Database
  6. Parrill, p.30
  7. « Gerald Vaughan-Hughes », www.bfi.org.uk (consulté le )
  8. Flavio Gregori, « Youthful Resentment, Bourgeois (Anti-)Heroism and Sublime Unrest: Conrad's 'The Duel' and Ridley Scott's "The Duellists" », South Atlantic Review, vol. 75, no 3,‎ , p. 109–129 (JSTOR 41635636, lire en ligne)
  9. Anders Linnard, « The real men behind The Duellists », sur www.historicalfencer.com,
  10. (en) « The Duellists », sur Film at Lincoln Center (consulté le )
  11. a et b Issu des commentaires du DVD Paramount Edition collector édité le 13 mars 2003
  12. (en) William B. Parrill, Ridley Scott: A Critical Filmography, McFarland, (ISBN 9780786485932), 35
  13. « Locations » (tournage et production), sur l'Internet Movie Database
  14. « The Duellists - Les lieux de tournage scène par scène » (consulté le ).
  15. (en) « The Duellists (1977) », sur Rotten Tomatoes, Fandango Media (consulté le )
  16. (en) « The Duellists Reviews », sur Metacritic, CBS Interactive (consulté le )
  17. a et b Alain Pigeard, « L'épopée napoléonienne au cinéma », Historia,‎ septembre - octobre 1996, p. 94-95
  18. Canby, Vincent (January 14, 1978). "New Movie, 'The Duellists,' Is Set During Napoleonic Wars". The New York Times. 10.
  19. Kael, Pauline (23 janvier 1978). "The Current Cinema". The New Yorker. 80.
  20. Siskel, Gene (April 2, 1979). "'The Duellists': Pretty, but plot is a lost cause". Chicago Tribune. Section 2, p. 7.
  21. "Film Reviews: The Duellists". Variety. June 1, 1977. 17.
  22. The Best 1,000 Movies Ever Made. The New York Times via Internet Archive. Published April 29, 2003. Retrieved June 12, 2008.
  23. « Awards » ((en) récompenses), sur l'Internet Movie Database
  24. D'après James Landale, The Last Duel: A True Story of Death and Honour
  25. Voir histoire-empire.org sur Fournier-Sarloveze, le plus mauvais sujet de l'armée.

Annexes[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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