Leptogénèse

En cosmologie, la leptogénèse est la formation des leptons dans l'Univers primitif. Les processus responsables de cette leptogénèse, encore mal compris, ont notamment produit une asymétrie entre les leptons et les antileptons peu après le Big Bang, entraînant la domination actuelle des leptons sur les antileptons.

Problématique[modifier | modifier le code]

Dans le cadre du modèle standard[modifier | modifier le code]

Le modèle standard de la physique des particules prévoit que le nombre de leptons puisse changer en raison de l'anomalie chirale (en), qui affecte l'interaction faible :

  • aux températures d'ordre de grandeur inférieur au TeV, le nombre de leptons est presque conservé, mais peut changer un peu en raison de l'effet tunnel ;
  • aux températures plus élevées, ce nombre peut changer du fait d'interactions avec les sphalérons, des entités analogues à des particules[1].

Dans le modèle standard, la différence entre le nombre de leptons et le nombre de baryons est conservée avec une grande précision, si bien que la leptogenèse s'accompagne nécessairement d'une baryogénèse.

Les asymétries des leptons et des baryons affectent la nucléosynthèse primordiale ultérieure, beaucoup mieux comprise, au cours de laquelle des noyaux atomiques légers ont commencé à se former. Une synthèse réussie des éléments légers exige qu'il y ait un déséquilibre du nombre de baryons et d'antibaryons de l'ordre d'une partie par milliard lorsque l'univers est vieux de quelques minutes[2]. Une asymétrie du nombre de leptons et d'antileptons n'est pas requise pour la nucléosynthèse primordiale. La conservation de la charge suggère cependant que toute asymétrie antre leptons et antileptons chargés (électrons, muons et taus) devrait être du même ordre de grandeur que l'asymétrie baryonique[3]. Les observations de l'abondance primordiale de l'hélium 4 placent une limite supérieure à toute asymétrie leptonique résidant dans le secteur des neutrinos, mais elle n'est pas très contraignante[2].

Les théories de la leptogenèse font appel à des sous-disciplines de la physique telles que la théorie quantique des champs et la physique statistique pour décrire ses mécanismes possibles. La baryogenèse, la génération d'une asymétrie baryon-antibaryon et la leptogenèse peuvent être liées par des processus qui convertissent le nombre baryonique et le nombre leptonique l'un en l'autre. L'anomalie quantique Adler–Bell–Jackiw (en) (non perturbative) peut produire des sphalérons, qui peuvent convertir des leptons en baryons et vice versa[4]. Ainsi, le modèle standard est en principe capable de fournir un mécanisme pour créer des baryons et des leptons.

Au-delà du modèle standard[modifier | modifier le code]

Dans le modèle standard la leptogenèse s'accompagne nécessairement d'une baryogénèse. Certains modèles théoriques suggèrent cependant que la leptogenèse a commencé avant la baryogenèse (le terme leptogenèse est d'ailleurs souvent utilisé pour désigner la non-conservation des leptons sans la non-conservation correspondante des baryons), mais ce n'est possible que dans le cadre d'extensions du modèle standard[1].

Une extension simple a été suggérée en 1986[5] : on ajoute au modèle standard des neutrinos « droitiers », sujets à un mécanisme de see-saw qui confère une très faible masse aux neutrinos connus et prédit l'existence d'un neutrino lourd, dit « stérile ». Alors des leptons sont générés spontanément par la désintégration des neutrinos droitiers, puis les sphalérons convertissent l'asymétrie leptonique ainsi générée en une asymétrie baryonique conforme à celle observée. En raison de sa popularité, l'ensemble du processus est parfois qualifié simplement de leptogenèse[6].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b (en) V. A. Kuzmin, V. A. Rubakov et M. E. Shaposhnikov, « On anomalous electroweak baryon-number non-conservation in the early universe », Physics Letters B, vol. 155, nos 1-2,‎ , p. 36-42 (DOI 10.1016/0370-2693(85)91028-7).
  2. a et b (en) G. Steigman, « Primordial Nucleosynthesis in the Precision Cosmology Era », Annual Review of Nuclear and Particle Science, vol. 57, no 1,‎ , p. 463-491 (DOI 10.1146/annurev.nucl.56.080805.140437, Bibcode 2007ARNPS..57..463S, arXiv 0712.1100, S2CID 118473571).
  3. (en) Vimal Simha et Gary Steigman, « Constraining the universal lepton asymmetry », Journal of Cosmology and Astroparticle Physics (en), vol. 2008, no 8,‎ , p. 1-11 (ISSN 1475-7516, DOI 10.1088/1475-7516/2008/08/011, Bibcode 2008JCAP...08..011S, arXiv 0806.0179, S2CID 18759540).
  4. (en) Riccardo Barbieri, Paolo Creminelli, Alessandro Strumia et Nikolaos Tetradis, « Baryogenesis through leptogenesis », Nuclear Physics B, vol. 575, nos 1–2,‎ , p. 61-77 (DOI 10.1016/s0550-3213(00)00011-0, Bibcode 2000NuPhB.575...61B, arXiv hep-ph/9911315, S2CID 1413779).
  5. (en) M. Fukugita et T. Yanagida, « Baryogenesis Without Grand Unification », Physics Letters B, vol. 174, no 1,‎ , p. 45-47 (DOI 10.1016/0370-2693(86)91126-3).
  6. (en) Sacha Davidson, Enrico Nardi et Yosef Nir, « Leptogenesis », Physics Reports, vol. 466, nos 4-5,‎ , p. 105-177 (ISSN 0370-1573, DOI 10.1016/j.physrep.2008.06.002, arXiv 0802.2962).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]