L'Enlèvement des Sabines (Poussin)

L'Enlèvement des Sabines (1634-1635)
Artiste
Date
Technique
Dimensions (H × L)
154 × 206 cm
No d’inventaire
46.160[1]
Localisation
L'Enlèvement des Sabines (1637-1638)
Artiste
Date
Technique
Dimensions (H × L)
159 × 206 cm
No d’inventaire
INV 7290[2]
Localisation

L'Enlèvement des Sabines est le sujet de deux tableaux de Nicolas Poussin. Il est tiré de l'œuvre de Plutarque Vie de Romulus, et illustre le moment où les Romains s'emparèrent des Sabines, afin de les prendre pour épouses. Le premier, peint en 1634-1635 est conservé au Metropolitan Museum of Art de New York et a été peint à Rome. La deuxième version, peinte en 1637-1638 et exposée au musée du Louvre, montre qu’il n’a pas épuisé le sujet, même si certains personnages principaux sont identiques.

Le sujet commun[modifier | modifier le code]

Le tableau décrit Romulus, à gauche, donnant le signal de l’enlèvement des Sabines. Sa pose dérive directement de la statuaire impériale antique que Nicolas Poussin a l'occasion d'observer à Rome. La composition très dramatique de ces toiles reflète toute la tension de l'épisode. Les personnages sont nombreux : des soldats romains s'emparent des femmes qui s'efforcent de fuir et pleurent. Seul au milieu du chaos, une vielle Sabine implore Romulus le visage déconfit par l'horreur de la scène, personnage au manteau rouge qui supervise la scène à gauche du tableau.

Le thème de l'enlèvement[modifier | modifier le code]

Le thème de l'enlèvement connaît un vif succès aux XVIe et XVIIe siècles. Il permet de fusionner un corps féminin et un corps masculin, comme dans la sculpture, mais aussi de présenter des expressions diverses et, en peinture surtout, les effets de foule et de panique. Parmi les épisodes relatant des enlèvements, les plus fréquents, sans compter celui des Sabines, sont ceux d'Hélène par Pâris, d'Europe par Zeus, de Déjanire par le centaure Nessos, de Mikonos par les Gaulois et de Proserpine par Pluton, dont le Bernin avait donné une illustration en sculpture. Poussin s'en est probablement inspiré dans le groupe du premier plan à gauche, commun aux deux tableaux.

Version du Metropolitan[modifier | modifier le code]

L'architecture est présentée comme un décor de théâtre. Elle est évidemment anachronique par son classicisme. Poussin utilise un mode d'expression « furieux » qui, selon lui, décrit parfaitement les incroyables scènes de guerre. Son souci est d'être intelligible pour celui qui ne connaîtrait pas le sujet. Pour cela, il donne à ses personnages des attitudes très expressives. Les couleurs violentes rouges, jaunes, bleues participent à la création de cette atmosphère de terreur et de bouleversement. Pour imaginer l'œuvre finale, Poussin fabrique de petits personnages à la cire qu'il habille et qu'il place devant un paysage (principe nommé mise en boite ou "boite optique"). Il est un peintre classique savant qui construit minutieusement ses compositions.

Version du Louvre[modifier | modifier le code]

Ce tableau a été peint pour le cardinal Luigi Omodei. Après un passage dans la collection de Louis XIV, il arrive au Louvre en 1685[2]. Un siècle plus tard, en 1793, il fait partie des premiers tableaux exposés au Muséum Central des Arts, futur musée du Louvre. Outre que certains personnages diffèrent de la version peinte trois ans plus tôt, la composition architecturale est plus complexe.

La construction du tableau repose sur deux diagonales qui se croisent dans l'arc de triomphe au centre, qui est donc le point de fuite. Les courbes et les effets circulaires donnent dans la foule l'impression du mouvement.

L'espace central, avec un temple, une basilique et des palais groupés autour d'une vaste place, illustre le forum vitruvien[3].

Postérité[modifier | modifier le code]

C’est naturellement la version du Louvre que le peintre péruvien Herman Braun-Vega résidant à Paris étudie pour réaliser en 1974 sa série de vingt tableaux sur L’enlèvement des sabines, symbole de la violence exercée par des militaires sur des civils, qu’il met en abyme avec des natures mortes inversées en trompe-l’œil[4] symbolisant des évènements violents de son époque[5].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Fiche de l’œuvre sur le site du Metropolitan Museum of Art
  2. a et b Notice no 2142, base Atlas, musée du Louvre
  3. Sabine Frommel, Peindre l'architecture durant la Renaissance italienne, Louvre éditions, coll. « La Chaire du Louvre », , p. 196-197.
  4. Stéphane Rey, « De Lima à Izegem », L'écho de la bourse, Bruxelles,‎ , p. 6 (lire en ligne)
  5. Jean-Luc Chalumeau, La Nouvelle Figuration : Une histoire, de 1953 à nos jours, Figuration narrative - Jeune Peinture - Figuration critique, Paris, Cercle d’Art, , 222 p. (ISBN 978-2-702-20698-0), p. 140 :

    « Les années 1973 et 1974 sont placées sous le signe de Nicolas Poussin et plus particulièrement de l'Enlèvement des Sabines du Louvre (1637). Braun-Vega élabore une série de vingt numéros qu'il conçoit comme une « étude technique et iconographique » à partir des rapports entre le civil et le militaire et du thème de l'agression. Il retrouve une facture « à la Poussin », c'est-à-dire non réaliste mais obéissant à un rythme intellectuel: une construction plastique « efficace et froide » qu'il oppose à une chaleur chromatique toute personnelle liée à des allusions à des événements politiques et sociaux contemporains. »

Annexes[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]