Jim Garrison

Jim Garrison
Fonction
Procureur de district
La Nouvelle-Orléans
-
Harry Connick (en)
Biographie
Naissance
Décès
Sépulture
Nationalité
Formation
Université Tulane
Faculté de droit de l'université de Tulane (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
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Conflit

Jim Garrison, né Earling Carothers Garrison le à Denison dans l’État de l'Iowa, et mort le à La Nouvelle-Orléans en Louisiane, est un procureur de district (district attorney) américain, connu pour avoir lancé une enquête sur l'assassinat du président John F. Kennedy.

Il est à ce jour le seul magistrat américain à avoir engagé des poursuites sur le meurtre du 35e président des États-Unis[1].

Biographie[modifier | modifier le code]

Après l'attaque de Pearl Harbor en , Jim Garrison s’enrôle dans l'US Army et est envoyé sur le théâtre européen à partir de l'année 1942. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, il intègre la Tulane Law School de La Nouvelle-Orléans. Diplômé, il intègre ensuite le FBI, au sein duquel il travaille pendant deux ans comme agent spécial sur les villes de Seattle et de Tacoma. En 1954, il retrouve La Nouvelle-Orléans où il devient assistant du District Attorney (procureur)[2].

Le , à l'âge de 40 ans, il est élu procureur de La Nouvelle-Orléans pour son premier mandat[1].

Il est réélu trois fois à son poste au cours des douze années consécutives suivantes, il poursuivit sa fonction de District Attorney jusqu'en 1974.

Parallèlement, en 1971, il est arrêté par les autorités et fut poursuivi à deux reprises par le gouvernement fédéral pour des accusations de fraudes fiscales car il aurait, d'après l'accusation, reçu des revenus de la part d'exploitants de flippers clandestins. Assurant sa défense lui-même, il fut acquitté à deux reprises[1].

Il exerça le droit ensuite à titre privé pendant 4 ans. Il fut ensuite élu comme juge de la quatrième cour d'appel de Louisiane.

Jim Garrison meurt le des suites d'un cancer, à l'âge de 70 ans.

« The Smith Case »[modifier | modifier le code]

Au cours de l'été 1966, à la suite d'une conversation qu'il a eue avec le sénateur Russell Long fils de Huey Long, Jim Garrison étudie le rapport d'enquête de la Commission Warren. Insatisfait par sa qualité d'homme de droit à la fois sur les éléments proposés, la synthèse et la qualité du travail fourni, il entreprend, en secret, une enquête sur l'assassinat du président Kennedy sous le nom de code « The Smith Case ». Il étudie en particulier les relations de Lee Harvey Oswald à La Nouvelle-Orléans au cours de l'été de l'année 1963 ayant précédé l'assassinat du président John F. Kennedy, comme l'ancien pilote David Ferrie et le détective d'extrême droite fondateur de l'agence de détective, Banister Associated Inc, Guy Banister[3].

L'enquête est révélée au public le , quand la journaliste Rosemary James publia dans le New Orleans States-Item une information selon laquelle le bureau du district attorney avait dépensé plus de 8 000 dollars de fonds publics dans le cadre d'une enquête sur l'assassinat de John F. Kennedy[4].

Malgré le décès, le , du principal suspect de l'enquête, David Ferrie, retrouvé mort à son domicile, Garrison ne lâche pas prise, notamment à la suite des révélations de Perry Russo (1941-1995).

Le , Garrison fait arrêter Clay Shaw, un homme d’affaires connu originaire de La Nouvelle-Orléans. Il l'accuse de complicité dans l'assassinat du président John Fitzgerald Kennedy et d'être membre de la CIA.

Après des mois de batailles juridiques entre Shaw et le bureau de Garrison, la Cour suprême statue le que Shaw doit subir son procès qui s'ouvre le . Shaw est acquitté par un jury, le de la même année. C'est un désaveu pour le procureur Garrison[5]. Mais il a cependant exigé et obtenu du magazine Life le film Zapruder pour le projeter devant le jury, quatre fois le premier jour (dont deux au ralenti), et trois fois le lendemain[6] permettant au public du tribunal de prendre connaissance pour la première fois du film.

En effet, le film était resté depuis le dans le coffre de la parution qui en avait acheté les droits au cinéaste amateur Abraham Zapruder et qui n'avait jamais été diffusé ni dans la presse écrite et ni sur les chaînes de télévision américaines dans son intégralité[5].

Rapport avec les médias[modifier | modifier le code]

Dès son enquête révélée sur l'assassinat du président Kennedy, Jim Garrison subit de nombreuses attaques de la part des médias, notamment lors d'une émission de la chaîne NBC diffusée le . Le mois suivant, NBC lui accorde 30 minutes d'antenne afin qu'il puisse répondre aux accusations portées à son encontre et présenter ses principaux arguments[7].

Le journaliste français Léo Sauvage, lui-même opposant de la première heure au rapport de la Commission Warren, a jugé sévèrement l'enquête du procureur Garrison, l'accusant d'avoir fabriqué des accusations contre un innocent, Clay Shaw[8].

Le patron du syndicat des routiers, Jimmy Hoffa, déclara peu de temps avant sa disparition en 1975 et jamais explicitée à ce jour, à son sujet :

« Jim Garrison's s smart man... goddamned smart attorney .... Anybody thinks he's a hook is a hook themselves[9]

(Jim Garrison est un homme intelligent ... un putain d'avocat intelligent ... Toute personne qui pense qu'il est un cave est un cave lui-même) »

Poursuite de sa carrière[modifier | modifier le code]

En 1973, non réélu (à deux mille voix d'écart), Jim Garrison est remplacé au poste de district Attorney de La Nouvelle-Orléans par Joseph Harry Fowler Connick Sr (en charge de 1973 à 2003). Par la suite, il exerce le droit à titre privé pendant quatre ans puis il est élu en 1978 comme juge de la quatrième cour d'appel de Louisiane, poste qu'il exerça jusqu'à la fin de sa carrière[1].

Apports du HSCA[modifier | modifier le code]

Les découvertes de l'enquête de Jim Garrison furent corroborées par le House Select Committee on Assassinations ou Comité d'Enquête Sénatoriale sur les assassinats de pasteur Martin Luther King en 1968 et du président John Fitzgerald Kennedy en 1963. Ce comité d'enquête parlementaire fut formé en 1976 sous la pression de l'opinion publique américaine à la suite de la grave et la profonde crise institutionnelle et démocratique du scandale du Watergate en 1973. Les révélations de la presse sur les agissements illégaux du président Richard Nixon, furent renforcées par les résultats de l'enquête sénatoriale de la Commission Church de 1975 à 1976 qui révéla les agissements illégaux des services de renseignements américains sur le territoire des Etats-Unis. De plus, ce comité d'enquête parlementaire mit alors en lumière publiquement les manquements, les omissions et insuffisances des agences de renseignements et de protection, le FBI, le Secret Service et la CIA, et alors inconnus du grand public durant l'enquête menée sur l'assassinat du 35e président des Etats-Unis en 1963[10]. Ces éléments, dans le contexte de défaite de la guerre du Vietnam, alertèrent l'opinion publique sur les dysfonctionnements observés au sein des institutions des Etats-Unis, réclamant une nouvelle enquête[5].

Le HSCA enquêta plus spécifiquement sur le contexte historique des opérations anti-castristes afin de déstabiliser le régime cubain menées par la CIA sur ordre de la Maison-Blanche à partir de 1960, et l'alliance avec les exilés cubains anti-castristes recrutés et formés par cette dernière et avec le crime organisé pour mettre fin au régime de Fidel Castro[11].

L'avènement du régime de Fidel Castro fut pour la mafia américaine, en et malgré ses tentatives de se concilier les faveurs du nouveau régime, une perte considérable et catastrophique lors de la fermeture par les forces cubaines castristes de l'ensemble des casinos, lieux de prostitution et trafics de drogue installés sur l'île de Cuba solidement établis sous le régime du dictateur Batista. Ce dernier était initialement protégé par les États-Unis, et ce, malgré son impopularité auprès de la population civile cubaine, au nom de la défense des intérêts économiques américains. En 1959, le montant annuel généré par les activités criminelles était estimé à 100 millions de dollars soit 900 millions rapporté en 2013[9].

Le HSCA détermina que le changement progressif de politique menée par l'administration de John Fitzgerald Kennedy à l'égard de Cuba, d'abord avec l'échec de l’invasion de la Baie des Cochons en avril 1961 menée par la CIA de manière déficiente, puis plus profondément avec la crise des missiles d', afin d'apaiser durablement les relations avec le régime cubain et d'ouvrir de nouvelles perspectives, avait contribué à braquer sinon à renforcer, au sein même des nombreux groupes d'opérations paramilitaires, la frange la plus radicale de cubains anti-castristes, d'agents américains du monde du renseignement et des criminels de la mafia. Ces groupes continuèrent leurs opérations pour renverser le régime de Fidel Castro et ce malgré les demandes d'arrêts formels de la Maison-Blanche pour faire respecter l'accord de neutralité à la suite de la crise des missiles[11].

Ouvrage[modifier | modifier le code]

En 1988, Jim Garrison publie son ouvrage On the Trail of the assassins sur l'affaire de l'assassinat de John Fitzgerald Kennedy, lui permettant d'exposer son hypothèse[1],[2] : la disparition du président John Fitzgerald Kennedy aurait été provoquée par une opération des membres participants du monde des services de la communauté du renseignement des États-Unis. Il désigne plus spécifiquement la CIA et des éléments extra-gouvernementaux, et notamment le crime organisé américain et les cubains anti-castristes réfugiés aux Etats-Unis. En effet, ces derniers s'étaient alliés pour neutraliser définitivement le régime castriste de Fidel Castro sur l'île de Cuba, suivant les instructions données par le président Dwight Einsenhower en 1960[1].

Pour le procureur Garrison, cette association créée avec pour objectif la disparition du régime castriste, rentra en interne en opposition avec la politique menée par John F. Kennedy à partir de 1961. D'une part, avec le grave échec de l'invasion de la Baie des Cochons en , un fort ressentiment se créa au sein de la CIA contre la nouvelle présidence par l'absence de soutien aérien pendant l'invasion.

Puis d'autre part, cette opposition s'intensifia durablement contre la politique d'apaisement menée à l'égard de Cuba par la présidence américaine à la suite de la grave crise internationale des missiles de Cuba d'octobre 1962. Cette dernière avait alors fait mesurer aux dirigeants des deux puissances de l'époque, l'URSS et les États-Unis, les risques en pleine période de guerre froide d'une confrontation directe et notamment nucléaire[1],[12].

L'assassinat de John Fitzgerald Kennedy aurait été pour le procureur Garrison un coup d'État, étouffé par la suite par les responsables politiques et les agences gouvernementales, notamment par le FBI dirigé J. Edgar Hoover (qui dirigea l'enquête et en communiqua les principaux éléments à la Commission Warren). L'objectif final de cette opération, selon le procureur Garrison, était d'empêcher une politique de détente avec l'URSS et Cuba de s'instaurer durablement, projet mené secrètement par John Fitzgerald Kennedy. Le président avait pour objectif de tenter de normaliser les relations diplomatiques avec Cuba, en échange d'un non alignement sur l'URSS de la part du régime Cubain. Cette politique fut directement interrompue par sa disparition le [5],[13].

Au cinéma[modifier | modifier le code]

Le film JFK (1991) du réalisateur Oliver Stone retrace l'enquête de Garrison et son procès en se basant sur son livre, On the Trail of the Assassins. Ironiquement, Jim Garrison accepta d'y apparaître en caméo, en y jouant le rôle de Earl Warren, qui présidait la commission d'enquête Warren ayant conclu en 1964 à la seule culpabilité du seul Lee Harvey Oswald dans l'assassinat du président Kennedy. Dans ce film, son propre rôle est interprété par l'acteur Kevin Costner.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f et g Garrison 2012.
  2. a et b (en) Jim Simkin, « Jim Garrison », sur spartacus-educational.com (consulté le ).
  3. Lentz 2013, p. 77-78.
  4. Garrison 2012, p. 129-130.
  5. a b c et d Lentz 2013, p. 79.
  6. (en) David R. Wrone, The Zapruder Film. Reframing JFK's Assassination, Lawrence, University Press of Kansas, , 368 p. (ISBN 0-7006-1291-2, lire en ligne), p. 199-205 (« A Command Appearance »).
  7. Jim Garrison's response sur NBC News, juillet 1967
  8. Léo Sauvage, « Qui a tué le président ? », Historia, no 33 (hors-série),‎ , p. 28-41.
  9. a et b (en) Anthony Summers, Not in Your Lifetime, Londres, Headline Publishing Group, , 630 p.
  10. (en) Church Committee, Church Committee Book V : The Investigation of the Assassination of President John F. Kennedy: Performance of the Intelligence Agencies, Washington, US Government Printing Office, , 106 p. (lire en ligne)
  11. a et b (en) HSCA, HSCA Report, Volume X : The Ingredients of an Anti-Castro Cuban Conspiracy, Washington, US Government Printing Office, , 210 p. (lire en ligne), p. 5-18
  12. Fabrice Drouelle, « Affaires Sensibles : 17 avril 1961 - La baie des cochons », sur France Inter.fr, .
  13. Anthony Summers (trad. de l'anglais), Le plus grand Salaud d'Amérique : J.E. Hoover, patron du F.B.I, Paris, Seuil, , 384 p. (ISBN 2020207133), p. 264-288

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) Jim Garrison, On the Trail of the Assassins, New York, Skyhorse Publishing, , 360 p. (ISBN 978-1-62087-299-4)
  • Thierry Lentz, L'assassinat de John F. Kennedy. Histoire d'un mystère d'État, Paris, nouveau monde éditions, , 446 p. (ISBN 978-2-36583-845-0), p.77-82.
  • Vincent Quivy, Qui n'a pas tué John Kennedy ?, Paris, Seuil, 2013, 281 p. (ISBN 978-2-02-108538-9)

Liens externes[modifier | modifier le code]