Ioulia Navalnaïa

Ioulia Navalnaïa
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Ioulia Navalnaïa en 2024
Nom de naissance Ioulia Borissovna Abrossimova
Naissance (47 ans)
Moscou, RSFS de Russie, URSS
Profession
Économiste
Formation
Conjoint

Ioulia Borissovna Navalnaïa (en russe : Юлия Борисовна Навальная), née Abrossimova (en russe : Абросимова) le à Moscou, est une économiste et personnalité publique russe. Elle-même opposante à Vladimir Poutine, elle est la veuve du leader d'opposition Alexeï Navalny, mort en prison en 2024. Elle est décrite dans les médias comme la « Première dame » de l'opposition russe.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse et éducation[modifier | modifier le code]

Ioulia Borissovna Abrossimova naît le à Moscou, en Union soviétique, dans la famille du scientifique Boris Alexandrovitch Abrossimov (1952-1996). Sa mère travaille pour le ministère de l'Industrie légère ; ses parents divorcent alors que Ioulia Abrossimova est enfant et sa mère se marie une seconde fois avec un employé du Comité national de planification de l'URSS. En 2020, le journaliste Oleg Kachine déclare que le père de Ioulia Navalnaïa est Boris Borisovitch Abrossimov, secrétaire de l'ambassade de Russie en Grande-Bretagne, associé aux services spéciaux, et que sa tante est Elena Borissovna Abrossimova, l'une des personnes ayant contribué à la rédaction de la Constitution russe. Navalny, en réponse à cela, publie l'acte de décès de son beau-père, daté de 1996[1].

Navalnaïa est diplômée de la Faculté des relations économiques internationales de l'Académie économique russe Plekhanov et effectue ensuite un stage à l'étranger, où elle étudie pour terminer son troisième cycle universitaire[2].

Navalnaïa travaille quelque temps dans une banque de Moscou[3].

Implication dans la carrière politique d'Alexeï Navalny[modifier | modifier le code]

En 2000, Navalnaïa et son mari rejoignent le parti politique russe Iabloko[2], qu'elle quitte quelques années plus tard en mai 2011[4].

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Navalnaïa avec Alexeï Navalny lors d'une marche le à Moscou

Après 2007, Alexeï Navalny devient célèbre en Russie en tant que blogueur et homme politique de l'opposition. Navalnaïa est alors la première secrétaire et assistante de son mari. La vie de la famille devient publique, jusqu'à ce que Navalnaïa soit sous les projecteurs en tant que « Première dame de l'opposition russe »[3]. Les observateurs notent qu'elle n'a jamais essayé de se positionner comme une figure indépendante : Navalnaïa se comporte toujours comme une épouse et une compagne dévouée (« l'épouse du décembriste »), prête à faire des déclarations dures et participer à des actions d'envergure si son mari en a besoin, mais sans lien direct avec la politique. Elle prend la parole lors de plusieurs rassemblements, qualifiant le directeur de la Garde nationale russe Viktor Zolotov, qui en septembre 2018 défie Navalny en « duel », de « voleur, lâche et bandit impudent »[5],[6].

Navalnaïa attire l’attention du public à la fin de l’été 2020, lorsque son mari est hospitalisé d’urgence à Omsk à la suite d’un empoisonnement présumé. Elle exige que Navalny soit libéré en Allemagne pour y être soigné et s'adresse même directement au président russe Vladimir Poutine[7],[8],[9]. Après que des experts allemands ont confirmé l'empoisonnement de Navalny, le médecin russe Leonid Rochal déclare qu'aucune substance toxique n'a été trouvée dans les échantillons de Navalny en Russie et suggère de créer une équipe russo-allemande pour répondre à cette question. Navalnaïa l'accuse d'agir « non pas en tant que médecin, mais en tant que voix de l'État »[10],[11],[12]. Elle suit son mari à Berlin, se trouve à côté de lui à l'hôpital de la Charité et Navalny poste plus tard un message où il écrit « Ioulia, tu m'as sauvé »[13]. Novaïa Gazeta, à la suite du choix de ses lecteurs, nomme Navalnaïa « Héroïne de l'année 2020 »[14]. Les principaux médias européens suivent de près son activité et font mention de ses publications sur les réseaux sociaux[3].

En janvier 2021, Navalnaïa retourne en Russie avec son mari. Après l'arrestation de Navalny à la douane, elle déclare que cette arrestation, suivie de la fermeture de l'aéroport de l'aéroport de Vnoukovo, sont un signe de la peur des autorités russes à l'égard de Navalny. Elle déclare : « Alexeï a dit qu'il n'avait pas peur. Et je n'ai pas peur non plus. Et je vous exhorte tous à ne pas avoir peur. »[15]. Plus tard, Navalnaïa accuse les responsables de la sécurité de « la persécuter en tant qu'épouse d'un ennemi du peuple ». Elle écrit sur Instagram : « L'année 37 est arrivée, et nous ne l'avons pas remarqué. »[16],[17],[18]. Le 21 janvier, Navalnaïa annonce qu'elle ira assister aux manifestations russes de 2021 pour exiger la libération de son mari[19]. Deux jours plus tard, elle est arrêtée, avant d'être relâchée le soir même[20].

Avenir politique[modifier | modifier le code]

Navalnaya and Navalny hugging after Navalny's release from custody after a successful appeal to the prosecutor's office on 19 July 2013
Navalnaïa et Navalny s'embrassent après la libération de Navalny après un appel réussi auprès du bureau du procureur le 19 juillet 2013

En 2015, Navalnaïa est classée comme la 67e femme la plus influente de Russie par Écho de Moscou[21]. Après qu'Alexeï Navalny a été condamné avec sursis, des rumeurs font état du fait que Ioulia Navalnaïa pourrait se présenter elle-même à l'élection présidentielle à sa place. Selon la personnalité publique russe Ksenia Sobtchak, elle propose en 2018 cette option à Navalny, mais celui-ci la rejette en affirmant que « les votes ne sont pas remis »[pas clair][22].

En septembre 2020, après l'empoisonnement de Navalny, Navalnaïa commence à jouer un rôle politique indépendant et certains commentateurs estiment qu'elle pourrait devenir la « Tikhanovskaïa russe » et prendre la tête de toute l'opposition[23],[24],[25]. L'analyste politique Konstantin Kalachev déclare que le rôle de Navalnaïa a changé : « D'épouse d'homme politique, elle devient elle-même une femme politique ». Il ajoute qu'« elle a du charisme et du charme, et peut facilement remplacer son mari si nécessaire »[26]. Le stratège politique Abbas Gallyamov compare Navalnaïa à Corazon Aquino, l'épouse du principal leader de l'opposition aux Philippines qui s'est opposée au régime du dictateur au pouvoir pendant vingt ans[27],[28],[29]. Certains pensent cependant qu'une telle tournure des événements est peu probable[30].

En 2020, l'écrivain russe Dmitri Bykov déclare que Navalnaïa lui rappelle l'héroïne[Qui ?] de Ludmila Petrouchevskaïa : elle « fait face à des circonstances plus fortes qu'elle, mais un miracle l'aide à vaincre le mal du monde »[31].

En janvier 2021, la chaîne pro-Kremlin Tsargrad TV menace de publier des documents intimes liés à Alexeï Navalny à moins que Navalnaïa ne promette « de ne pas devenir la Tikhanovskaïa russe » et de « ne pas jouer à des jeux politiques »[32],[33].

Le , l'administration pénitentiaire russe annonce qu'Alexeï Navalny est mort dans la colonie pénitentiaire no 3 de Kharp, en Iamalie, après avoir fait un malaise le matin même au cours de sa promenade[34],[35].

Peu après la mort de son mari, Navalnaïa, qui participe alors à la Conférence de Munich sur la sécurité, prononce un discours dans lequel elle déclare qu'elle n'est pas sûre de la véracité des informations données par les autorités russes, mais que si son mari est décédé, Poutine et ses alliés « seront traduits en justice »[36]. Ioulia publie une vidéo en ligne déclarant qu'elle envisage de poursuivre le travail politique de son mari et a demandé aux Russes de se rassembler autour d'elle comme ils l'ont fait autour de son mari, en disant : « Je continuerai le travail d'Alexeï Navalny… Je veux vivre dans une Russie libre, je veux construire une Russie libre. »[37].

La décision de Navalnaïa de reprendre le combat politique de son mari suscite des fausses informations et des rumeurs, propagées par les sphères pro-Kremlin afin de la décrédibiliser. Son compte Twitter est brièvement suspendu le par la plateforme, pour « violation des règles d'utilisation » puis réactivé moins d'une heure plus tard[38]. Cette volonté se heurte à plusieurs difficultés car Navalnaïa vit en exil. D'une part, elle risque d'avoir des difficultés à se coordonner avec les militants vivant encore en Russie en raison de la fermeture du pays, d'autre part, son exil en temps de guerre peut être en contradiction avec le patriotisme de l'opposition russe[39].

Le 6 mars 2024, Loulia Navalnaïa appelle les russes a exprimer leur opposition à Vladimir Poutine le 17 mars 2024, dernier jour de l'élection présidentielle russe qui doit voir Vladimir Poutine réélu sans surprise, en l'absence de candidats d'opposition, notamment en participant en se rendant en masse aux bureaux de vote à midi, en signe de protestation, opération nommée Midi contre Poutine[40].[1]

Vie privée[modifier | modifier le code]

À l'été 1998, alors qu'elle est en vacances en Turquie, Ioulia Abrossimova rencontre Alexeï Navalny, un avocat résidant comme elle à Moscou. En 2000, elle et Navalny se marient. Ils ont une fille nommée Daria en 2001 et un fils, Zakhar, en 2008. Navalnaïa aide les parents de son mari dans leur activité de vannerie[2]. Après 2007, Navalnaïa ne travaille officiellement nulle part, se qualifiant de « principale en matière de vie quotidienne et d'éducation des enfants »[3].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (ru) Alexei Navalny, « Девочки-убийцы, или предъявите своё свидетельство о смерти » [archive du ], navalny.com,‎ (consulté le )
  2. a b et c (ru) Dmitry Sokolov, « От курортного романа к спасительной любви: что связало Юлию и Алексея Навальных » [archive du ], sobesednik.ru,‎ (consulté le )
  3. a b c et d (ru) Elizaveta Tcheprasova, « Первая леди оппозиции: что мы знаем о Юлии Навальной » [archive du ], woman.ru,‎ (consulté le )
  4. (ru) Vladimir Goussev, « Юлия Навальная: первая леди России-2018, которую мы потеряли из-за махинаций ее мужа » [archive du ], Блокнот Россия,‎ (consulté le )
  5. (ru) Ioulia Navalnaïa, « «Вор и трус, наглый бандит». Юлия Навальная ответила главе Росгвардии » [archive du ], Meduza,‎ (consulté le )
  6. (ru) « Юлия Навальная считает обращение главы Росгвардии угрозой всей семье » [archive du ], Kommersant,‎ (consulté le )
  7. (ru) « Юлия Навальная потребовала у Путина разрешение вывезти мужа в Германию » [archive du ], Meduza,‎ (consulté le )
  8. (ru) « Юлия Навальная официально требует от президента Путина разрешить транспортировку ее мужа в Германию » [archive du ], Écho de Moscou,‎ (consulté le )
  9. (ru) « Алексей и Юлия Навальные дали огромное интервью Юрию Дудю. Мы выбрали главное из разговора, который длится 2,5 часа » [archive du ], Meduza,‎ (consulté le )
  10. (ru) Ioulia Navalnaïa, « «Мой муж — не ваша собственность». Юлия Навальная ответила на инициативу доктора Рошаля по лечению ее супруга » [archive du ], Meduza,‎ (consulté le )
  11. (ru) Leonid Rochal, « «Все понимают Ваше состояние». Леонид Рошаль ответил на критику со стороны Юлии Навальной » [archive du ], Meduza,‎ (consulté le )
  12. (ru) « Юлия Навальная отвергла инициативу доктора Рошаля создать совместную российско-немецкую экспертную группу » [archive du ], Écho de Moscou,‎ (consulté le )
  13. (en-US) Amy Kellogg, « Being Navalny: Russian activist, wife explain his brush with death after poisoning, escaping for treatment » [archive du ], Fox News, (consulté le )
  14. (ru) Vera Tchelichtcheva, « "Юля, ты меня спасла" » [archive du ], Novaya Gazeta,‎ (consulté le )
  15. (ru) « Жена Навального прокомментировала его задержание » [archive du ], Kommersant,‎ (consulté le )
  16. (ru) « "Наступил 37-й год, а мы и не заметили". Юлия Навальная сообщила о слежке » [archive du ], Current Time TV,‎ (consulté le )
  17. (ru) Ioulia Navalnaya, « Юлия Навальная: Наступил 37-й год, а мы и не заметили » [archive du ], Écho de Moscou,‎ (consulté le )
  18. (ru) « «Наступил 37-й год». Юлия Навальная уверена, что её «караулят» полицейские (фото) » [archive du ], fontanka.ru,‎ (consulté le )
  19. (ru) « Юлия Навальная назвала несколько личных причин пойти 23 января на акцию протеста » [archive du ], znak.com,‎ (consulté le )
  20. (en) « Russia: Police detain thousands at pro-Navalny protests » [archive du ], Deutsche Welle, (consulté le )
  21. (ru) « Эхо-рейтинг: 100 самых влиятельных женщин России — рейтинг » [archive du ], Écho de Moscou,‎ (consulté le )
  22. (ru) « Собчак: Навальный отказался выдвинуть жену Юлию в президенты » [archive du ], ВЗГЛЯД.РУ (consulté le )
  23. (ru) « "Российская Тихановская": Потапенко рассказал, кто может стать лидером оппозиции вместо Навального » [archive du ], sobesednik.ru (consulté le )
  24. (ru) « "Навальный может погибнуть в тюрьме». Прокремлевский политолог Сергей Марков о сценариях будущего для «берлинского пациента" » [archive du ], www.fontanka.ru,‎ (consulté le )
  25. (ru) « «Навальный — это бренд, и он будет работать»: сможет ли Юлия Навальная повторить путь Светланы Тихановской » [archive du ], www.e1.ru,‎ (consulté le )
  26. (en) Marc Bennetts, « Yulia Navalnaya: I've been under surveillance since Alexei's arrest », The Times,‎ (lire en ligne [archive du ], consulté le )Inscription nécessaire
  27. (ru) « "Картинка насилия для Кремля лучше". Аббас Галлямов объясняет страхи российской власти » [archive du ], Current Time TV,‎ (consulté le )
  28. (ru) Abbas Gallyamov, « Аббас Галлямов: О политических перспективах Юлии Навальной » [archive du ], Écho de Moscou,‎ (consulté le )
  29. (ru) Abbas Galyamov, « Аббас Галлямов: "Антисистемные настроения создают спрос на "антиполитических" кандидатов" » [archive du ], NEWSru,‎ (consulté le )
  30. (ru) Maxim Chevtchenko, « Максим Шевченко: «Эффекта Хомейни» не получится » [archive du ], Écho de Moscou,‎ (consulté le )
  31. (ru) Dmitry Bykov, « Кусок эфира: Дмитрий Быков: Я бы дорого дал, чтобы из Навального не получился авторитарный руководитель » [archive du ], Écho de Moscou,‎ (consulté le )
  32. (ru) Pavel Lobkov, « Телеканал «Царьград» выдвинул ультиматум Юлии Навальной » [archive du ], TV Rain,‎ (consulté le )
  33. (en) « Yulia Navalnaya, Kremlin critic's wife, in the spotlight » [archive du ], France 24, (consulté le )
  34. (en-GB) « Putin critic Alexei Navalny dies in Arctic Circle jail, says Russia », BBC News,‎ (lire en ligne, consulté le )
  35. (en-GB) Richard Luscombe, Gloria Oladipo et Nicola Slawson, « Alexei Navalny death: dozens reportedly arrested in Russia protests as Biden blames Putin ‘and his thugs’ – as it happened », the Guardian,‎ (ISSN 0261-3077, lire en ligne, consulté le )
  36. (en-GB) « Yulia Navalnaya takes stage at Munich meeting after news of husband's death », The Guardian,‎ (lire en ligne [archive du ], consulté le )
  37. (en) Pjotr Sauer, « Yulia Navalnaya vows to continue husband Alexei's fight and says Putin killed him », The Guardian, (consulté le )
  38. « Mort de Navalny : Ioulia Navalnaïa, la veuve de l’opposant russe, nouvelle cible des fake news », sur L'Express, (consulté le )
  39. (en) « Can Alexei Navalny’s Widow, Yulia Navalnaya, Challenge Putin? », The Wall Street Journal,
  40. Izia Rouviller, « «Midi contre Poutine» : Ioulia Navalnaïa exhorte les Russes à s’exprimer le jour du scrutin présidentiel », sur Libération (consulté le )

Liens externes[modifier | modifier le code]