Initiative populaire « Retour à la démocratie directe »

Initiative populaire fédérale
Retour à la démocratie directe

Déposée le
Déposée par la ligue vaudoise

Contre-projet non
Votée le
Participation 42,52 %
Résultat : acceptée[NB 1]
Par le peuple oui (par 50,7 %)
Par les cantons oui (par 11 3/2)[NB 2]

L'initiative populaire fédérale « Retour à la démocratie directe » est une initiative populaire suisse, approuvée par le peuple et les cantons le .

Contenu[modifier | modifier le code]

L'initiative propose de supprimer l'article 89, alinéa 3 de la Constitution fédérale définissant une « clause d'urgence » et de la remplacer par un article 89bis qui précise que les arrêtés fédéraux peuvent, au besoin, entrer en vigueur dès leur approbation par une majorité des deux chambres du parlement. Toutefois, dans le cas où un tel arrêté est attaqué par référendum populaire ou dans le cas d'un arrêté dérogeant à la Constitution, sa validité expire après une année et ne peut être renouvelé s'il n'est pas soumis à votation pendant cette période.

Le texte complet de l'initiative peut être consulté sur le site de la Chancellerie fédérale[1].

Déroulement[modifier | modifier le code]

Contexte historique[modifier | modifier le code]

La « clause d'urgence » est présente dans la Constitution dès 1874. Elle permet, dans certains cas exigeant une intervention rapide des autorités, d'exclure le référendum permettant ainsi de les faire entrer immédiatement en vigueur, sans avoir à attendre la période de 100 jours pendant lesquels un référendum peut être déposé[2].

Entre les années 1930 et les années 1940, le gouvernement fédéral recourt très fréquemment, bien que sans réelle nécessité, aux arrêtés urgents, empêchant ainsi le recours populaire au référendum[NB 3] ; ces décisions sont motivées, en particulier jusqu’en 1936, par une politique d'équilibre budgétaire et d'économies[3].

Une première initiative, présentée par le parti communiste et proposant de supprimer cette possibilité, est rejetée en votation populaire le [4]. Quelques jours avant cette votation, une seconde initiative sur le même sujet est déposée le mouvement des lignes directrices ; celle-ci fut cependant retirée en 1939 en faveur d'un contre-projet qui, bien qu'accepté en votation, s'avère inefficace[5].

Enfin, le , une troisième initiative sur ce thème, appelée « Initiative populaire 'concernant la réglementation constitutionnelle du droit d'urgence' » est déposée par l'union des indépendants. Elle est cependant retirée deux ans plus tard, son objectif ayant été rempli par l'adoption d'une règle à ce sujet par le Parlement[6]

Récolte des signatures et dépôt de l'initiative[modifier | modifier le code]

La récolte des 50 000 signatures nécessaires par la ligue vaudoise a débuté le . Le , l'initiative a été déposée à la chancellerie fédérale qui l'a déclarée valide le [7].

Discussions et recommandations des autorités[modifier | modifier le code]

Le parlement[8] et le Conseil fédéral[9] recommandent le rejet de cette initiative. Dans son message, le Conseil fédéral indique avoir étudié la possibilité de proposer, comme contre-projet, de limiter la durée des arrêtés fédéraux urgents à trois ans maximum. Cependant, il précise y avoir renoncé en raison de la situation juridique difficile que ce statut apporterait. Sur l'objet de l'initiative en lui-même, le Conseil fédéral indique que la durée prévue d'une année pour soumettre un article à la votation est, selon lui, « trop court pour permettre de procéder à une révision constitutionnelle normale ».

À titre d'exemple, le gouvernement cite dans son rapport le cas du programme financier de 1936 approuvé par un arrêté fédéral urgent et qui aurait nécessité la révision de 5 articles constitutionnels, 23 lois fédérales, 4 arrêtés fédéraux ainsi que les statuts de 2 caisses d'assurances.

Votation[modifier | modifier le code]

Soumise à la votation le septembre, l'initiative est acceptée par 11 3/2 cantons[NB 2] et par 50,7 % des suffrages exprimés[10]. Le tableau ci-dessous détaille les résultats par cantons[11] :

Effets[modifier | modifier le code]

Le , soit quatre jours seulement après le dépôt de cette initiative, une autre initiative populaire appelée Pour le retour à la démocratie directe traitant du même sujet et soutenue par le même comité est présentée à la Chancellerie fédérale, demandant de régler, par une mesure transitoire, le cas des arrêtés urgents pris avant l'adoption de cette initiative. Cette nouvelle proposition sera toutefois retirée en raison d'un contre-projet indirect proposé par le parlement[12].

Lors de la révision de la Constitution fédérale en 1999, la notion d'arrêté fédéral urgent disparait pour être renommée en « Législation d’urgence » dont la définition et les règles, définies dans l'article 165 de la Constitution, sont en tout point pareils[13].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Selon l'article 139 de la Constitution, une initiative proposée sous la forme d'un projet rédigé doit être acceptée à la fois par la majorité du peuple et par la majorité des cantons. Dans le cas d'une initiative rédigée en termes généraux, seul le vote du peuple est nécessaire.
  2. a et b Le premier chiffre indique le nombre de cantons, le second le nombre de cantons comptant pour moitié. Par exemple, 20 6/2 se lit « 20 cantons et 6 cantons comptant pour moitié ».
  3. Le droit de referendum est introduit en Suisse par la constitution fédérale de 1874 : toute loi fédérale ou arrêté fédéral non urgent est soumis au vote populaire si la demande en est faite par 30 000 citoyens ou 8 cantons.

Références[modifier | modifier le code]

  1. « Texte de l'initiative populaire fédérale », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  2. Michel Hottelier, « Clause d'urgence » dans le Dictionnaire historique de la Suisse en ligne, version du .
  3. Renat Künzi, « Un «Jeudi noir» encore dans toutes les mémoires », swissinfo,‎ (lire en ligne)
  4. « Initiative populaire 'contre la clause d'urgence et pour la sauvegarde des droits démocratiques populaires (référendum facultatif)' », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  5. Georg Kreis, « XIXe et XXe siècles : Développement continu de la démocratie » dans le Dictionnaire historique de la Suisse en ligne, version du .
  6. « Initiative populaire 'concernant la réglementation constitutionnelle du droit d'urgence' », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  7. « Initiative populaire 'Retour à la démocratie directe' », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  8. « Objet parlementaire »  (8 février 1949) de la Feuille fédérale référence FF 1949 I 337
  9. « Message du Conseil fédéral »  (27 février 1948) de la Feuille fédérale référence FF 1948 I 1038
  10. « Votation no 148 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  11. « Votation no 148 - Résultats dans les cantons », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  12. « Initiative populaire 'pour le retour à la démocratie directe' », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  13. Constitution fédérale, RS 101, art. 165.