Hagiographie bretonne

L’hagiographie bretonne fait référence à un corpus hagiographique breton homogène.
Partout dans l’Occident médiéval, les textes hagiographiques sont récités durant les offices religieux, médités par les moines ou les clercs, transmis aux fidèles par l’intermédiaire des sermons ou de l’iconographie. Toutefois, la Bretagne est sans doute la région de la France actuelle où ceux-ci ont le plus d’importance par rapport au reste de la documentation médiévale. L'hagiographie constitue, en effet, ici l’essentiel de la production écrite antérieure au xie siècle, ne serait-ce que pour promouvoir le culte des plus célèbres parmi les quelque 1 000 saints bretons dont seulement 700 sont répertoriés car tous ne sont pas « homologués »[1]. La plupart d’entre eux ne sont que des noms conservés dans la toponymie. Plus de la moitié des saints a été oubliée, « près de 400 ont encore une dévotion populaire et très localisée… On comptait à la fin du Moyen-Âge plus de 18 000 chapelles ou églises dans la région, faisant de la Bretagne le territoire avec la plus grande densité de sanctuaires[2] ».
On n’a conservé qu’une centaine de Vies latines médiévales des saints évêques ou abbés des origines bretonnes, en comptant les versions successives et les réécritures. Cette littérature se caractérise en effet par sa fluidité. Les Vies ont sans cesse été réécrites au gré de la conjoncture, afin de garantir les intérêts d’un monastère, asseoir le prestige d’un siège épiscopal ou illustrer un centre de pèlerinage. On peut donc proposer de définir l’hagiographie bretonne comme le corpus des textes liturgiques destinés à promouvoir le culte des « saints patriotes », comme les qualifiait Albert Le Grand au XVIIe siècle dans ses Vies de saints de Bretagne Armorique (1636)[3], ouvrage qui, selon l'historien, Joël Cornette, tient lieu « pendant plusieurs siècles, de bible et d'abécédaire sous de nombreux toits bretons », et est « le principal responsable de la fixation du légendaire hagiographique breton… jusqu'à nos jours[4] ! ». Les vies de saints ont été largement diffusées en Breton dans les familles au XIXe siècle par le Buhez ar Sent.

Littérature hagiographique bretonne[modifier | modifier le code]

La littérature hagiographique bretonne résulte d'un enjeu politique et « d'un effort concerté de « mise en texte du passé » destiné à répondre aux éventuelles contestations de la part de l'Église franque des origines historico-légendaires dont se réclamait le monachisme breton[5] ». Elle a plusieurs spécificités : faire provenir les Sept saints fondateurs de la Bretagne du Pays de Galles et de Cornouailles vers les Ve siècle et VIe siècle, à l'époque de l'émigration bretonne en Armorique. Cette religion insulaire rencontre en Armorique non un christianisme organisé autour du rôle des évêques comme dans le reste de la Gaule, mais des communautés paysannes rassemblées en hameaux, « ce qui fractionne les communautés religieuses et explique la multiplication des lieux de cultes » (d'abord essentiellement des ermitages puis des monastères et des paroisses, d'où les appellatifs toponymiques en Plou- ou Lan). Les guerres de religion du XVIe siècle relancent la littérature hagiographique, les catholiques ouvrant des enquêtes sur la vie des saints, et n'hésitant pas à éliminer un certain nombre de personnages sur le territoire, en les assimilant à des saints plus connus[2].

Liste des principales sources hagiographiques bretonnes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Vie de saints (quelques éditions et traductions françaises récentes)[modifier | modifier le code]

Saint Corentin [BHL 1954][6][modifier | modifier le code]

  • Irien, J. an, Cormerais, J., et Daniélou, H., Saint Corentin, vie et culte / Sant Kaourantin, Tréflévenez, éd. Minihi Levenez, 1999 (traduction en breton et en français de la Vita Chorentini p. 110-129) et de la Vie ancienne de saint Corentin[7] p. 130-151).

Saint Guénolé [BHL 8957][modifier | modifier le code]

  • Simon, M., La légende dorée de saint Guénolé ou Vie brève. Écrite par le moine Clément à Landévennec vers l’an 860, Landévennec/Châteaulin, Pax/éd. Jos Le Doaré, 1985, 32 p.[8].
  • Simon, M., Cochou, L., et Le Huërou, A., « Traduction de la Vie longue de saint Guénolé par l’abbé Gurdisten », dans Cartulaire de Saint-Guénolé de Landévennec, Rennes, Presses Universitaires de Rennes / Société d’Histoire et d’Archéologie de Bretagne, 2015, p. 111-150 (ISBN 978-2-7535-2725-6)

Saint Hervé [BHL 3859-3860][modifier | modifier le code]

Saint Lunaire (BHL 4880-4881)[modifier | modifier le code]

  • Carrée, A. et Merdrignac, B., La Vie latine de saint Lunaire. Textes, traduction, commentaires, CIRDoMoC, 1991.

Saint Malo, Vita auctore Bili [BHL 5116a et b][modifier | modifier le code]

  • Leduc, G., Vie de saint Malo, évêque d’Alet, Dossiers du CeRAA, B-1979, Saint Malo, 1979.

Saint Paul de Léon, Vita Pauli Aureliani [BHL 6585-6586][modifier | modifier le code]

Saints de Redon (gestes des)[modifier | modifier le code]

  • Brett., C., The Monks of Redon. Gesta Sanctorum Rotonensium and Vita Conwoionis, The Boydell Press, 1989, p. 101–219.

Saint Samson, Vita Ia [BHL 7478-7479][modifier | modifier le code]

Bibliographie complémentaire[modifier | modifier le code]

  • N. K. Chadwick, The colonization of Brittany from Celtic Britain, 1965.
    • La colonisation de la Bretagne armorique depuis la Bretagne celtique insulaire. Édité par Armeline en 1999. Traduction du précédent.
    • Les Royaumes Celtiques, 1967, avec Myles Dillon. Édité par Arthème Fayard en 1974, puis Marabout en 1979. Réédité en 1999.
  • A. Chédeville, H. Guillotel, La Bretagne des saints et des rois, Rennes, Ouest-France Université, 1984.
  • Léon Fleuriot, Les Origines de la Bretagne : l'émigration, Paris, Payot, coll. « Bibliothèque historique » (no 34), (1re éd. 1980), 353 p. (ISBN 2-228-12711-6, présentation en ligne), [compte-rendu en ligne], [compte-rendu en ligne].
  • R. Largillière, Les saints et l’organisation chrétienne primitive dans l’Armorique bretonne, Rennes, J. Plihon et L. Hommay, 1925 lire en ligne sur Gallica (reprint. Crozon, Armeline, 1995).
  • B. Merdrignac, Les Vies de saints bretons durant le haut Moyen Âge. La culture, les croyances en Bretagne (VIIe-XIIe siècle), Rennes, Ouest-France Université, 1993.
  • B. Merdrignac, Les saints bretons entre histoire et légendes. Le glaive à deux tranchants, Rennes, PUR, 2008.
  • Martin Heinzelmann, L'hagiographie du haut Moyen Âge en Gaule du nord: manuscrits, textes et centres de production, Jan Thorbecke Verlag, 2001.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Jean-Laurent Bras, « Au pied des géants sculptés de la Vallée des Saints », Ouest-France, no 20065,‎ , p. 34 (lire en ligne)
  2. a et b « La vie de saint Corentin, une histoire politique », sur letelegramme.fr, .
  3. Les vies des saints de la Bretagne Armorique par Albert Le Grand, (1901) lire en ligne sur Gallica
  4. Joël Cornette, Histoire de la Bretagne et des Bretons. Des âges obscurs au règne de Louis XIV, Seuil, , p. 130
  5. Bernard Merdrignac, Les saints bretons entre légendes et histoire. Le glaive à deux tranchants, Presses universitaires de Rennes, , p. 195.
  6. Bibliotheca hagiographica latina
  7. "La ‘Vita’ ancienne de Saint Corentin", éd. André Oheix et Ethel C. Fawtier-Jones, Mémoires de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Bretagne, VI, 1925, p. 5-56.
  8. Réédité dans Simon, M., Saint Guénolé et l’abbaye de Landévennec, éd. Gisserot, 1997, p. 5-29.

Voir aussi[modifier | modifier le code]