Hérisson dans la culture

Gravure ancienne représentant un hérisson dans plusieurs attitudes
Planche sur le hérisson tirée du Thesaurus de Albertus Seba

Toutes espèces de hérissons confondues, ce petit mammifère bardé de piquants est très présent dans la culture, en particulier en Europe où le hérisson commun et le hérisson oriental sont majoritaires. Animal peu farouche, il est bien connu car il n'hésite pas à s'introduire dans les jardins ou les communs, jusque dans les villes. Il n'est pas rare non plus de le surprendre la nuit, traversant les routes où il paie un lourd tribut à sa témérité, jusqu'à mettre en danger certaines populations de hérissons. Attendrissant quand il est apprivoisé mais redoutable quand il hérisse ses piquants et se met en boule, parfois convoité pour sa chair, le hérisson est ainsi à l'origine de multiples croyances, rituels ou influences artistiques[1].

Symbolique du hérisson[modifier | modifier le code]

un hérisson mordant un serpent sculpté au fronton d'un bâtiment
Fronton de la Villa Högberga, à Lidingö en Suède.
Hérissons se roulant pour embrocher des fruits, miniature du bestiaire de Rochester.

Dans l'Égypte antique, on croyait probablement que le hérisson protégeait les morts. De nombreuses représentations de cet animal ont en effet été trouvées dans plusieurs tombes.
Deux de leurs dieux, Âbâset et Temet sont associés au hérisson[2]

Pour les Romains de l'Antiquité, le hérisson était un animal d’une grande importance lors d’une coutume qui est encore familière aujourd’hui. En effet, le de chaque année, les anciens Romains tentaient de prévoir l’arrivée du printemps en observant le hérisson sortir de son terrier. Si le hérisson voyait son ombre (et avait peur), cela signifiait que l’hiver allait durer encore six semaines. Dans le cas contraire, cela signalait l’arrivée du printemps. Aujourd’hui, cette coutume est célébrée avec le jour de la marmotte, mais c’est le hérisson qui en était à l’origine.

Au Moyen Âge le hérisson apparaît dans de nombreux Bestiaires : vers 1210 le chapitre 13 du Bestiaire divin composé en vers par Guillaume le Clerc de Normandie est consacré au « Heriçon »[3], ainsi que le chapitre 19 intitulé « Heriçun » du Bestiaire de Philippe de Thaon[3], un moine et poète anglo-normand du début du XIIe siècle. Vers la même époque, le chapitre 15 du Bestiaire de Gervaise traite du « Eriçon »[4]. Au cours du second quart du XIIIe siècle, Le Bestiaire d'Amour par Richard de Fournival comprend « Li hyreçons ». Le Bestiaire de Pierre de Beauvais parle du hérisson au chapitre 13[3], etc. Les auteurs médiévaux, s'appuyant sur des naturalistes grecs et romains[5] qui dépeignent le hérisson comme détestable, font de l'animal la figure allégorique de Satan[6]. Dans la même optique, la tradition paysanne l'accuse de voler le lait, de téter les vaches la nuit, sa présence dans les potagers est censée porter malheur[7].

Dans la mythologie kabyle, la grande Settut, « Première Mère du Monde » (Yemma-t n dunnit) laisse la marque de sa méchanceté sur le hérisson qui n'a pu se débarrasser des épines d'une carde avec laquelle elle l'a battu.

Les hérissons dans le folklore[modifier | modifier le code]

Créatures fantastiques, contes et légendes[modifier | modifier le code]

Dans le folklore de l'île de Man un Arkan Sonney, mot mannois signifiant hérisson (littéralement oursin chanceux), est une créature féerique ressemblant à un cochon doté de longs poils. Ils sont censés porter chance à celui qui les capture. La légende veut qu'ils fuient les hommes et que, celui qui en attrape un, trouve un morceau d'argent dans sa poche[8].

Un hérisson intervient en tant qu'auxiliaire dans le conte russe intitulé Les Oies sauvages.

Le hérisson de Roujan est l'un des animaux totémiques de l'Hérault, un département français.

En Serbie, on considère que seul un hérisson sait reconnaître la raskovnik, une herbe magique.

Médecine traditionnelle[modifier | modifier le code]

Au Moyen Âge, les hérissons n'ont pas connu un sort toujours heureux. Cet animal faisait parfois partie de la liste d’ingrédients pour la fabrication de concoctions médicinales empiriques. Par exemple, on croyait que les cendres de la peau des hérissons avaient la caractéristique d’enrayer les problèmes de calvitie. On pensait aussi que la vision de nuit pouvait être améliorée simplement en mangeant l’œil droit d’un hérisson préalablement frit dans l’huile de lin.

Au Pays basque, à Laudio et à Larrabezua, on met aux enfants des dents de hérisson en amulette (Kutun), pour provoquer la première dentition.

Le « niglo » des Roms[modifier | modifier le code]

Pendant la Seconde Guerre mondiale et la grande persécution, le hérisson était un plat quasi-quotidien des Roms (dits aussi bohémiens, gitans, romanichels, tziganes…) de France et d'Europe, qui l'appellent « niglo » (terme romani dérivé de l'allemand Igel ). D'où l'expression qui désigne la seule manière connue en France de manger du hérisson : « à la gitane » (ou selon les variantes, « à la tsigane », « à la bohémienne », etc.). Ce plat, assez connu jusqu'au début du XXe siècle, est très peu consommé actuellement, notamment en raison de l'habitude des hérissons de se rouler dans des excréments pour étouffer les puces et les tiques, qui nécessite un nettoyage fastidieux avant cuisson. Par ailleurs le hérisson est une espèce protégée dans toute la Communauté européenne, « il est interdit de le détruire, de le transporter, de le naturaliser, de le mettre en vente[9] ».

Nigloland est aussi un parc d'attractions situé à Dolancourt dans l'Aube, fondé par deux frères et anciens forains, nommé ainsi en hommage à leur mascotte, le « niglo » (hérisson)[10].

Expressions[modifier | modifier le code]

Surnoms[modifier | modifier le code]

Divers[modifier | modifier le code]

Les hérissons dans la fiction[modifier | modifier le code]

L'analogie entre le hérisson et le comportement humain consistant à préférer garder une certaine distance avec ses proches, par peur de trop souffrir de ces relations, dit aussi complexe du hérisson, est souvent évoquée dans les ouvrages faisant référence à cet animal.

Littérature et essais[modifier | modifier le code]

Quelques œuvres littéraires et essais faisant allusion au hérisson :

  • Des blasons pour le hérisson, livre du journaliste et écrivain français Jean-Luc Angélis (avec Laure Angélis, illustration de couverture de Pierre Joubert), P. Téqui, 2000.
  • Le Complexe du Hérisson, roman de l'écrivain et professeur universitaire marocain Habib Mazini, Éditions Tarik, 2002.
  • Le Hérisson et le Renard (repris dans Les Penseurs russes, trad. fr. 1984), de l'anthropologue américain Clifford Geertz.
  • Un hérisson dans la tempête (An Urchin in the Storm: Essays about Books and Ideas), 1987. Ouvrage du paléontologue et biologiste américain Stephen Jay Gould.
  • Le Renard et le Hérisson : comment combler le fossé entre la science et les humanités ? (The Hedgehog, the Fox, and the Magister's Pox), de Stephen Jay Gould, trad. fr., éditions du Seuil, 2003.
  • Du hérisson, roman paru aux Éditions de Minuit, 2002, où l'écrivain Éric Chevillard a rendu un hommage surréaliste au « hérisson naïf et globuleux ». L'auteur s'y voit empêché d'écrire son autobiographie en raison de l'intrusion d'un hérisson sur sa table de travail.
  • L'enfant hérisson, ouvrage sur l'autisme de Katia Rodhe, ed. Imago, 2006.
  • L'Élégance du hérisson, roman de Muriel Barbery qui a remporté le prix des libraires en 2007. Il s'agit ici d'une métaphore sur la condition du personnage central de l'histoire, une concierge d'immeuble raffinée et cultivée qui se camoufle derrière une apparence repoussante et un caractère acariâtre.
  • Le Renard, les Mouches, et le Hérisson est la treizième fable du livre XII de Jean de La Fontaine.
  • Le Hérisson et le renard : une piquante alliance de la linguiste Irène Tamba, Klincksieck, 2012.
  • etc.

Michel Onfray, dans la Théorie du corps amoureux (Grasset, 2000), propose une longue Célébration du hérisson célibataire, présenté comme animal hédoniste et prétexte à une généalogie de la pensée judéo-chrétienne concernant les relations homme-femme à travers les sociétés (et l'hostilité dont l'animal a pu faire les frais au cours des siècles en Europe chrétienne)[12].

Opposant les multiples ruses du renard à l'unique mais imparable stratégie du hérisson, qui se roule en boule, « le renard sait beaucoup de choses, mais le hérisson une seule grande » est un aphorisme du poète grec Archiloque. Même si l'usage proverbial de cette association antinomique disparut dans l'histoire et la littérature, le bestiaire symbolique des fables n'en donnant aucun exemple, ce vers est cité par Plutarque et l'on doit sa transmission latine à l'exégèse érudite d'Érasme. L'image a ensuite été reprise, surtout dans les cercles du monde académique anglo-saxon, notamment par les philosophes britanniques Martin Hollis, Isaiah Berlin, qui a écrit en 1953 un essai titré Le Hérisson et le Renard (repris dans Les Penseurs russes, trad. fr. 1984), l'anthropologue américain Clifford Geertz et le paléontologue américain Stephen Jay Gould, auteur d'un essai paru en français en 2003 sous le titre : Le Renard et le Hérisson : comment combler le fossé entre la science et les humanités ? (The Hedgehog, the Fox, and the Magister's Pox). Berlin l'utilise pour distinguer deux catégories antithétiques de penseurs et écrivains : les hérissons monistes, face aux renards, pluralistes. Dans sa lignée, Geertz y lit l'opposition des « théoriciens du rituel », les philosophes, adeptes d'un principe unificateur et d'un « savoir global », et des « théoriciens de l'action symbolique », les anthropologues, adeptes de « savoirs locaux ». Gould a repris cette image, mais voulant dépasser la dichotomie, considère les deux animaux comme emblématiques de la divergence et de la complémentarité des sciences et des lettres. La linguiste Irène Tamba a consacré un essai très érudit au parcours sinueux de cette union symbolique, à travers toutes ses citations et références, intitulé Le Hérisson et le renard : une piquante alliance (Klincksieck, 2012).

Littérature et albums pour la jeunesse[modifier | modifier le code]

Une famille de hérissons habillés et sautant de joie
Illustration populaire du XIXe siècle de Heinrich Leutemann ou Carl Offterdinger, d'après le conte allemand Der Hase und der Igel (le lièvre et le hérisson) de Wilhelm Schröder

Journaux[modifier | modifier le code]

Bandes dessinées[modifier | modifier le code]

Films, séries et animations[modifier | modifier le code]

Jeux vidéo[modifier | modifier le code]

  • Sonic le hérisson (Sonic the Hedgehog) est un hérisson bleu, héros d'une série de jeux vidéo développée par Sega depuis 1991. Il s'agit d'un personnage de jeu vidéo récurrent, un hérisson bleu capable d'atteindre une vitesse de Mach 1, qui obtint immédiatement un très fort succès et devient rapidement la mascotte officielle de Sega, qui recherchait une mascotte capable de rivaliser avec Mario, celle de leur concurrent Nintendo. Avec plus de 45 millions de jeux vendus, Sonic est devenu l'une des icônes les plus populaires du jeu vidéo.
  • Hedgewars (Hedgewars) est un jeu vidéo libre et open source de combat par équipe avec des armes très variées, un peu à l'image de Worms. Chaque équipe est ainsi composée d'un certain nombre de hérissons personnalisables. Le jeu propose différents modes.

Musique[modifier | modifier le code]

Le premier mouvement du Concertino de Janáček représente un hérisson tentant de rejoindre son terrier.

Liste des hérissons de fiction[modifier | modifier le code]

Les hérissons dans les arts plastiques[modifier | modifier le code]

Dans les tombeaux égyptiens, plusieurs peintures murales représentent des scènes de genre ou scènes de la vie quotidienne. Certaines d’entre elles illustrent des personnages jouant à des jeux de société et des enfants jouant avec divers jouets. L’un d’eux est un petit hérisson de bois monté sur roues. Un de ces jouets fut découvert dans la ville persane de Susa, en excellent état de conservation du fait du climat sec.

Philatélie[modifier | modifier le code]

Un hérisson sur un sol couvert de feuilles mortes forme de cœur et comme dessiné par un enfant
Timbre d'Allemagne fédérale de 2007 (0,55 ) de la série Pour nous, les enfants
  • Un timbre français de 2001 (3 FRF - 0,46 ) est sorti le , représentant un hérisson tapi derrière une pierre, dans la série Nature de France.
  • Un timbre français de 2007 est émis le au sein d'un carnet de dix timbres autocollants au tarif « Lettre prioritaire 20 g » et représente un hérisson portant un bonnet d'hiver qui souhaite « meilleurs vœux » dans un décor enneigé.
  • Un timbre d'Allemagne fédérale de 2007 (0,55 ) est sorti le dans la série Pour nous, les enfants (Für uns Kinder) représentant un hérisson sur un sol couvert de feuilles mortes en forme de cœur, comme dessiné par un enfant.

Les hérissons en héraldique[modifier | modifier le code]

Blason de Baudonvilliers coupé de sinople à la vipère d'argent affrontant à hérisson en défense d'or ; et de gueules à la fontaine héraldique d'or remplie d'azur, traversée de trois sources d'argent surmontée de deux marguerites d'argent boutonnées d'or.
Blason de Baudonvilliers, ville de la Meuse, montrant dans la moitié haute un hérisson jaune affrontant une vipère blanche sur fond vert.
Blason à quatre quarts portant en haut à gauche une aigle héraldique carrelée argent-gueules (symbole morave), en haut à droite un hérisson de gueules stylisé sur fond argent, en bas à gauche une grappe de groseilles sur fond argent, et en bas à droite le lion rampant argent couronné d'or sur fond de gueules (symbole de la Bohême)
Blason de la Vysotchine, une région tchèque, montrant un hérisson rouge stylisé sur fond blanc.
Blason avec un hérisson argent et sable sur fond azur, surmonté d'une bande d'or avec trois fleurs azur
Blason de Viļaka, une ville de Lettonie

En héraldique, le hérisson est souvent présent comme emblème sur des blasons.

Par exemple les blasons de certaines villes comme :

  • Coudekerque-Branche : « De sable à un hérisson d'argent couronné d'or »
  • Hérisson : « D'azur à un hérisson d'or »
  • La Petite-Raon : « De sinople, au hérisson contourné d'argent, mantelé d'or, à deux saumons aussi d'argent, adossés et mis en pal, cantonnés de trois croisettes du champ disposées 1 - 2 »
  • Sainte-Marie-sur-Mer : le hérisson (ou porc-épic selon d'autres sources) rappelle les moines de Saint Philibert arrivés au VIIIe siècle et sachant défendre leur territoire (prieuré de Sainte-Marie – Brevet d'Hozier, 1704). Il pourrait aussi évoquer l'animal emblème de Louis XII, époux de la reine et duchesse Anne de Bretagne.
  • etc.

ou les armoiries des familles nobles, comme celles de la famille nobles française Miorcec de Kerdanet : « d'azur un hérisson d'or, au chef d'argent chargé de trois mouchetures de sable. »

Istrice (le Hérisson) est le nom de l'une des dix-sept contrades de Sienne en Italie. Des regroupements culturels de quartiers médiévaux de la ville.

Forme moderne du blason, le logo de la fédération France nature environnement représente un hérisson.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Valérie Page, 2001. Le hérisson emblème d'une nature réhabilitée (thèse en ligne). Deuxième partie: Évolution de l'image du hérisson. Troisième partie d'une thèse de l’École Vétérinaire de Nantes. Lire le document pdf.
  2. Jean-Pierre Corteggiani, L'Égypte ancienne et ses dieux, éditions Fayard, 2007.
  3. a b et c Alexandre Vermeille, 2006. Physiologus, De l’Orient à l’Occident Un patchwork multiculturel au service de l’Écriture. Mémoire de latin dirigé Par M. Jean-Jacques Aubert, professeur à l’Université de Neuchâtel. Université de Neuchâtel, Faculté des lettres et sciences humaines, Sciences de l’Antiquité. Lire le document pdf
  4. L'identité exacte de l'auteur reste incertaine, certains attribuent l'ouvrage à Gervais de Tilbury (thèse de Alexandre Vermeille, 2006 Lire le document pdf) mais ce serait plutôt un moine d'après l'étude du document réalisée par Paul Meyer en 1872 Lire le document pdf
  5. Pline, Histoire naturelle, Livre VIII, 56
  6. Louis Abbé Charbonneau-Lassay, Le Bestiaire du Christ, Albin Michel, , p. 123
  7. Marlène Albert-Llorca, L'ordre des choses. Les récits d'origine des animaux et des plantes en Europe, Éd. du Comité des Travaux Historiques et Scientifiques, , p. 146
  8. [1]
  9. « Nos amis les herissons : une espèce protégée ! », sur cpepesc.org, (consulté le ).
  10. https://archive.wikiwix.com/cache/20110224030023/http://niglolandworld.free.fr/Histoire.html.
  11. Corinne Morel, Dictionnaire des symboles, mythes et croyances, Archipoche éditions, coll. « Archiréférence », 958 p. (ISBN 978-2352871453).
  12. Michel Onfray, Théorie du corps amoureux - Pour une érotique solaire, Troisième partie, Chapitre 2: Du contrat - Célébration du hérisson célibataire, p. 239 (Ed. Grasset, 2000)

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Vidéos[modifier | modifier le code]