Clouage

Aux échecs, le clouage est une situation dans laquelle une pièce menacée ne peut pas se déplacer sans exposer une pièce de plus grande valeur à une capture. Clouer est l'action d'attaquer une pièce adverse de façon à créer un clouage. La pièce directement attaquée est dite clouée.

Si le déplacement de la pièce clouée aboutissait à exposer son roi à un échec, alors ce coup est interdit par les règles du jeu et on parle de clouage absolu. Dans les autres cas, le clouage est relatif.

Définition et exemples de clouage[modifier | modifier le code]

abcdefgh
8
Tour noire sur case blanche a8
Roi noir sur case blanche c8
Pion noir sur case noire g7
Cavalier sur case blanche e6
Fou noir sur case blanche b5
Fou blanc sur case blanche f5
Pion sur case blanche a4
Dame blanche sur case noire a1
Roi blanc sur case blanche d1
8
77
66
55
44
33
22
11
abcdefgh
Le cavalier et le pion entourés en rouge sont cloués

Pour qu'un clouage ait lieu, il faut que la pièce attaquante, la pièce clouée et celle qu'elle protège (la « pièce de l'arrière » selon Aaron Nimzowitsch) se trouvent sur une même rangée, colonne ou diagonale[1].

Dans le diagramme ci-contre, le cavalier noir fait l'objet d'un clouage absolu, car son déplacement exposerait le roi à un échec.

Il existe également un clouage relatif du pion blanc, car s'il prenait le fou noir il permettrait la capture de la dame par la tour noire. Contrairement au clouage absolu, sortir de ce clouage n'est pas un coup illégal.

Aaron Nimzowitsch fait aussi une différence entre clouage « total » où la pièce clouée ne peut absolument pas bouger, et clouage « partiel » ou « semi-clouage ». Dans ce dernier cas la pièce dispose de quelques cases pour se déplacer sans exposer la pièce de l'arrière[1]. C'est, dans le diagramme, le cas du pion blanc : il peut avancer en a5, puis en a6 et a7, tout en restant cloué. À l'inverse, le cavalier est toujours en clouage total[1].

La protection qu'offre une pièce clouée en soutenant une autre pièce est « imaginaire[1] ». Dans le diagramme la dame blanche pourrait sans problème prendre le pion g7 car le cavalier e6 cloué serait dans l'impossibilité de la reprendre. Le fou noir ne peut être pris par le pion blanc sans que les Blancs perdent la dame, il est donc en sécurité. Il est ainsi possible, sans risque, à un joueur de mettre ses pièces et ses pions en prise par rapport à une pièce clouée puisqu'elle ne les attaque pas réellement[1].

Utilisation stratégique et tactique du clouage[modifier | modifier le code]

Le plus souvent, un clouage n'arrive que dans « les moments tactiques », par exemple lorsqu'une ou plusieurs pièces font des attaques successives sur une autre[1]. Néanmoins, un clouage qui est préparé peut influencer l'ensemble d'une partie[1]. Un clouage qui n'arrive que par moments, ou même la simple menace d'un clouage peuvent suffire à provoquer chez l'adversaire des « coups faibles[1] ».

Il est souvent fructueux de chercher à gagner la pièce clouée. En effet, son immobilité tend à en faire une faiblesse[1]. Le plan pour gagner cette pièce est de l'attaquer, de manière classique, c'est-à-dire en essayant d'avoir plus d'attaques que de défenses sur la pièce[1]. C'est le plus souvent en rajoutant l'attaque d'un pion que la pièce sera gagnée, car elle ne peut fuir cette attaque[1].

Exemple de clouage dans une partie[modifier | modifier le code]

Diagramme 1
abcdefgh
8
Tour noire sur case blanche e8
Dame noire sur case blanche g8
Roi noir sur case noire h8
Pion noir sur case noire a7
Tour noire sur case noire e7
Pion noir sur case blanche h7
Pion noir sur case noire b6
Pion blanc sur case blanche e6
Pion noir sur case blanche g6
Dame blanche sur case blanche b5
Cavalier noir sur case noire c5
Pion blanc sur case blanche a4
Pion blanc sur case noire h4
Pion blanc sur case noire c3
Tour blanche sur case noire e3
Pion blanc sur case noire g3
Fou blanc sur case blanche h3
Tour blanche sur case noire e1
Roi blanc sur case noire g1
8
77
66
55
44
33
22
11
abcdefgh
Position avant 29... Cxe6 ?
Diagramme 2
abcdefgh
8
Tour noire sur case blanche e8
Dame noire sur case blanche g8
Roi noir sur case noire h8
Pion noir sur case noire a7
Tour noire sur case noire e7
Pion noir sur case blanche h7
Pion noir sur case noire b6
Cavalier noir sur case blanche e6
Pion noir sur case blanche g6
Pion blanc sur case blanche a4
Pion blanc sur case noire h4
Dame blanche sur case blanche b3
Pion blanc sur case noire c3
Tour blanche sur case noire e3
Pion blanc sur case noire g3
Fou blanc sur case blanche h3
Tour blanche sur case noire e1
Roi blanc sur case noire g1
8
77
66
55
44
33
22
11
abcdefgh
Position après 30. Db3

Dans la partie entre Anna Ushenina et Sophie Milliet, à la troisième ronde du Championnat d'Europe des nations 2013, Ushenina, avec les Blancs, montre l'exemple de ce que Susan Polgar qualifie de « clouage parfait[2]. »

Dans la position du diagramme 1, les Noirs jouent 29... Cxe6 ? Le clouage qui va s'ensuivre sera « mortel » pour eux (un échange de dames par 29... Td8 30.a5 De8 aurait été meilleur[2]). Les Blancs répondent par 30.Db3 (diagramme 2). Le cavalier e6 ne peut plus être sauvé[2]. Les Noirs abandonnent rapidement : 30... Cg5 31.Dxg8 1-0[2]

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f g h i j et k Aaron Nimzowitsch (trad. de l'allemand), Mon Système, vol. 1, Paris, Petite Bibliothèque Payot Échecs, , 190 p. (ISBN 2-228-88696-3), p. 129-141
  2. a b c et d Susan Polgar, « Varsovie : Anna Ushenina ou l'art du clouage parfait », Europe Échecs, no 639,‎ , p. 50-51

Articles connexes[modifier | modifier le code]

  • L'enfilade est apparentée au clouage, à la différence que c'est la pièce de plus grande valeur qui fait l'objet de l'attaque directe.
  • Tactique échiquéenne