Bataille de Legé (30 avril 1793)

Bataille de Legé
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Vue de Legé, lithographie de Thomas Drake, album vendéen, vers 1850.
Informations générales
Date
Lieu Legé
Issue Victoire vendéenne
Belligérants
Drapeau de la France République française Drapeau de l'Armée catholique et royale de Vendée Vendéens
Commandants
Gabriel Boisguyon François Athanase Charette de La Contrie
• Gabriel-Esprit Vrignault
Forces en présence
600 hommes[1],[2]
2 canons[1],[2]
1 500 hommes[1],[2]
Pertes
100 morts ou blessés[2],[3]
21 prisonniers[4]
2 canons capturés[2],[3]
11 morts[1]

Guerre de Vendée

Batailles

Coordonnées 46° 53′ 11″ nord, 1° 35′ 51″ ouest
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Bataille de Legé

La première bataille de Legé a lieu le lors de la guerre de Vendée. Elle s'achève par la victoire des Vendéens qui repoussent une attaque des républicains contre la ville de Legé.

Prélude[modifier | modifier le code]

Après sa défaite à Machecoul le 22 avril, le chef vendéen Charette est en difficulté[5]. Il se porte d'abord à Legé, qu'il trouve vide de combattants, ces derniers étant partis rejoindre les troupes de Joly du côté de La Mothe-Achard pour s'opposer aux forces de Boulard[5],[6]. Il pousse alors sur Rocheservière et Vieillevigne, mais est mal accueilli par Vrignault, le chef local[5],[6],[2]. Le 23 avril, Charette rejoint les forces de Charles de Royrand à Saint-Fulgent[7],[8],[6]. Mais l'entrevue entre les deux chefs tourne mal, Royrand reprochant publiquement à Charette de ne pas avoir su conserver Machecoul[8],[6]. Ce dernier retourne à Vieillevigne, mais le comité royaliste de la localité demande à être payé pour fournir des vivres à ses combattants[8],[6]. Charette s'établit alors à Legé, qui n'est alors sous la coupe d'aucun chef notable — le capitaine de paroisse Pineau se rallie à lui — et dont le comité royaliste local, dirigé par Madame Lespinay de La Roche et Gouraud de la Raynière, est peu influent[2]. Il envoie alors des émissaires dans les communes environnantes pour reconstituer ses forces[8],[2]. Vrignault lui-même vient le rejoindre avec ses troupes[8],[2].

De son côté, le général républicain Jean-Michel Beysser obtient à Bourgneuf-en-Retz la soumission de l'île de Noirmoutier le 29 avril[9],[10]. Il retourne à Machecoul pendant la nuit et apprend que Legé est aux mains des insurgés[1]. Il donne alors l'ordre à son second, l'adjudant-général Gabriel Boisguyon, de prendre cette ville[1],[11].

Forces en présence[modifier | modifier le code]

Dans son rapport[A 1], l'adjudant-général Gabriel Boisguyon écrit que sa troupe était forte de 600 hommes, dont 40 cavaliers, accompagnés de 2 canons de 4 livres[1],[2],[11],[12],[3]. Dans ses mémoires[A 2], l'officier vendéen Pierre-Suzanne Lucas de La Championnière estime le nombre des républicains de 700 à 800 et les présente comme des Nantais guère plus aguerris que les paysans révoltés[14],[13].

Concernant les forces vendéennes, Boisguyon les estime à au moins 4 000 hommes, peut-être 8 000[11],[14], mais sans aucune pièce d'artillerie[11]. Elles seraient en réalité au nombre d'environ 1 500 hommes[1],[2],[12],[3], dont 1 000 amenés par Vrignault[1]. Selon Pierre-Suzanne Lucas de La Championnière, seulement un quart des combattants sont équipés d'armes à feu[13],[12].

Déroulement[modifier | modifier le code]

Le 30 avril, à deux heures de l'après-midi, les républicains arrivent en vue de Legé au village du Pas, après être passés par Paulx et Touvois[1],[11]. L'artillerie et la cavalerie sont en queue de colonne[1] et des tirailleurs sont placés à l'avant-garde[13]. Averti, Charette et Vrignault prennent position sur une hauteur appelée les Moulins — en raison de la présence de trois moulins — qui domine le gué de la rivière de la Logne[1]. Celle-ci est alors haute, en raison de fortes pluies au cours des jours précédents[1]. Seules deux pierres étroites font office de pont[13].

Le combat est d'abord favorable aux républicains[2]. Ces derniers franchissent le gué et s'emparent de la position des Moulins en une demi-heure[1],[11],[13]. Ils poussent ensuite jusqu'à la chapelle de l'Ouche-aux-Moutons, située sur le sommet de la colline du bourg[1],[12]. Mais Charette parvient à regrouper ses hommes et fait filer ses combattants armés de fusils le long des haies afin d'envelopper les républicains sur leurs ailes[1],[2],[11],[13],[12]. Ces tirs, semblant venir de toutes parts, déconcertent les républicains et jettent la confusion dans leurs rangs[1],[11],[13]. Boisguyon ne parvient pas à déployer son artillerie et le terrain n'est pas favorable à la cavalerie[11],[13],[12]. Craignant d'être enveloppé, il donne l'ordre de la retraite, mais celle-ci se transforme en déroute[1],[2],[11],[13]. Les fantassins sont gênés par les cavaliers, les canons et les chariots[1]. Le commandant républicain ne parvient pas à rallier ses troupes, qui fuient en désordre jusqu'à Machecoul[1],[11].

Pertes[modifier | modifier le code]

Rentré à Machecoul, Boisguyon écrit qu'une centaine de ses hommes sont manquants, bien que dit-il, certains soldats isolés continuent de regagner la ville au moment où il rédige son rapport[2],[3],[11]. Lucas de La Championnière rapporte de son côté qu'un certain nombre de républicains sont faits prisonniers[13]. Parmi ces derniers, plusieurs soldats du 4e régiment d'infanterie — l'ex-régiment de Provence — et leur officier, le capitaine de Méric, rallient l'armée de Charette[1],[12].

Les républicains ont également perdu leurs deux canons[2],[3],[11],[13], ainsi qu'un chariot de vivres et un caisson d'ambulance[2],[3],[11]. Mais surtout, les Vendéens s'emparent de poudre et de plusieurs fusils[3],[13].

Les insurgés comptent onze morts, dont trois habitants de Legé, qui sont enterrés le lendemain par l'abbé Gillier[1].

Conséquences[modifier | modifier le code]

Le 1er mai, au lendemain de la bataille, Charette annonce son intention de marcher sur Machecoul[15]. Cependant une violente émeute éclate entre les hommes de Charette et ceux de Vrignault qui se disputent la possession des canons pris aux républicains[15],[12]. Charette est lui-même pris à partie, des combattants sont blessés et une dizaine de mutins sont arrêtés et enfermés dans une écurie[15],[12]. Les chefs finissent cependant par rétablir le calme et Charette gracie les mutins[15],[12].

Le soir du 2 mai, un millier d'insurgés sortent de Legé et se portent en direction de Machecoul[15],[12]. Charette écrit à Couëtus et à La Cathelinière pour leur demander d'apporter leur concours à l'expédition, mais ces derniers n'adressent aucune réponse[12]. Lorsque la troupe arrive à Paulx sous une pluie torrentielle, Vrignault et ses hommes annoncent qu'ils ne veulent plus avancer[15]. Au matin du 3 mai, les cavaliers vendéens envoyés en éclaireurs sont surpris par les dragons de Lorient, sortis de Machecoul[15],[12]. Ils prennent la fuite et tombent sur les fantassins de Charette et Vrignault, provoquant la débandade de ces derniers[15],[12]. Toute la petite armée insurgée regagne alors Legé dans le plus grand désordre, en parvenant cependant à ramener ses canons[15],[12],[6].

Du côté des républicains, le général Canclaux, commandant en chef de l'armée des côtes de Brest, arrive à Nantes le 1er mai[16]. Dès le lendemain, il décide de reprendre Legé[2] et planifie l'attaque de la ville par quatre colonnes : la colonne de Beysser, forte de 700 à 800 hommes avec deux canons, présente à Machecoul ; la colonne de Boulard, avec les représentants en mission Goupilleau de Montaigu, Goupilleau de Fontenay et Fayau, forte de 1 200 à 1 300 hommes avec quatre canons, présente à Palluau ; la colonne de Baudry d'Asson, forte de 1 600 hommes avec deux canons, présente à Challans et la colonne de Laborie, forte de 600 hommes avec deux canons, présente à Saint-Colombin[16],[17].

Charette devine qu'une offensive se prépare contre lui et le 3 mai, il ordonne l'évacuation de Legé, afin de rejoindre les forces de Royrand à Vieillevigne et Montaigu[15],[18],[4]. Cependant, il se heurte aux combattants et aux habitants de Legé qui refusent d'abandonner la ville et se massent devant les canons en menaçant ceux qui cherchent à les emporter[15]. Le calme est cependant rétabli, les canons sont attelés et les Vendéens abandonnent Legé dans la nuit du 3 au 4 mai[15],[13]. Vrignault et ses hommes s'arrêtent à Rocheservière et ne suivent pas le reste de l'armée[15]. Charette arrive à Vieillevigne avec seulement 450 hommes et se heurte à l'hostilité du comité royaliste de la localité qu'il doit payer pour pouvoir obtenir des vivres pour ses troupes et des logements dans des hangars abandonnés[15],[18]. Il envoie également un courrier pour Charles de Royrand, à Montaigu, pour le prévenir de son arrivée et lui demander de la place dans son cantonnement[15],[4]. Mais ce dernier répond en lui reprochant l'abandon de Legé et en lui défendant de se présenter à son camp[16],[18],[4]. Charette s'installe alors dans les landes de Bouaine, entre Saint-Philbert-de-Bouaine et Montbert[4].

Le , à 11 heures du matin, les quatre colonnes républicaines entrent dans Legé, où elles ne rencontrent qu'une résistance insignifiante[19]. Le général Canclaux se rend lui-même sur place avec la colonne de Beysser[19],[17]. Vingt-et-un soldats républicains blessés au combat du sont découverts dans un hôpital, soignés par des femmes, et déclarent avoir été bien traités par les Vendéens[19],[4].

Les différentes colonnes regagnent alors leurs cantonnements initiaux et Canclaux ne laisse à Legé qu'une petite garnison de 320 hommes du 39e régiment d'infanterie de ligne avec deux canons, sous les ordres du chef de brigade Prat[19],[4],[17]. Mais le 7 mai, la colonne de Laborie, de retour à Saint-Colombin, est écrasée par Charette lors d'une attaque-surprise[20].

Le 9 mai Legé est abandonnée sur ordre du général Canclaux, qui estime que la localité est désormais insuffisamment défendue[20]. Sa petite garnison se retire sur Machecoul[20]. Le soir même, Charette peut faire son retour à Legé, où il établit son quartier-général et où il est rejoint par Vrignault[20].

Notes[modifier | modifier le code]

  1. « Je crois utile à vos opérations de vous informer de la déroute complète que j'ai éprouvée hier dans mon attaque sur Legé. Trompé par de faux renseignemens, je partis hier, par ordre du général Beysser, avec six cents hommes, dont quarante de cavalerie, et deux pièces de quatre pour attaquer Legé. Arrivé à deux heures après midi, malgré les mauvais chemins, je reconnais la position, mais non le nombre des rebelles. L'attaque commence, ils sont chassés en moins d'une demi-heure de leur position la plus avantageuse. Je veux entrer dans le village à l'arme blanche, mais on fait faire de faux mouvements à mon artillerie, la confusion s'en mêle, on épuise les munitions sans utilité; bientôt l'artillerie se trouve aventurée au point de ne pouvoir plus se dégager. La cavalerie, dans une position détestable,ne peut être d'aucun secours. Enfin, me voyant près d'être enveloppé, j'ai ordonné la retraite, qui est devenue une déroute générale, sans pouvoir rallier la moindre partie de ma troupe. Mes deux pièces de canon, leurs caissons, ainsi qu'un charriot de vivres et un caisson d'ambulance sont restés au pouvoir de l'ennemi. Il me manque environ cent hommes, mais il en rentre encore. L'ennemi était, sans exagération, au nombre de quatre mille hommes, on le porte même à huit mille ; et cependant, avec un peu d'ensemble dans l'exécution, on pouvait s'en rendre maître; il n'avait point d'artillerie[11]. »

    — Rapport de l'adjudant-général Boisguyon, adressé au général Boulard, rédigé le 1er mai 1793 à Machecoul.

  2. « Un détachement de 7 à 800 hommes sortit de Machecoul pour venir attaquer Legé ; M. Charette pour le coup résolut de les attendre et prit sa position aux Moulins, au-delà du bourg du côté du chemin de Touvois. Ce chemin étroit et d'ailleurs traversé par un ruisseau, rendait l'attaque de Legé difficile ; ce fut cependant le côté que les Républicains choisirent ; aussi l'affaire ne fut pas longtemps douteuse. En vain les canonniers et les tirailleurs avaient débusqué le poste des Moulins, M. Charette, en même temps qu'ils s'avançaient, faisait filer le long des haies ce qu'il avait d'hommes armés de fusils ; les chevaux d'artillerie furent les premiers renversés, et le corps d'armée, que les chefs républicains tenaient en bataille dans un pré, fusillé de toutes parts sans savoir d'où partaient les coups, se débanda et prit la fuite. Les pièces de canons restèrent engagées dans un chemin plus étroit que leur essieu, l'infanterie se jeta dans le ruisseau qui n'avait pour pont que deux pierres étroites ; alors mouillés jusqu'aux cuisses, les soldats furent bientôt arrêtés par les paysans du lieu qui, connaissant d'autres passages, leur coupèrent aisément la route.

    Cette affaire, au fond peu difficile, car nos ennemis presque tous habitants de Nantes, n'étaient guère plus aguerris que nous, devint importante par ses effets. Sans parler des deux pièces de canon qui nous restèrent (nous ne nous en sommes jamais utilement servi) la poudre nous était bien nécessaire ; nous n'avions pas le quart de nos hommes armés. Nous prîmes dans cette affaire encore plus de fusils que de prisonniers et ces derniers avaient des portefeuilles si bien garnis, des montres brillantes et d'autres bijoux, que les plus lâches se promirent du courage dans un autre combat pour attraper ce qu'on appelait "le petit horloge".

    Cependant, malgré cette victoire, on n'osa occuper Legé plus longtemps ; des troupes se rassemblèrent pour venir nous attaquer sur plusieurs points et M. Charette crut devoir les éviter. Mais une nouvelle guerre pensa s'allumer au moment du départ entre nos soldats, encore peu habitués à la soumission aveugle que doivent avoir des militaires. Les habitans de Legé, voyant leur pays abandonné à l'ennemi, non seulement refusèrent de partir, mais, accusant de lâcheté ceux qui voulaient suivre le Général, ils entourèrent les deux pièces de canon et voulaient percer de leurs piques quiconque eût osé y toucher. Si M. Charette eût paru en ce moment, un combat sanglant allait peut-être détruire les plus braves de sa petite armée ; il laissa passer le moment de la fureur et lorsqu'après de longues disputes le calme se fut rétabli, comme il arrive presque toujours, il fit atteler les chevaux aux pièces et partit pour Vieillevigne sans qu'on y mît opposition[13]. »

    — Mémoires de Pierre-Suzanne Lucas de La Championnière.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u et v Chantreau 2010, p. 211.
  2. a b c d e f g h i j k l m n o p q et r Dumarcet 1998, p. 213-215.
  3. a b c d e f g et h Gras 1994, p. 36.
  4. a b c d e f et g Dumarcet 1998, p. 216-217.
  5. a b et c Chantreau 2010, p. 208.
  6. a b c d e et f Rouchette 2010, p. 26-27.
  7. Dumarcet 1998, p. 209 et 221.
  8. a b c d et e Chantreau 2010, p. 209.
  9. Gabory 2009, p. 153-154.
  10. Savary, t. I, 1824, p. 176.
  11. a b c d e f g h i j k l m n et o Savary, t. I, 1824, p. 182-183.
  12. a b c d e f g h i j k l m n et o Gabory 2009, p. 166-167.
  13. a b c d e f g h i j k l m et n Lucas de La Championnière 1994, p. 16-17.
  14. a et b Dumarcet 1998, p. 221.
  15. a b c d e f g h i j k l m n et o Chantreau 2010, p. 212.
  16. a b et c Chantreau 2010, p. 213.
  17. a b et c Savary, t. I, 1824, p. 185-186.
  18. a b et c Gabory 2009, p. 168.
  19. a b c et d Chantreau 2010, p. 214.
  20. a b c et d Chantreau 2010, p. 215.

Bibliographie[modifier | modifier le code]