Art contemporain africain

L’art contemporain africain s'inspire aussi bien des traditions du continent que des réalités urbaines contemporaines de l'Afrique.

Les techniques et les supports sont variés : peinture, installations avec projection vidéo, sculptures faites en matériaux de récupération.

Définitions[modifier | modifier le code]

La notion même d'art contemporain africain a évolué au fil des ans. À la fin des années 1960, l'art moderne et contemporain africain se définit par opposition à une forme artistique précoloniale qui est reliée à un peuple ou à un groupe culturel. L'art contemporain naitrait à la fin de la période coloniale avec l'apparition d'artistes qui ne sont plus des anonymes. Les échanges culturels entre l'Europe colonisatrice et l'Afrique seraient aussi le signe de cette apparition d'un art contemporain puisque que les artistes mêleraient ces influences pour créer un art original[1].

Cependant, plus récemment, le début de l'art contemporain africain est parfois daté des années 1980-1990, par opposition à une forme d'art antérieure nourrie des idéologies pan-africaines ou de la négritude, et alors qualifiée d'art moderne africain. Les projets artistiques contemporains seraient plus individuels, moins collectifs. Les évolutions politiques, sociétales et culturelles ont transformé les sociétés africaines et l'art s'est nourri de ces transformations[1].

U.-S. C. Nzewi postule que les évolutions du Dak'Art sont représentatives de l'art contemporain africain dans son ensemble, et souligne que si les objets étaient jusque là des tableaux ou des sculptures, de nouveaux modes d'expression sont apparus durant les années 2000 (photographie, vidéos, performances, etc.), reflétant l'emprise de la globalisation et la vision néolibérale du marché de l'art[1].

Côté occidental, malgré des débuts de diffusion d'artistes africains à partir de la fin des années 1980, et la multiplication des références à cet art contemporain, plusieurs professionnels de l'art manifestent des réticences à traiter d'un courant homogène, commun à toute l'Afrique, s'abritant quelquefois derrière une fatale ignorance d'un domaine aussi vaste[2], et certains ne voient dans la notion même d'art contemporain africain qu'une étiquette commode pour valoriser sur le marché une production perçue comme financièrement prometteuse[3], ou redoutent un étiquetage au risque du post-colonialisme[4],[5], ce dernier avis étant partagé par une éditrice de critique d'art franco-ivoirienne pour qui «  il n'y a pas » non plus « d'art contemporain africain », l'origine d'un artiste ne pouvant définir son art[6]. Tous s'accordent toutefois sur l'existence d'un art contemporain en Afrique, un second point de débat étant l'inclusion ou pas de formes d'art dites populaires ou non conceptuelles ainsi que du courant primitiviste[4].

Historique[modifier | modifier le code]

Les premiers bouillonnements connus de l'art contemporain en Afrique sont sans doute ceux initiés au sein du Mbari Club du début des années 1960 et pendant les années 1970, dans la ville d'Osogbo, au Nigéria. Sous l'impulsion de Susanne Wenger, d'Ulli et Georgina Beier, des ouvriers, artisans et artistes se forment à de nouveaux modes d'expression appliqués à l'art religieux traditionnel [7], et certains de leurs travaux sont relayés par le magazine littéraire de la même galaxie, Black Orpheus.

Pendant cette période, les pays africains acquièrent leur indépendance et les artistes locaux cherchent une identité propre, un art national, de nouveaux canons de beauté[8]. C'est ainsi que des mouvements apparaissent, comme le vohou-vohou en Côte d'Ivoire, le premier à rompre l'académisme post-colonial dans son pays[8].

En 1988, le critique d'art Achille Bonito Oliva est le promoteur du peintre africain Fathi Hassan à la XXIIIe Biennale de Venise, le premier artiste africain à cette Biennale de Venise, et il devient l'artiste africain le plus connu en Europe, ouvrant la voie aux nouvelles promesses du continent africain[9].

En 1989, l'exposition Magiciens de la terre (Centre Pompidou/Grande Halle de la Villette) présentait des œuvres d'art africain contemporain (d'artistes vivants) pour la première fois en Europe, mode de monstration mettant en valeur un certain primitivisme exotique.

En 2005, l’exposition Africa Remix, présentée en Allemagne, en Grande-Bretagne, en France et au Japon, montre un panorama important de l'art contemporain spécifiquement africain, et, surtout, la richesse de l'art sub-saharien.

En 2014, le centre national d'art et de culture Georges Pompidou - Beaubourg de Paris expose les œuvres trois membres de l'école de Poto-Poto, Marcel Gotene (Gouache sur toile sans titre), Nicolas Ondongo (Marché en AEF) et Jacques Zigoma (Retour du Marché) dans le cadre de l'exposition D'une rive à l'autre[10].

L'Afrique s'est dotée de quelques centres d'art contemporain. Festivals ou biennales sont organisés sur le continent, les plus connus étant la Biennale de Dakar au Sénégal, les Rencontres de la photographie de Bamako (Mali), la Biennale Bénin, ou encore la Biennale de Marrakech (Maroc). Cependant, globalement, le manque de politiques culturelles et de moyens des États africains rend difficile l'émergence d'un écosystème artistique et d'une structuration du marché de l'art sur le continent, qui reste pauvre en initiatives de soutien à la création, musées, galeries, résidences, etc. La situation est par ailleurs très inégale d'un pays à l'autre du continent (l'Afrique du Sud, le Nigeria ou encore le Maroc figurant parmi ceux dont l'infrastructure et le marché sont les plus développés)[11].

Plusieurs grandes collections privées d’œuvres d'artistes africains contemporains se sont constituées, en particulier la Contemporary African Art Collection (CAAC) basée à Genève, constituée à partir de 1989 par l'homme d'affaires italien Jean Pigozzi par l'intermédiaire du commissaire et marchand d'art André Magnin[12]. Depuis 2000, le couple Gervanne et Matthias Leridon, fondateurs du fonds de dotation African Artists for Development, se constitue une collection d’œuvres du continent et a ainsi réuni environ deux mille pièces en quinze ans[13]. Basée sur le continent africain lui-même, la collection Sindika Dokolo, à Luanda (Angola), a été lancée par le collectionneur et homme d’affaires congolais Sindika Dokolo, l’artiste Fernando Alvim et le commissaire Simon Njami[14].

Depuis 2013, les signes d'une plus grande visibilité et reconnaissance de l'art contemporain africain se font de plus en plus nombreux. Plus exposés, plus présents sur le marché de l'art, les artistes africains font désormais l'objet de foires spécialisées (1:54 à Londres et New York, Also Known As Africa (AKAA) à Paris)[15],[16], de ventes spécialisées (chez Bonhams, Piasa, Millon), d’expositions à grand succès (à Paris, Beauté Congo à la Fondation Cartier en 2015, Seydou Keita au Grand-Palais en 2016) et commencent à occuper une place plus visible dans les grands événements artistiques internationaux (à la Biennale de Venise en 2015, une trentaine d'artistes venus du continent africain étaient invités)[17],[18].

Événements[modifier | modifier le code]

Sous le terme d'événements sont compris les biennales, triennales et autres festivals artistiques ayant lieu en Afrique.

Afrique du Sud[modifier | modifier le code]

Congo Brazzaville[modifier | modifier le code]

Côte d'Ivoire[modifier | modifier le code]

  • MASA : Marché des arts du spectacle africain, initiative de l'Agence Intergouvernementale de la Francophonie.

Nigeria[modifier | modifier le code]

  • FESTAC 77 : festival mondial des arts nègres organisé à Lagos. Cet événement a célébré pendant un mois la culture africaine et présenté au monde la musique, les beaux-arts, la littérature, le théâtre, la danse, la philosophie et les religions traditionnelles africaines, mais aussi son art contemporain.

Sénégal[modifier | modifier le code]

Promotion des artistes africains[modifier | modifier le code]

Fondation Zinsou[modifier | modifier le code]

La Fondation Zinsou est une fondation privée. Elle a ouvert ses portes en 2005 à Cotonou, au Bénin. Tout d’abord principalement un lieu d’exposition pour les artistes contemporains africains, elle a vu ses horizons s’élargir et son action se renforcer au cours des 13 dernières années. Désormais l’action de la Fondation est aussi bien artistique que culturelle, pédagogique et sociale.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b et c (en) Ugochukwu-Smooth C. Nzewi, « The making of a Canon : Historicizing Contemporary African Art at Dak'Art », dans Ugochukwu-Smooth Nzewi, Thomas Fillitz, Dak'Art: The Biennale of Dakar and the Making of Contemporary African Art, Oxon, Routledge, (ISBN 978-1-350-10649-9, lire en ligne)
  2. Philippe Dagen, « Existe-t-il un « art africain » ? », Critique d’art. Actualité internationale de la littérature critique sur l’art contemporain, no 26,‎ (ISSN 1246-8258, DOI 10.4000/critiquedart.1114, lire en ligne, consulté le )
  3. (en) Rebecca Anne Proctor, « Contemporary Art From Africa Is Seizing Global Attention. Here’s Your Guide to Six Emergent Art Markets Making It Happen », sur artnet News, (consulté le )
  4. a et b Aude de Kerros, Art Contemporain, manipulation et géopolitique : Chronique d'une domination économique et culturelle, Éditions Eyrolles, , 272 p. (ISBN 978-2-212-81010-3, lire en ligne), p. 162.
  5. Nicolas Michel, « Les Africains aux marges du marché – Jeune Afrique », sur JeuneAfrique.com, (consulté le ).
  6. « Art contemporain : "Something we Africans got", ou quand les artistes africains sont racontés par "ceux qui savent" », sur Franceinfo, (consulté le ).
  7. Florent Souvignet, « Probst, Peter. Osogbo and the Art of Heritage. Monuments, Deities, and Money.. Indianapolis, Indiana University Press, 2011, 207 p., bibl., ill. », Cahiers d’études africaines, no 223,‎ (ISSN 0008-0055, lire en ligne, consulté le )
  8. a et b Mimi Errol, « L'art contemporain en Côte d'Ivoire : des origines à l'aventure vohou-vohou », Africultures, no 56,‎ , p. 91 (ISBN 2747553787, ISSN 1276-2458, DOI 10.3917/afcul.056.0091, lire en ligne).
  9. Bianca De Fazio, In mostra Fathi Hassan dal Cairo con passione, La Repubblica, 3 décembre 2009
  10. Jean-Pierre Bat, « Signé Peintres de Poto-Poto, au Centre Pompidou », Libération blogs,‎
  11. « Musées, fondations, collections : quand l'Afrique mise sur l'art », sur Le Point Afrique (consulté le )
  12. « Caacart 2016 - Pigozzi Collection 2016 », sur Caacart - The Pigozzi Collection (consulté le )
  13. « Les Leridon, afro-optimistes et grands collectionneurs », Le Monde.fr,‎ (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le )
  14. « La plus grande collection africaine d’art contemporain prend ses quartiers au Portugal », Le Monde.fr,‎ (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le )
  15. Angélique Diomé, « Le "Paris" africain de Victoria Mann », Paris Match,‎ (lire en ligne)
  16. Philippe Dagen, « Foire : toute la diversité de l’art africain à l’AKAA », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  17. Marie-Anne Kleiber, « La revanche de l'art contemporain africain - leJDD.fr », sur LeJDD.fr (consulté le )
  18. « Le boom événementiel de l'art contemporain africain - Hebdo - RFI », sur rfi.fr (consulté le )
  19. Voir le site.(en)

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Africa Art Market Report – Modern + Contemporary (2014), par Africa Art Market, 2015 [partie générale sur l'état du marché en Afrique de l’Ouest traduite en français
  • Christophe Domino et André Magnin, L'Art africain contemporain, Ed. Scala, 2005
  • Joëlle Busca, L'Art africain contemporain. Du colonialisme au postcolonialisme, L'Harmattan, 2001
  • Sidney Littlefield Kasfir, L'Art contemporain africain, Thames & Hudson, 2000
  • Jean-Godefroy Bidima, L’Art négro-africain, Que Sais-je ?, 1998
  • Nicole Guez, L’Art africain contemporain, association Afrique en Créations, 1992
  • Revue Noire : revue sur l'art africain contemporain (1991-2000 seulement).
  • Africultures : revue consacrée aux cultures africaines : art, cinéma, danse, littérature, musique, photo, théâtre…

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]