Antiphonie

Dans le domaine musical, l'antiphonie est l'alternance de deux chœurs[1],[2], à différencier du mode responsorial qui fait alterner un soliste et un chœur.

Description[modifier | modifier le code]

L'antiphonie est le procédé faisant alterner deux chœurs. Plusieurs modes d'alternance peuvent exister, comme la répétition des mêmes phrases[3].

L'« antiphonie responsoriale », principalement présente dans les liturgies orientales, emprunte souvent la forme suivante : les versets sont chantés alternativement par les demi-chœurs, un refrain est repris par le chœur entier[3].

L'écriture du concerto peut évoquer le procédé de l'antiphonie[3].

Historique[modifier | modifier le code]

Antiquité[modifier | modifier le code]

À l'origine, le terme désigne concernant la musique de la Grèce antique une symphonie (dans son acception étymologique d'union de sons) exécutée en octaves et non à l'unisson comme dans l'homophonie[4],[5].

Pour Pierre-Paul Lacas, l'antiphonon grec signifie octave : hommes et femmes chantent à l'octave[3]. Dans l'antiphona latine, deux chœurs ou deux solistes « chantent alternativement une suite de versets mélodiquement identiques (alternance simple ; forme psalmodique AA répétée) »[3].

Tradition chrétienne[modifier | modifier le code]

Ambroise de Milan, évêque de Milan au IVe siècle, aurait institué le chant antiphonique afin de donner de l'éclat aux cérémonies religieuses[2]. Cette pratique serait d'origine byzantine[2]. Au VIe siècle, Saint Grégoire constitue un Antiphonaire qui codifie le genre[2].

Renaissance[modifier | modifier le code]

À la fin du XVIe siècle et au début du XVIe siècle, un maître de l'antiphonie, technique caractéristique du style polychoral vénitien, est Giovanni Gabrieli[6].

Giovanni Gabrieli, Canzon Septimi Toni.
Partition sur laquelle deux groupes d'instruments se répondent
Giovanni Gabrieli, Canzon Septimi Toni.

Musique baroque[modifier | modifier le code]

On trouve des échanges antiphoniques dans les motets et la Passion selon saint Matthieu de Jean-Sébastien Bach. Dans Komm, Jesu, komm, Bach utilise huit voix divisées en deux chœurs antiphoniques[7].

Jean-Sébastien Bach, Komm, Jesu, komm.
Partition sur laquelle deux chœurs se répondent
Jean-Sébastien Bach, Komm, Jesu, komm.

Période classique[modifier | modifier le code]

Les échanges entre vents et cordes dans le premier mouvement de la 5e Symphonie de Beethoven sont encore plus vifs. Ici, le développement culmine dans un « passage singulièrement dramatique »[8] consistant en une « étrange séquence d'accords »[9].

Beethoven, développement de la 5e Symphonie.
Partition montrant une opposition entre les vents et les cordes.
Développement 5e Symphonie de Beethoven.

Musique du XXe siècle[modifier | modifier le code]

On trouve également des exemples de musique antiphonique au XXe siècle. On peut en particulier citer Gruppen pour trois orchestres de Karlheinz Stockhausen (1955-1957), qui culmine dans une « vague synchronisée de « ponctuations » de cuivres dans les trois orchestres… conduisant à un climax d'échanges d'accords d'orchestre à orchestre »[10].

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Gérard Pernon, « Antiphonie », dans Gérard Pernon, Dictionnaire de la musique, Paris, Ouest-France, coll. « Le Livre de poche », , 480 p. (ISBN 978-2-2530-3872-6), p. 17.
  • (en) Peter O’Hagan, « ‘Antiphonie’: une analyse du processus de composition », dans Pierre Boulez. Techniques d’écriture et enjeux esthétiques, Genève, Éditions Contrechamps, 2006, p. 109-131 (ISBN 9782940068258).

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Dictionnaire de français Larousse, « Définition : antiphonie », sur www.larousse.fr (consulté le )
  2. a b c et d Pernon 1984, p. 17.
  3. a b c d et e Pierre-Paul Lacas, « Chant antiphonique », sur Encyclopædia Universalis (consulté le ).
  4. Jean-Jacques Rousseau, Dictionnaire de musique, (lire en ligne)
  5. François-Joseph Fétis, Biographie universelle des musiciens et bibliographie générale de la musique. Tome 1, Bruxelles, Meline, Cans et Compagnie, (lire en ligne), p. CXIV-CXV
  6. Karlheinz Stockhausen, « Musique dans l'espace », Revue belge de Musicologie / Belgisch Tijdschrift voor Muziekwetenschap, vol. 13, nos 1/4,‎ , p. 76–82 (ISSN 0771-6788, DOI 10.2307/3685956, lire en ligne, consulté le )
  7. (en) John Eliot Gardiner, Music in the Castle of Heaven : a Portrait of Johan Sebastian Bach, Londres, Allen Lane, , p. 470.
  8. (en) George Grove, Beethoven and his Nine Symphonies, Londres, Constable, , p. 153.
  9. (en) Antony Hopkins, The Nine Symphonies of Beethoven, Londres, Heinemann, , p. 137.
  10. (en) Robin Maconie (dir.), The Works of Stockhausen, Londres, Marion Boyars, , p. 111.

Liens externes[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :

  • Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généralisteVoir et modifier les données sur Wikidata :