avec des paramètres qui ne dépendent que de la pression, de la température et de la composition du mélange, le volume n'apparaissant que dans le facteur de compressibilité. Sous cette forme, ces équations sont facilement utilisables en appliquant la méthode de Cardan pour trouver le volume d'un fluide.
La première équation d'état cubique est celle de Johannes Diderik van der Waals et date de 1873 ; elle valut le prix Nobel de physique en 1910 à son concepteur. Van der Waals introduisit les notions d'interaction à distance et de taille des molécules dans son équation, ce qui la différencie fondamentalement du modèle des gaz parfaits dans lequel les molécules sont des sphères dures sans dimension qui n'interagissent entre elles que par collision. La grande nouveauté de cette équation fut de prédire un point critique et la transition de phase gaz-liquide (voir Figure 1). Cette équation et toutes celles qui lui ont succédé présentent néanmoins un certain nombre de défauts inhérents à la forme, dont celui de mal représenter le point critique et de surévaluer systématiquement le volume des liquides.
Cependant, la simplicité de ce modèle, sa facilité d'utilisation et la possibilité de calculer les équilibres liquide-vapeur conduisirent de nombreux chercheurs à en proposer des développements. La liste d'équations présentée dans cet article n'est pas exhaustive[1] et ne pourrait pas l'être étant donné la profusion de publications concernant ces équations[2]. La sélection effectuée se base sur des critères tant liés à l'histoire qu'à l'intérêt pratique des équations. L'équation de van der Waals par exemple est présentée parce qu'elle est la première des équations d'état cubiques, mais son imprécision l'a fait abandonner dans la pratique, hormis dans le domaine de l'enseignement où sa simplicité la rend facilement manipulable. Les équations d'état de Soave-Redlich-Kwong (1972) et de Peng-Robinson (1976) sont encore d'usage courant dans l'industrie et font toujours l'objet de nombreuses études[3].
Cette équation d'état, la première équation d'état cubique, a été proposée en 1873 par Johannes Diderik van der Waals[4]. Elle valut à celui-ci le prix Nobel de physique de 1910 « pour ses travaux sur l'équation d'état des gaz et des liquides »[5]. Elle est la première équation d'état qui, en tenant compte des interactions entre molécules via le paramètre et de la taille de celles-ci via le paramètre , représente la transition de phase liquide-gaz et le point critique. Elle se présente sous la forme :
Équation de van der Waals :
Elle a pour forme polynomiale :
Équation de van der Waals :
Pour un corps pur, les paramètres (constant) et sont calculés à partir des pression et température critiques (mesurables expérimentalement) selon :
Pour un corps pur :
Le paramètre est généralement écrit sous la forme . Pour l'équation de van der Waals, et .
L'équation de van der Waals souffre de nombreux défauts, dont ceux de ne pas représenter correctement le volume critique et la capacité thermique isochore. Dès 1880 Rudolf Clausius, qui auparavant avait complété l'énoncé du deuxième principe de la thermodynamique (1850) et inventé le concept d'entropie (1865), proposa une amélioration de l'équation d'état de van der Waals[6],[7],[8]. Cette équation tente de corriger le défaut de l'équation de van der Waals au point critique en introduisant un terme correctif et celui concernant la capacité thermique isochore en faisant dépendre le paramètre de la température. L'équation de Clausius prend la forme :
Équation de Clausius :
Elle a pour forme polynomiale :
Équation de Clausius :
Pour un corps pur, les paramètres , et sont calculés à partir des coordonnées du point critique (mesurables expérimentalement) selon :
Pour un corps pur :
avec :
Cette équation nécessite la connaissance de , et (ou ).
Le paramètre de l'équation de Clausius étant petit devant , Daniel Berthelot propose en 1899 de considérer que [9],[10],[11]. Son équation prend la forme :
Équation de Berthelot :
Elle a pour forme polynomiale :
Équation de Berthelot :
Pour un corps pur, les paramètres et sont calculés à partir des coordonnées du point critique (mesurables expérimentalement) selon :
Pour un corps pur :
avec :
Cette équation nécessite la connaissance de , et (ou ).
En 1972 Giorgio Soave propose une modification de la fonction de l'équation de Redlich-Kwong en y introduisant le facteur acentrique[14]. Cette nouvelle équation est appelée équation de Soave-Redlich-Kwong ou de Redlich-Kwong-Soave. Elle est de la forme :
Équation de Soave-Redlich-Kwong :
Elle a pour forme polynomiale :
Équation de Soave-Redlich-Kwong :
Pour un corps pur, les paramètres et sont calculés à partir des coordonnées du point critique (mesurables expérimentalement) selon :
Pour un corps pur :
avec :
Cette équation nécessite la connaissance de , et .
En 1976 Ding-Yu Peng et Donald Robinson proposent une nouvelle modification du terme attractif de l'équation de van der Waals[15]. Cette équation est de la forme :
Équation de Peng-Robinson :
Elle a pour forme polynomiale :
Équation de Peng-Robinson :
Pour un corps pur, les paramètres et sont calculés à partir des coordonnées du point critique (mesurables expérimentalement) selon :
Pour un corps pur :
avec :
Cette équation est appelée Peng-Robinson 76.
En 1978, Peng et Robinson modifient la fonction selon[16] :
si
sinon
Cette équation est appelée Peng-Robinson 78.
Cette équation nécessite la connaissance de , et .
En 1982 Navin C. Patel et Amin S. Teja proposent une nouvelle modification du terme attractif de l'équation de van der Waals afin de mieux prendre en compte le facteur de compressibilité critique via un paramètre [17],[18]. Cette équation est de la forme :
Équation de Patel-Teja :
Elle a pour forme polynomiale :
Équation de Patel-Teja :
Pour un corps pur, les paramètres , et sont calculés à partir des coordonnées du point critique (mesurables expérimentalement) selon :
Pour un corps pur :
avec :
Le facteur de compressibilité critique peut être la valeur expérimentale ou être calculé, pour les fluides apolaires, selon :
Le paramètre est la plus petite racine réelle de l'équation :
Les paramètres et sont ensuite calculés selon :
Cette équation est proche de celle de Soave-Redlich-Kwong si et de celle de Peng-Robinson si .
Cette équation nécessite la connaissance de , , et (ou ).
En 1990, la complexité de la formulation de l'équation de Patel-Teja et sa limitation aux fluides apolaires conduisent José O. Valderrama à en proposer une forme généralisée, plus simple mathématiquement et applicable également aux fluides polaires[19]. Cette équation est de la forme :
Équation de Patel-Teja-Valderrama :
Elle a pour forme polynomiale :
Équation de Patel-Teja-Valderrama :
Pour un corps pur, les paramètres , et sont calculés à partir des coordonnées du point critique (mesurables expérimentalement) selon :
Pour un corps pur :
avec :
Les paramètres , et sont calculés selon :
Cette équation nécessite la connaissance de , , et (ou ).
Toutes les équations d'état cubiques présentées précédemment peuvent être représentées sous les deux formes généralisées suivantes :
Équation d'état cubique généralisée
(FG1)
(FG2)
Les paramètres , , et sont des nombres réels adimensionnels. Ils sont liés par les relations :
et réciproquement :
Selon l'équation d'état et les règles de mélange appliquées, les paramètres , , et peuvent dépendre de la température et de la composition. Le tableau suivant donne l'expression de ces paramètres pour les différentes équations d'état vues précédemment.
Paramètres des équations d'état cubiques
Équation d'état cubique
van der Waals Berthelot
Clausius
Redlich-Kwong Soave-Redlich-Kwong
Peng-Robinson
Patel-Teja Patel-Teja-Valderrama
On pose également la forme généralisée :
Équation d'état cubique généralisée
(FG3)
avec et .
Par définition, toutes les équations d'état cubiques peuvent se mettre sous la forme générale de polynôme du troisième degré en , le facteur de compressibilité :
Équation d'état cubique généralisée :
(FP)
avec :
des paramètres qui ne dépendent que de la pression , de la température et de la composition (fractions molaires),
Les règles de mélange permettent l'application des équations d'état aux mélanges, c'est-à-dire de calculer les paramètres , et , notés respectivement , et , pour un mélange. Ces paramètres font intervenir la composition du mélange via les fractions molaires de ses constituants et les paramètres , et du corps pur pour chacun des corps du mélange.
Ces règles sont dues à van der Waals (1890[20]) pour l'application de son équation d'état aux mélanges. Ces règles sont appelées règles de mélange classiques :
Règles de mélange classiques :
avec un paramètre d'interaction binaire entre le corps et le corps , déterminé expérimentalement, avec et .
Variantes
Il existe des variantes de ces règles, l'une des plus simples consistant à calculer le covolume selon :
avec un paramètre d'interaction binaire entre le corps et le corps , déterminé expérimentalement, avec et . Si tous les sont nuls, cette règle revient à la règle classique.
Une autre variante consiste à calculer le covolume selon une combinaison des diamètres des particules :
En 1979 Huron et Vidal[21] proposent des règles dans lesquelles le covolume du mélange est calculé selon la règle de van der Waals :
Mais le terme de cohésion, pour une équation d'état sans paramètre (van der Waals, Berthelot, Redlich-Kwong, Preng-Robinson...), est calculé selon :
avec :
une constante propre à chaque équation d'état : avec et les paramètres de la forme généralisée (FG2) de l'équation d'état cubique ; si (y compris si ), alors ;
Pour une équation d'état avec un paramètre (Clausius, Patel-Teja...), il faut ajouter la règle de mélange :
et modifier la règle de mélange du paramètre de cohésion :
avec :
la constante calculée pour le mélange ;
la constante calculée pour le corps pur.
Le principal défaut de ces règles est qu'elles prennent pour référence un état à pression infinie, or les modèles d'enthalpie libre molaire d'excès sont développés pour des pressions de l'ordre de la pression atmosphérique. Afin de corriger ce défaut, ces règles ont fait l'objet de deux modifications importantes par Michelsen en 1990[22] et par Dahl et Michelsen également en 1990[23].
Démonstration.
L'enthalpie libre molaire idéale d'un mélange liquide s'écrit :
avec :
l'enthalpie libre molaire du mélange liquide idéal aux mêmes pression, température et composition que le mélange réel ;
l'enthalpie libre molaire du corps pur à l'état liquide aux mêmes pression et température que le mélange réel ;
la fraction molaire du corps .
L'enthalpie libre molaire d'excès d'une phase liquide s'écrit :
avec :
l'enthalpie libre molaire d'excès ;
l'enthalpie libre molaire du mélange liquide réel.
L'enthalpie libre molaire du mélange de gaz parfaits correspondant au mélange liquide réel s'écrit :
avec :
l'enthalpie libre molaire du mélange de gaz parfaits aux mêmes pression, température et composition que le mélange réel ;
l'enthalpie libre molaire du corps à l'état de gaz parfait pur aux mêmes pression et température que le mélange réel.
On introduit l'enthalpie libre molaire du mélange de gaz parfaits dans l'enthalpie libre molaire d'excès :
On reconnait les enthalpies libres molaires résiduelles du mélange et de chacun des corps purs :
l'enthalpie libre molaire résiduelle du corps pur.
On a donc :
L'enthalpie libre molaire d'un mélange liquide s'écrit, avec la forme généralisée (FG2) des équations d'état cubiques :
L'enthalpie libre molaire résiduelle d'un liquide pur s'écrit, avec la forme généralisée (FG2) des équations d'état cubiques :
En remplaçant les enthalpies libres résiduelles par leur expression et en réarrangeant on a :
On pose la règle de mélange identique à celle de van der Waals pour le covolume :
on a :
Pour le mélange et le corps pur :
D'où, à pression infinie :
Si , c'est-à-dire si les paramètres et de la forme généralisée (FG2) des équations d'état cubiques sont les mêmes pour un corps pur et pour un mélange, ce qui exclut les équations possédant un paramètre (Clausius, Patel-Teja...) :
En 1992 Wong et Sandler[24] proposent, pour une équation d'état sans paramètre (van der Waals, Berthelot, Redlich-Kwong, Preng-Robinson...), de modifier la règle de mélange du covolume selon :
avec :
une constante propre à chaque équation d'état : avec et les paramètres de la forme généralisée (FG2) de l'équation d'état cubique ; si (y compris si ), alors ;
; étant un paramètre d'interaction binaire entre le corps et le corps , déterminé expérimentalement, avec et .
Le terme de cohésion est calculé selon :
Pour une équation d'état avec un paramètre (Clausius, Patel-Teja...), il faut ajouter la règle de mélange :
et modifier la règle de mélange du covolume :
avec :
la constante calculée pour le mélange ;
la constante calculée pour le corps pur.
Contrairement aux règles de van der Waals et de Huron-Vidal, les règles de Wong-Sandler impliquent une dépendance du paramètre à la température, même si les paramètres des corps purs sont des constantes.
Démonstration.
L'énergie libre molaire idéale d'un mélange liquide s'écrit :
avec :
l'énergie libre molaire du mélange liquide idéal aux mêmes pression, température et composition que le mélange réel ;
l'énergie libre molaire du corps pur à l'état liquide aux mêmes pression et température que le mélange réel ;
la fraction molaire du corps .
L'énergie libre molaire d'excès d'une phase liquide s'écrit :
avec :
l'énergie libre molaire d'excès ;
l'énergie libre molaire du mélange liquide réel.
L'énergie libre molaire du mélange de gaz parfaits correspondant au mélange liquide réel s'écrit :
avec :
l'énergie libre molaire du mélange de gaz parfaits aux mêmes pression, température et composition que le mélange réel ;
l'énergie libre molaire du corps à l'état de gaz parfait pur aux mêmes pression et température que le mélange réel.
On introduit l'énergie libre molaire du mélange de gaz parfaits dans l'énergie libre molaire d'excès :
On reconnait les énergies libres molaires résiduelles du mélange et de chacun des corps purs :